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Crier que tous ces peuples qui demandent grâce crevaient de misère et de faim, ce serait enlever à la guerre sa rouge auréole. Et pourtant…

— Les conditions de l’armistice proposées aux Autrichiens par l’Italie, d’accord avec l’Entente, sont acceptées. Une certaine joie, surtout chez les soldats italiens transplantés en France, qui s’en vont en criant : « La paix est signée ! »

— En ce qui concerne l’Allemagne, voici un dialogue entendu dans la rue, qui donne les deux notes de l’opinion. Une bourgeoise : « Enfin, cela va être bientôt fini. » Un bourgeois : « Oh ! Il faut pousser encore, aller chez eux. » Elle : « Oui, ce sera très beau. Mais ce seront encore de nouvelles pertes. » Lui : « En tout cas, il faut qu’ils payent. » Elle : « Oh ! oui, il faut qu’ils payent. » Là-dessus, ils tombent d’accord. C’est le mot d’ordre. Il est unanime.

— Le 6. Publication des conditions de l’armistice avec l’Autriche. Les gens disent avec un large sourire : « C’est dur. » Clemenceau délire de joie dans un discours à la Chambre, tout en observant à deux reprises que « la paix n’est pas si proche que certains le croient ». Mayéras et Renaudel demandent des précisions sur la clause de l’armistice qui prévoit l’occupation par les Alliés « pour maintenir l’ordre ». Ils cherchent aussi à savoir si l’Entente accepte les quatorze conditions de Wilson, acceptées par l’ennemi. Les indiscrets !

— Le 6. J’entre dans deux magasins de Joigny (nous devons quitter cette ville demain, emmenant en auto notre fils à Serbonnes). Et c’est encore les deux notes. Ici, la patronne oublie qu’elle tient la caisse. Elle est environnée de cartes, de journaux. Elle mesure l’avance. Elle la mesure comme elle compterait sa recette, avec une rapacité volup-