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— On a commandé aux enfants des écoles des affiches qui prêchent les restrictions. On en a mis partout. Dessins candides. Que c’est pénible, ces conseils des petits aux grands « Économisez ceci. Privez-vous de cela, etc. ».

— Le 30. Reprise de Noyon. Clemenceau va être bien content. Bapaume est également réoccupé. Depuis l’offensive du 18 juillet, j’ai appris quatre morts dans notre petit cercle. Jamais autant de deuils dans un temps si court. Il est certain que les sacrifices de ces opérations, menées selon le vœu de Poincaré, Clemenceau et leurs généraux, sont sans exemple depuis le début de la guerre. Mais je n’entends personne le remarquer. Et nul cri d’alarme, de pitié, de prudence, de patriotisme véritable.

— Le 30. La troupe au village. Tous ces malheureux enfants (classe 19) se plaignent de la nourriture. C’est la viande verte de pourriture et sanglante faute de cuisson. C’est la conserve de bœuf qui sent le minium parce que la couleur a pénétré dans les boîtes. Ce sont les lentilles pleines de cailloux. Ceux qui ont quelques sous vont acheter de la charcuterie. Souvent les soldats n’ont que 120 grammes de pain. Il y a des jours où le ravitaillement manque (à 100 kilomètres du front) Un jour, comme légumes, on distribua des citrons…

Les « feuillées » débordent. Dans ce village construit pour 300 habitants, 1.500 hommes défèquent à fleur de terre. Un paysan dit qu’il y a partout une odeur de « merde fanée ».