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— Tristan conte qu’en une ville du front, l’accès de la maison de tolérance est interdit aux Américains. Mais à 50 mètres de là, dans un chemin creux, les soldats américains échangent, avec des soldats français leur uniforme, pour pénétrer dans la Terre promise.

— Le 24. Le Japon va marcher, me téléphone-t-on. Les États-Unis l’y autorisent. Mais je ne parviens pas à savoir contre qui.

— On veut donner à une voie de Paris le nom de Wilson. Il y a 20 mois, lors de son élection, on le traînait dans la boue. Quelle pantalonnade ce serait, sans les morts !

— Depuis l’extension de la zone des armées, un sauf-conduit est nécessaire pour aller de Paris en banlieue même. Et c’est, dans les commissariats de police, la plus brutale et la plus grossière inquisition, surtout vis-à-vis des femmes. Nécessité de justifier le but du voyage, la parenté avec la personne qu’on va voir, de montrer la lettre où elle vous appelle. Le tout assaisonné de réflexions : « On ne fait pas de voyages d’agrément pendant la guerre. »

— Une Américaine à Paris dit que, dans tous les repas, dès que le nom de Clemenceau est prononcé, un grand silence tombe. On a peur de risquer un jugement. C’est la Terreur.

— Un docteur raconte les effets de l’ypérite : brûlures, conjonctivite, bronchites, inflammation des testicules. « Nous avons un gaz qui brûle encore plus », ajoute-t-il.

Il dépeint aussi le pillage par les soldats français des villages qu’ils abandonnent dans la retraite. « Ce n’est pas pour voler. Ils ne peuvent rien emporter. C’est une folie. Violer la maison vide, ouvrir les tiroirs, lire les lettres, s’amuser du linge, des