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ragée, toute propagande contre la guerre est réprimée. Après la presse, les affiches sont le plus clair exemple de cette oppressive injustice. « Les pères dont les fils ont été tués, etc. » peuvent afficher qu’il faut venger ces morts, continuer indéfiniment la guerre. Si d’autres de ces pères, au nom même de leur douleur, voulaient proclamer que c’en est assez de cette stupide boucherie, on lacérerait leurs affiches. Une Ligue peut afficher qu’il faut dénoncer les alarmistes, pessimistes, etc. Si une autre Ligue demandait la liberté des opinions, on lacérerait ses affiches. Des groupements couvrent la France d’affiches blanches pour réclamer le retour pur et simple de l’Alsace-Lorraine. Si d’autres groupements suggéraient la consultation des habitants, ou l’autonomie, on lacérerait leurs affiches.

— Un soldat est condamné à la prison pour avoir dit au front que ceux qui s’enrichissent dans la guerre veulent la continuer.

— Depuis le 15, il y a trois jours sans viande. Dans les restaurants seulement. Car sur toutes les tables bourgeoises on voit de la viande ces jours-là.

— On nous conseille de nous coucher tôt pour économiser le luminaire. Toujours la vie qui diminue.

— Alerte, le mardi 21 de 10 h. 45 à 1 h. 30. Je suis chez les Victor Margueritte avec les Jacques Richepin, les Weyler. Les hommes se couchent sur des coussins sur le tapis du salon et s’endorment. La nuit est splendide. Les bombes tombent à Versailles et Saint-Cyr.

— Le mercredi 22, alerte de 11 h. 30 à minuit 15, puis de 1 h. 30 à 3 h. 30, c’est-à-dire jusqu’à l’aube. Ciel d’orage et de lune. Tirs de barrage d’une violence nouvelle. Bombes sur la gare d’Austerlitz, Boulevard de l’Hôpital, École des Arts et Métiers, rue Legendre et à Juvisy.