Page:Envers de la guerre - tome 2-1916-1918.djvu/201

Cette page a été validée par deux contributeurs.

lini lui propose une entrevue avec le Kaiser, masqué sous le nom de Benoît. Caillaux a répondu qu’il ne voulait pas voir Benoît. On dit aussi que, pressenti sur sa mise en liberté provisoire, il aurait répondu : « Non, non. Par la grande porte ! »

— Gheusi, que je n’avais pas vu depuis un mois, me conte sa récente entrevue avec Poincaré. C’était peu avant la condamnation de Bolo. Gheusi représenta à Poincaré effaré que si Caillaux était innocenté par la Haute-Cour, il devenait le chef du parti de la Paix. Poincaré serait alors contraint de le prendre comme président du Conseil. Mais Poincaré se rassura. Caillaux serait condamné. Clemenceau le lui avait dit le matin même. À quoi Gheusi répliqua que Clemenceau prenait ses espoirs pour des réalités.

Gheusi fit un réquisitoire contre Humbert. Il rappela qu’on lisait à la tribune du Reichstag les articles : « Des canons, des munitions ! » et que l’Allemagne y puisait cette double notion que la France n’avait ni canons ni munitions et qu’il fallait faire en Allemagne encore plus de canons et plus de munitions. On stimulait du même coup le moral et les fabrications de guerre.

— Les restrictions gagnent, d’un mouvement insensible. L’usage de l’auto est presque interdit, sauf aux gens au pouvoir, aux militaires, aux fournisseurs de guerre et dames de la Croix-Rouge. Le matériel des chemins de fer se délabre : vitres brisées, portières qui refusent de s’ouvrir ou de se fermer ; sous couleur de raid aérien, on met les lumières du train en veilleuse à 20 lieues de Paris. Le pétrole a disparu en province ; on retourne à la chandelle.

— Le 23. Un nouveau journal se fonde, le Oui. Le principal bailleur de fonds est le directeur du Bazar de l’Hôtel de Ville. Le directeur politique est