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fidèle à Almereyda et Bolo après leur inculpation. N’y a-t-il pas quelque chose de généreux dans cette fidélité ? Quant aux conversations en Italie — second grief — elles sont rapportées par des attachés navals et militaires à Rome… Personnages hostiles à Caillaux, fatalement.

L’origine de l’impopularité de Caillaux, c’est l’impôt sur le revenu. Certes, c’est comique, quand on réfléchit que la guerre, acceptée, honorée par les privilégiés de la fortune, va faire passer l’ensemble de leurs impôts du simple au quintuple. L’impôt sur le revenu, qu’ils vont avoir par surcroît, les eût infiniment moins lésés. N’importe, la campagne réactionnaire contre Caillaux date du jour où il voulut cet impôt. Ajoutez la tractation d’Agadir, l’action de la presse, la fièvre obsidionale et ses visions « d’espionnite », le besoin d’expliquer le malheur par la trahison.

Les mobiles de Clemenceau ? La haine de son chauvinisme contre l’apôtre d’une paix raisonnable, la nécessité, pour l’homme au pouvoir, de tenir les engagements de l’homme de l’opposition. La croyance qu’il obéit à un mouvement d’opinion (qu’il concourut à créer par ses attaques.) Enfin, une chance de durer.

— Cette affaire Caillaux, la haine déchaînée contre lui — plus, il est vrai, chez les bourgeois petits et grands que chez l’ouvrier organisé — révèlent de nouvelles profondeurs de la bêtise humaine. C’est un sondage dans des abîmes inexplorés.

— Dubail proteste qu’il n’a pas signé son réquisitoire sans le lire. Il semble bien que ce soit surtout l’œuvre d’Ignace, le sous-secrétaire d’État à la justice militaire, qu’on surnomme Ignace de Loyola.

— Ô guerre, ne serviras-tu pas au moins à montrer l’ignoble injustice d’un état social où, sur mille hommes, un seul parle et mène les autres, qu’il