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pain du temps de paix. Cependant, son sort vacillait. Mais un incident se produit — que les journaux ne relèvent pas — pendant la discussion des ordres du jour et qui décide du vote. Le député Labroue demande à Painlevé s’il est vrai que le colonel Helbronner, secrétaire du Comité de guerre, est fils d’Allemands. Mouvement indigné de Painlevé : frère tué à l’ennemi, parents alsaciens-lorrains, assez de boue, etc. Cinq lignes à l’Officiel. Mais c’en fut assez pour changer la couleur des bulletins. Il est vrai qu’on dressait aussi, en épouvantail, le spectre du remplaçant possible : Clemenceau.

— Au restaurant, un convive poivre, citronne, gobe des Marennes et, entre deux dégustations, déclare à ses compagnons : « Ah ! C’est les Russes, qui ne vont pas. » Cela finit par sembler tout naturel. Mais, à la réflexion, c’est effroyable, ces gens qui nagent dans le bien-être, dans la sécurité, et qui, tout en gobant des huîtres, se plaignent sévèrement que les Russes ne se fassent pas tuer !

— Le 21. À minuit, Tristan m’apprend l’équipée des zeppelins qui, dérivés d’Angleterre, sont obligés d’atterrir ou sont abattus en France. On leur prête des buts mystérieux, l’attaque du Creusot, de Lyon, bien qu’ils n’eussent plus d’explosifs à bord. Tristan sourit des paisibles habitants de Sisteron, de leur angoisse, à l’idée que l’équipage d’un zeppelin s’est enfui dans les environs, qu’il y a des Allemands en liberté dans la région.

— Vainement on souffle à Ribot qu’il devrait bien s’en aller, que sa politique déplaît aux socialistes, que l’incident Briand l’a atteint… Il répond que, sur cette affaire, au dernier Comité secret, il eut une majorité plus forte que celle de Painlevé sur l’affaire Malvy.

— Le 21. Le ministère a démissionné. Poincaré