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— Le 25. Rencontre dans un couloir de wagon un ancien camarade, qui est général. Il est avec deux collègues. Conversation entre Fontainebleau et Paris. Ils traitent Joffre avec une espièglerie d’écoliers pour un vieux magister. Quant à la guerre, ils en parlent absolument comme de grandes manœuvres. On dirait vraiment que les morts se relèveront. Oui, des manœuvres, c’est cela. Ils me ramènent absolument aux indigentes conversations de mess, il y a 25 ans.

— Le 27. À propos des crédits du trimestre, le député Berthe propose de réduire les frais de représentation des voyages de Poincaré au front. Il a déploré le discours de Nancy. Sans être interrompu par Deschanel, et avec des approbations que signale l’Officiel, il a pu parler de ce costume « qui rappelait celui de l’officier de marine et du chauffeur d’automobile », il a pu maudire « cet homme qui, disait-il, a fait tant de mal à mon pays ». Signe des temps ! Mais cela passe inaperçu : la presse est asservie.

Brizon intervient aussi, évaluant à 1.900 milliards le coût actuel de la guerre pour l’ensemble des belligérants.

— Le 27. Le soir, bruit d’arrestations nouvelles. Et alors, ce sont des coups de téléphone de maison à maison, tout un réseau d’invisibles fils tendus, où l’on essaye de capturer la palpitante actualité. Mais on ne prend rien.

— Le 28. Il s’agissait la veille du président M… Il est traduit devant ses pairs pour imprudences professionnelles. Je crois qu’on lui reproche de s’être porté garant de Bolo-Pacha près de ceux à qui ledit Bolo voulait acheter des journaux. On me dit aussi qu’il avait rédigé lui-même le contrat entre Humbert et Bolo pour le prêt de 5 millions, et qu’il s’était réservé une place d’administrateur