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tivité le génie feroit des efforts, le commerce augmenteroit.

On a vû que les carrieres d’ardoise dans leur état actuel sont susceptibles de perfection; il reste à démontrer qu’en s’écartant de l’usage ordinaire elles peuvent devenir plus belles & plus avantageuses: on est bien convaincu par l’expérience que la matiere augmente en beauté & qualité, à proportion de la profondeur de la carriere, & l’on ne doute pas que les plus grandes dépenses qui se font pour son exploitation, consistent dans le transport & la fouille des cosses & matieres étrangeres jusqu’à la rencontre du franc-quartier, & ensuite dans l’enlevement de ce franc-quartier lui-même, des eaux pluviales, de celles de source & des vuidanges: je conclus de-là que plus on approfondira une carriere, plus on aura d’avantage en tout genre, si l’on parvient à des moyens plus simples d’extraction, puisqu’un des plus grands inconvéniens, qui est celui du déblai premier ne subsistera plus, & que l’autre diminuera en raison de la bonté de ces nouveaux moyens d’extraction.

Ce raisonnement conduit in sensiblement à désapprouver l’usage des machines ordinaires qu’on employe dans ces sortes de travaux; & ce n’est pas sans fondement, si l’on veut refléchir sur la dépense des moyens mis en usage, sur leur lenteur, sur le peu de travail qui en résulte, & sur leur défaut même de méchanique dans leur état actuel.

Recourons à l’expérience & nous reconnoîtrons que pour élever un seau de 150 piés de profondeur, un cheval emploie huit minutes, compris le tems de la charge & décharge, & qu’au-lieu de 1800 toises par heure qu’il devroit parcourir dans le travail le plus ordinaire, il n’en parcourt que 1056 & ne fait l’extraction que d’environ 80 piés cubes d’eau, ou dix muids par heure.

On laisse à juger du défaut de moyens, sans parler de l’inquiétude des ouvriers du bas pendant l’enlevement des matieres ou des vuidanges; que seroit-ce si comme on le propose, il étoit question de doubler la profondeur des carrieres? Je sais qu’on est persuadé qu’il n’est pas possible d’employer des moyens plus efficaces, mais pour détruire ce préjugé, il suffit de citer nombre de machines mises en usage pour des travaux de même nature, dont le succès & les avantages ne sont point douteux: le seul pays de Liege, le Haynault, le Brabant, les mines d’argent, de plomb, de cuivre, d’étain, & autres matieres précieuses situées en Alsace, en Allemagne, en Suede, en Danemarck, en Angleterre, qui possedent les mêmes richesses, sont remplies de modeles en ce genre qui ne laissent rien à desirer; on pourroit ici, à l’aide du calcul & de l’expérience, en faire quelque heureuse application; mais comme cette matiere mériteroit de faire l’objet d’un Mémoire séparé, on se restraint en ce moment aux preuves générales, & l’on croit suffisant pour remplir le but que l’on s’est proposé, d’assurer qu’il est des modeles de perfection dont on peut aisément faire usage. Consultez les auteurs, interrogez les voyageurs, sortez de votre province, parcourez vous-même les pays étrangers; que l’esprit de recherche, d’invention, de méchanique dirige vos pas & vos actions, l’on vous répond du succès; la révolution de l’empire des Russes, leur passage de l’ignorance la plus basse à la réunion des arts les plus parfaits dans Petersbourg, fut l’ouvrage d’un seul homme, & le miracle de quelques années.

Je passe à ce qui concerne les mines de charbon de terre.

Il ne s’agit pas de démontrer quelles richesses nous possedons dans les mines de charbons de terre qui traversent la province d’Anjou, elles sont d’autant plus précieuses que leur valeur augmente de jour en jour, par l’avantage qu’elles ont de suppléer le bois, dont l’espece devient de plus en plus rate, & les sages vues que paroît adopter le gouvernement en empêchant l’importation du charbon d’Angleterre en France, vues d’autant plus sages que l’on peut démontrer, d’après des Mémoires très-exacts, qu’un chauther de charbon de Neucastle, mesure de Londres, pesant 2300 livres, revient au propriétaire d’une mine à Londres, tous frais faits, à 13 schellins, monnoie d’Agleterre, ce qui fait 26 deniers & demi argent de France, pour un boisseau mesure d’Angers, qui se vend néanmoins à Londres 7 sols argent de France, & à Nantes au moins 12 sols; d’où il est évident que déduction de la différence du prix de Londres à celui de Nantes, estimée pour les frais de transport & droit d’entrée, le bénéfice du propriétaire Anglois est à Nantes de 7 sols pour chaque boisseau d’Angers. On laisse à conclure de-là combien il est intéressant pour cette province & pour l’état entier, de rompre une telle branche de commerce, déjà trop considérable, & dont nous pourrions aisément nous passer si nous travaillions nos mines avec l’économie & l’intelligence nécessaires, avantage essentiel dont jouit l’Angleterre, qui ne contribue pas peu à conserver à son charbon cette qualité supérieure jusqu’à ce jour au nôtre, dont nous sommes forcés de convenir. Nons avons donc encore à desirer en ce genre, & l’on ne craint point de le dire, nous sommes fort éloignés du degré de perfection dans l’exploitation & le travail des mines de charbon de terre.

Personne n’ignore que toutes les mines de charbon de terre ont une direction constante du levant au couchant, en s’approchant plus du nord, & dans le cas d’obliquité des veines une inclinaison du nord au midi, à-peu-près semblables à celles que nous avons reconnues dans les carrieres & bancs d’ardoises, mais qui varient à l’infini. Cette vérité se confirme par les mines situées en Anjou, puisqu’on peut remarquer sur la carte que tous les endroits où l’on en a ouvert, tels que Doue, Saint-Georges, Chatilaison, Chaudefonds, Saint-Aubin de Luigné, Châlonne, Montejean & Montrelais sont sur une même ligne, ont la direction générale du levant au couchant; on peut même pousser plus loin ses recherches, soit du côté de la Bretagne, soit du côté de l’Auvergne & du Bourbonnois, où l’on verra les principales mines, telles que celles de Saint-Ramber, Saint-Etienne, & autres, être exactement sur la même direction que celles d’Anjou; il sera encore facile d’y former des paralleles avec celles de Normandie & Franche Comté traversant la Bourgogne, ainsi qu’avec celles de Liege, d’Angleterre & d’Ecosse, malgré l’intervalle des mers.

Le travail ordinaire de ces mines se fait en ouvrant des puits jusqu’à ce qu’on rencontre une veine de charbon, autrement dite filon; il en est de trois sortes, le filon perpendiculaire, l’oblique, & l’horizontal.

L’horizontal est le plus avantageux, il est aussi le plus rare; c’est celui que dans le pays de Liege on appelle plateur ou grande veine, la matiere est dans tous les cas contenue entre deux bancs de pierre qui forment une chemise ou enveloppe que les ouvriers nomment le toit & le mur. Lorsqu’on est parvenu à rencontrer un de ces filons obliques ou perpendiculaires en perçant le puits, qu’on a soin de cuveler & fasciner à mesure qu’on travaille, pour empêcher l’éboulement des terres, on s’occupe alors à former des galeries suivant la direction du filon, pour en extraire la matiere; le travail du puits se continue toujours de la même maniere, & à mesure qu’on descend on forme de nouvelles galeries dans le filon; ces galeries sont construites avec des poteaux debout assemblés par des traverses haut & bas, dont les intervalles sont garnis de bois rond, & fascinages propres à contenir les terres.

Les plus grandes difficultés qu’on éprouve dans cette espece de travail, proviennent du défaut d’air & de l’abondance des eaux; on remédie au premier inconvénient en formant des puits paralleles au premier qu’on fait communiquer par des rameaux ou galeries, qui facilitent la circulation de l’air; on emploie encore avec succès les sacs de toile en forme d’entonnoirs à l’ouverture de ces galeries de communication, pour accélérer la vîtesse de l’air, & encore plus surement des fourneaux dans le bas des principaux puits, dont le feu étant entretenu par la matiere même dont on fait l’extraction, raréfie l’air que la colonne extérieure cherche à remplacer à l’avantage des galeries; ce moyen est très-sûr, & ce renouvellement continuel d’air est si nécessaire, que c’est à son seul défaut qu’on doit attribuer l’abandon de la plus grande partie des mines de