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sort spiral de son balancier peut-être vingt-cinq fois moins roide que ceux des balanciers ordinaires de même masse, il faut pour le faire partir au doigt vingt-cinq fois moins de force que pour les montres communes.

Quoique cette montre soit plus susceptible que les montres ordinaires, des inégalités causées par le froid & le chaud, & peut être aussi plus sujette à s'arrêter, on peut cependant conclure de l'exposé ci-dessus, que le sieur Romilly n'a négligé aucun des moyens nécessaires pour faire aller une montre aussi longtems qu'on peut le desirer sans la remonter, ce qui fournit de nouvelles preuves de son adresse dans l'exécution, & de l'habileté dans la théorie de l'Horlogerie. Signé, De Montigny & Camus».

Je certifie l'extrait ci-dessus conforme à son original & au jugement de l'académie, ce 11me jour de Mai 1758. Signé, Grandjean de Fouchy, secrétaire perpétuel de l'académie royale des Sciences.

L'on voit par ce rapport que l'académie approuve la théorie & l'exécution de cette montre. En effet, pour perfectionner les montres & les machines en genéral, l'on ne suit guere d'autre théorie que celle qui tend à diminuer les resistances pour réduire les forces qui les animent, par-conséquent diminuer les frottemens, & leur donner un peu plus de dureté.

Mais cette montre qui est faite pour aller une année avec un ressort ordinaire de vingt-quatre heures, a exigé tout ce que l'art a de plus subtil pour diviser cette force pour aller 378 jours; ensorte qu'il ne reste sur le dernier mobile de cette montre qu'une force infiniment petite.

Mais ayant donc diminué les causes méchaniques, & réduit toutes les resistances autant qu'il étoit possible & nécessaire, il est arrivé que les causes physiques du chaud & du froid ont eu d'autant plus d'accès sur elle pour la déranger, ce qui fait voir qu'il y a des bornes au-delà desquelles les frottemens étant pour-ainsi-dire échappés à la méchanique, sont diminués avec d'autant plus de force par les causes physiques. Comme j'ai fait plusieurs expériences avec cette montre, je ne crois pas inutile d'en rapporter une partie.

Étant reglée à la température du quatorzieme degré du thermometre de M. de Réaumur, elle a été avec une régularité surprenante: j'ai poussé la chaleur de cinq degrés en cinq degrés jusqu'au quarante-cinquieme, la montre a continué d'aller avec une précision au-dessus des meilleures montres ordinaires. En un mot j'ai répété des expériences en différens tems pendant des cinq à six heures de suite dans toutes les positions, à plat, pendue, & en mouvement; elle a toujours soutenu sa même régularité. Mais ce qu'il y a de fort singulier, c'est que lorsque j'ai diminué la chaleur du quatorzieme au douzieme degré, la montre a commencé à retarder huit à dix secondes par heure. Au dixieme degré elle retardoit quinze à vingt-cinq secondes; au huitieme de trente-cinq à soixante secondes; au sixieme de deux à trois minutes & demie; au quatrieme elle retardoit de six & huit minutes; & a zéro elle retardoit si considérablement qu'elle arrêtoit quelquefois au bout d'une demi-heure, & quelquefois plus tard. J'ai répété toutes ces expériences du froid; elles ont beaucoup varié: c'est-à-dire qu'au même degré de froid elle varioit ses retards en plus & en moins. Étant remise à la température du quatorzieme, ou du vingtieme, trentieme, &c. elle étoit deux à trois heures pour se regler; après quoi elle restoit reglée comme dans les premieres expériences.

Si l'on fait un raisonnement sur les effets que la chaleur doit produire sur les montres, l'on trouvera:

Que la chaleur ouvrant les pores doit permettre aux parties frottantes de se pénétrer davantage, par conséquent causer du retard. La chaleur qui dilate les métaux alonge les ressorts moteurs & réglans, ils deviennent plus foibles; autre cause de retard.

La dilatation grossit les pivots, grandit les roues & le balancier; autre cause de retard.

Le froid qui fait directement tout le contraire sur chacun de ces objets, devroit faire aussi un effet tout contraire, par-conséquent faire avancer la montre: il en est cependant arrivé tout autrement.

A quoi donc en rapporterons-nous la cause?

Au frottement seul. Il est certain qu'il en est l'unique cause; car ayant fait depuis une infinité d'expériences sur les frottemens, j'ai toujours trouvé que le froid augmentoit d'autant plus les résistances que les pressions étoient plus foibles; d'où je conclus que cette résistance se trouve augmentée en plus grande raison que toutes les causes contraires dont je viens de parler, & qui tendoient à la faire avancer. Ensorte que les montres doivent d'autant plus retarder par le froid, qu'elles sont faites pour aller plus longtems; que toutes choses d'ailleurs égales, celles qui vont avec le moins de force motrice sont aussi celles où le froid fait les plus grands effets: & au-contraire les montres qui vont avec beaucoup de force, bien-loin de retarder par le froid, avancent; il est vrai qu'il s'y mêle un peu de destruction qui concourt à les faire avancer.

Les montres ne sont pas seulement des machines pour mesurer le tems, elles servent encore d'ornement & de parure, font partie des bijoux, & sont une marque d'opulence. C'est la raison pour laquelle l'on enrichit les boîtes des montres par des gravures, peintures en émail, & diamants. L'on emploie aussi toutes sortes de cailloux pour les boîtes. En un mot tout ce qu'on emploie pour orner les bijoux, est employé pour les montres; & réciproquement l'on enrichit les bijoux en y plaçant des montres. J'ai fait des montres à répétition dans des bagues, bracelets, tabatieres, au bout d'un étui, d'une pomme de canne, sur une navette, dans une pelote. L'on fait aussi des montres de fantaisie, très-petites, très-plates. J'ai fait une répétition qui n'avoit de hauteur que trois lignes; elle étoit des plus plates qui se soient faites: & pour donner une idée de la délicatesse & de la précision qu'une telle montre exige, il suffira de dire que l'on y distingue trente-sept épaisseurs les unes sur les autres perpendiculairement, dont la plûpart ont leur jeu pour se mouvoir sans se frotter.

Si ces montres n'ont pas un avantage sur les montres d'un volume ordinaire, l'on peut dire que les horlogers qui les font & qui les font bien, acquierent une telle connoissance de précision & une délicatesse d'exécution, dont il n'appartient qu'à eux seuls de se former l'idée; car dans les ouvrages ordinaires il ne suffit pas de savoir qu'il faut une grande exactitude, il s'agit encore de la sentir.

Tout ce que l'horloger doit se proposer dans ces petits ouvrages, c'est de les faire incessables, de montrer l'heure à peu de choses près, de réduire leur composition autant qu'il est possible, en sacrifiant même quelque avantage utile aux grosses montres: & pour satisfaire à cet objet il faut encore du génie & de l'adresse.

Mais, dira-t-on, pourquoi donc faire des montres un sujet de fantaisie, de mode, ou de caprice? n'ont-elles pas assez de mérite par la nature de leur objet, celui de mesurer le tems? doit-on rien faire qui tende à altérer leur justesse?

Eh! pourquoi la nature ne souffre-t-elle pas deux choses égales, pourquoi faut-il de la variété dans tout? Au-moins il est très-certain que ceux qui sont en état de bien faire les petits ouvrages, le sont encore plus de faire les moyens.

Fig. 42. La platine des piliers vûe intérieurement ou du côté opposé au cadran.

43. La même platine vûe du côté sur lequel on place le cadran.

44. La petite platine vûe intérieurement; au-dessous sont les développemens de la potence.

45. La même petite platine vûe extérieurement ou du côté du coq qui recouvre le balancier; au-dessous sont les développemens de la coulisse & de la rosette.

46. La platine des piliers vûe intérieurement & garnie du barillet, de la fusée, des grandes & petites roues,