Page:Encyclopedie Planches volume 3.djvu/323

Cette page n’a pas encore été corrigée

L'Horlogerie peut être considérée comme étant la science des mouvemens; car c'est par elle que le tems, l'espace, & la vîtesse, sont exactement mesurés, & par-conséquent toutes les sciences qui ont rapport au mouvement lui sont en quelque sorte subordonnées.

Mais sans s'arrêter à cette dénomination générale, nous pouvons dire que l'objet principal & essentiel de l'Horlogerie est de diviser & subdiviser le tems en très-petites parties égales, & de les mesurer.

Que l'utilité d'une mesure de tems se manifeste dans toutes les sciences ou arts qui ont pour objet le mouvement; par exemple, dans l'Astronomie, pour annoncer le retour des astres sur l'horison, apprécier l'inégalité de leur course, & même perfectionner la Chronologie.

C'est pour cela que les Horlogers ont imaginé les spheres mouvantes qui représentent l'etat du ciel, où tous les astres se meuvent dans le rapport de leur vîtesse relative pour un grand nombre d'années. Voyez Sphere mouvante.

Dans la Navigation, pour mesurer la vîtesse du vaisseau, & déterminer sa route. Voyez Loch, & l'arucle Sillage.

Dans la Méchanique, pour distribuer à propos & avec économie la force, & le tems qu'elle emploie dans les machines pour produire les plus grands effets, voyez Méchanique, où l'on perd toujours en tems ce que l'on gagne en force.

C'est par le moyen d'une mesure du tems que l'on peut juger de l'intervalle toujours variable, qu'il y a du sommeil au réveil.

Enfin si l'on parvient jamais à trouver la mesure du tems sur mer comme sur terre, le fameux problème des long tudes sera résolu, & la Navigation, comme la Géographie, sera perfectionnée.

L'Horlogerie emploie diverses machines pour mesurer le tems; les plus connues sont les pendules & les montres.

L'on pourroit y comprendre bien d'autres machines qu'on a faites pour mesurer le tems par le moyen de l'eau, de l'air, du feu, & de la terre, &c. On peut voir sur cela le Traité des horloges élementaires de Dominique Martinelli Spolette, italien, imprimé à Venise en 1663, traduit en françois.

Mais comme tous ces moyens sont imparfaits, en comparaison de ceux qu'on emploie dans les pendules & dans les montres, on les a tous abandonnés, & par cette raison nous ne nous y arrêterons pas.

Nous nous bornerons seulement à dire tout simplement & en abrégé, ce que c'est que l'Horlogerie; ce qu'elle renferme d'essentiel; comment elle divise & mesure le tems; quelles sont les principales difficultés qu'elle trouve dans la pratique & dans la théorie; enfin quelles sont aussi celles qui lui échappent, & qui jusqu'à présent n'ont pû lui être assujetties.

Pour dire ce que c'est que l'Horlogerie, il faut commencer par ce qu'on y fait. Ainsi notre premier objet va être la pratique, qui consiste à forger, limer, tourner toutes sortes de matieres, à acquérir le coup-d'œil juste pour juger avec intelligence de toutes les formes qu'on est obligé de donner à de certaines pieces, dont la délicatesse ne sauroit être soumise à aucune mesure; ensorte qu'on ne doit entendre par bon praticien capable d'une bonne exécution, que celui qui peut joindre à un travail assidu des dispositions naturelles, comme une bonne vue, & un tact très-délicat.

Les mains, les outils, les instrumens, les machines, sont tous moyens différens que les Horlogers emploient dans leurs ouvrages. Les mains commencent, les outils aident, les instrumens perfectionnent, & les machines abregent le tems.

L'Horlogerie fait usage de tous les métaux. La premiere opération est de les forger pour les durcir: c'est ce que les Horlogers entendent par écrouir. Mais sans entrer dans le détail de ce que c'est que l'enclume & le marteau, je dirai que pour bien faire cette opération, il faut que la force des coups soit d'autant plus grande, que la matiere est plus molie & susceptible d'extension, & frapper les coups de marteau sur la piece, du centre à la circonférence, en diminuant la force des coups.

L'usage & l'expérience du marteau donnent le sentiment qu'il faut avoir en tenant la piece à forger d'une main & le marteau de l'autre; il faut, dis-je, que le sentiment des deux mains concoure à faire ensorte que chaque coup de marteau corresponde au point de contact; & à sentir que toutes les parties soient également durcies, également tendues, & dans le même plan.

L'or est de tous les métaux celui qui est le plus susceptible d'extension, néanmoins il peut se durcir & acquerir beaucoup d'élasticité; après lui l'argent, le cuivre, & l'étain. Le plomb ne m'a jamais paru se durcir au marteau, quelque précaution que j'aye pû prendre, & s'il montre quelque signe d'élasticité, c'est plutôt au sortir de la fonte qu'après avoir été forgé.

L'Horlogerie n'emploie que peu de matieres pures. Le cuivre jaune qu'elle emploie ordinairement est un mélange de cuivre rouge avec la calamine fondus ensemble, nommé laiton.

L'or, l'argent, sont aussi alliés avec du cuivre, ce qui procure à tous les métaux une qualité plus aisée pour les travailler: c'est par ce mélange que la matiere devient plus seche & moins grasse; ce qui fait qu'elle se durcit plutôt au marteau, qu'elle se lime, perce, & coupe mieux.

Le mercure n'étant point malléable, l'on ne s'en sert que pour dorer les ouvrages en en formant un amalgame avec de l'or pur.

Le fer, cette noble & précieuse matiere, sans laquelle l'on ne tireroit point d'utilité d'aucune autre, est la base par laquelle tous les arts exercent leur empire.

Tous les arts en font usage, & l'Horlogerie en particulier ne sauroit s'en passer. Aussi peut-on dire que cet art a plus contribué à perfectionner ce métal qu'aucun autre, par la précision, la dureté, la délicatesse qu'elle exige dans la plûpart de ses parties.

L'on ne fait guere usage du fer pur que pour les grosses horloges; mais pour l'horlogerie moyenne & en petit, il faut qu'il soit converti en acier. Il faut même pour cette derniere qu'il soit le plus parfait, sans quoi il est impossible de faire une bonne montre.

Le fer converti en acier est très-différent des autres métaux; car ayant la qualité commune de se durcir au marteau, il en a de plus une admirable & particuliere, celle de se durcir très-promptement par le moyen du feu: car si l'on fait chauffer vivement un morceau d'acier jusqu'à ce qu'il devienne d'un rouge couleur de charbon ailumé, qu'on le retire, & qu'on le plonge subitement dans l'eau froide (alors c'est ce que l'on appelle de l'acier trempé); dans cet état il est si dur qu'il n'est plus possible de lui faire supporter le marteau; il se casseroit & se briseroit comme du verre.

Mais comme l'on a besoin de travailler l'acier après qu'il est trempé, on en diminue la dureté par le moyen suivant.

On le blanchit en le frottant de pierre ponce, ou de telle autre capable de lui ôter la croute noire que la trempe lui a donnée. Ensuite on le met sur un feu doux, & à mesure que l'acier s'échauffe, il passe successivement d'une couleur à une autre dans l'ordre suivant: un jaune paille jusqu'à un plus foncé, rouge, violet, bleu, couleur d'eau ou verdâtre, jusqu'à grisâtre ou blanchâtre, après quoi l'on ne remarque plus rien dans sa couleur, qui reste sensiblement la même.

Faire passer son acier par ces différentes couleurs que le feu lui donne, c'est ce qu'on appelle revenir ou donner du recuit; ainsi jaune, rouge, violet, &c. sont des degrés de ramollissement plus ou moins grands, selon qu'on le desire, & suivant les effets auxquels on le destine.

On appelle avoir trop fait revenir son acier, lorsqu'on le laisse passer de la couleur où on le souhaite à une des suivantes; & lorsque la chaleur est assez grande pour lui faire passer toutes ses couleurs & reprendre celle de charbon allumé; si on le laisse refroidir, c'est ce qu'on appelle alors de l'acier récuit ou détrempé.

Il y a plusieurs sortes d'acier qui different à la trempe. Les uns deviennent plus durs que d'autres par le même degré de chaleur; de même aussi lorsqu'on veut leur donner du recuit ou ramollissement, il arrive que les uns le sont plus à la couleur jaune, que d'autres à la