Page:Encyclopedie Planches volume 2b.djvu/27

Cette page n’a pas encore été corrigée

vir alternativement: un jour de repos leur donne une ardeur nouvelle & met les veneurs en état de chasser avec plus de satisfaction.

De la quête du loup.

On fait la quête du loup différemment, selon la différence des saisons: si c’est en hiver, il faut aller au bois quelque tems avant le lever du soleil, parce que c’est à-peu-près dans ces tems là que les loups y rentrent: en été l’on n’a pas besoin d’y aller de si bonne heure, parce que ces animaux s’arrêtent souvent dans les blés, & ne reviennent au bois que vers le haut du jour; c’est pourquoi sans trop se presser il suffit de faire deux fois les devans du bord des buissons du côté des blés, & si l’on n’en rencontre point, il sera bon en s’en retournant de prendre les devans du côté du bois qui est vis-à-vis des blés.

Il y a bien de la différence entre la quête du loup & celle du cerf. Celui-ci demeure long-tems dans les buissons, quelquefois même il n’en sort point pour faire sa nuit dans les gagnages; mais le loup fait tout le contraire, la faim (comme on dit) le chasse hors du bois, & comme il ne vit que de carnage il s’approche souvent des fermes, des villages & même des villes, & il se jette sur ce qu’il rencontre. Si par hasard il s’arrête long-tems dans un buisson sans en sortir même pendant la nuit, ce n’est que lorsqu’il a attrapé quelque bête fauve qu’il s’occupe à dévorer.

Lors donc que le veneur sera arrivé au bord de sa quête avec son limier, il tiendra le trait déployé tout prêt, & fera aller son chien devant lui plus d’une demi-longueur de trait, toujours en le caressant & en disant, va outre ribaut hau mon valet; hau lo lo lo lo, veleci, veleci aller mon petit. Il est bon de répéter souvent ces termes, parce que rien n’anime plus le chien & ne l’encourage mieux à suivre. Il faut bien prendre garde que le limier ne suralle quelque loup qui seroit rentré dans le buisson par quelque coulée, ou par de grands chemins sur l’herbe, & lorsqu’on remarque que le chien fait mine de se rabattre, & qu’il met le nez ou à des branches, ou à des touffes d’herbe, on aura soin de le r’animer; parce que les chiens naturellement n’ont pas beaucoup d’ardeur pour le loup, & ils en rabattent toujours assez froidement: d’ailleurs le sentiment du loup ne dure qu’environ deux ou trois heures, & pour venir à bout de le détourner, il ne faut pas qu’il aille plus de deux heures: autrement les limiers ont de la peine à emporter les voies, surtout si c’est dans un chemin frayé; car lorsqu’il fait route sur l’herbe, ou à-travers des bruyeres, il laisse plus de sentiment après lui, parce qu’il touche alors du corps & des jambes à ce qu’il rencontre, ce qui aide les limiers à la poursuite.

Lorsque le veneur s’apperçoit que son chien se rabat d’un loup, il doit lui parler en ces termes: qu’est-ce là mon valet, hau l’ami après, veleci il dit vrai, & il les répétera souvent pour animer le limier qu’il suivra toujours, soit au long du chemin, soit dans le faux-fuyant; on ne sauroit faire trop de diligence dans cette occasion; parce qu’il est toujours à craindre que les voies ne vieillissent & que le limier ne les abandonne au premier carrefour où le loup auroit donné. Il est à observer que lorsque le loup passe un carrefour, il s’y arrête toujours quelque tems, soit pour y fianter, soit pour y pisser contre quelques genets ou quelques souches d’herbe: aussi-tôt après il se déchausse, c’est-à-dire, il gratte la terre & en enleve la superficie de la largeur de quatre piés en grattant avec ses ongles en

arriere sur l’herbe; ensuite il reprend le chemin & perce quelquefois bien loin; quelquefois aussi il cherche à ruser; & au lieu de suivre le chemin, il en reprend un autre & tourne du côté du fort pour y rentrer. Il saisit pour cela le premier faux-fuyant qu’il rencontre, ou quelque coulée favorable, ce qui arrive principalement lorsque la terre est mouillée, c’est alors que le veneur doit avoir soin de dresser le chien sur les voies, environ d’une demi-longueur de trait, & de bien caresser son limier pour l’animer toujours de plus en plus; s’il est encore matin, il pourra briser les voies à petit bruit & se retirer secretement pour prendre de grands devans. Il faut observer que pendant ce tems-là le chien ne suralle point le loup, soit par quelque faux fuyant, soit par des clairieres par où il auroit percé jusqu’au fort; car les loups ont différentes allures, selon qu’ils sont plus ou moins affamés. Lorsque la faim les tient, ils sont sur pié presque sans cesse & vont toujours en avant jusqu’à ce qu’ils ayent trouvé à manger; mais quand ils sont rassasiés, ils se retirent souvent dans le premier fort qu’ils rencontrent, pourvû qu’ils y trouvent de quoi faire leur demeure, comme des houx, des fougeres ou d’autres grandes herbes.

Si le veneur est au bois un jour de chasse, il se contentera de s’assurer que le loup est entré dans le fort, il cherchera à découvrir la petite avenue, ou la clairiere par laquelle il peut être entré, il caressera bien son limier, le brisera ensuite à l’entrée du fort, & prendra les devans; après qu’il se sera bien assuré d’avoir détourné le loup, il se retirera à l’assemblée pour y faire son rapport; mais si le veneur n’avoit d’autre dessein que d’exercer son chien, ou s’il y avoit long-tems qu’il n’eût lancé le loup, il pourroit aussi-tôt qu’il l’a détourné revenir aux brisées prendre les voies, puis pousser & lancer le loup & suivre les voies jusqu’au liteau en caressant son limier, & en lui parlant toujours dans les termes rapportés ci-dessus. Si le limier est jeune, on s’appercevra que son ardeur se rallentira aux approches du liteau, parce que le sentiment du loup inspire naturellement de la crainte aux chiens, & il y en a très-peu qui osent d’eux-mêmes se mettre à le suivre; mais c’est alors qu’il faut lui parler beaucoup pour l’animer, l’enhardir & le faire suivre, & lui faire bien des caresses sur les voies. Pour ce qui est du liteau, il faut savoir que les loups en changent suivant les différentes saisons; par exemple en été ils se mettent dans une place découverte sur de grandes herbes où le soleil donne un peu; mais si c’est en hiver dans un tems un peu rude, ils se retirent dans les plus grands forts & dans des bois épais sur des bruyeres ou sur des fougeres. Il est rare qu’ils se mettent sous des futaies, à moins qu’il ne s’y trouve de gros buissons ou des fougeres très-épaisses.

A quoi on peut reconnoître que le limier rabat du loup.

Il est très-difficile de revoir la piste du loup, à cause de sa grande légéreté; à peine laisse-t-il après lui de traces de ses allures, excepté en hiver dans le tems de la gelée blanche, & en été lorsqu’il y a beaucoup de poussiere. Dans tous les autres lieux on va pour ainsi dire au hasard, & à moins que d’être depuis long-tems exercé à la chasse, on fait souvent bien des pas inutiles: il est cependant des indices par le moyen desquels on peut découvrir où tendent les mouvemens du limier, & par conséquent discerner si c’est un loup ou un autre animal dont le chien veut se rabattre; ainsi en observant bien la façon de faire de son limier, on remarquera que si c’est d’un loup qu’il se rabat, il ne manquera pas d’aller sentir les branches ou les herbes que le loup