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A.


ABSENS. C’est à la séance du lundi 4 janvier 1790, que l’assemblée s’est occupée pour la première fois des absens. Le quatrième article d’un projet de décret sur les pensions, présenté par M. le Camus, portoit « qu’il ne seroit payé, même provisoirement, aucunes pensions, dons, gratifications, aux françois habituellement domiciliés dans le royaume & actuellement, absens, sans mission expresse du gouvernement antérieur à ce jour ». Plusieurs membres ont parlé contre cette disposition, que les-uns regardoient comme un attentat à la liberté individuelle, les autres comme une précaution rigoureuse, mais nécessaire, pour alléger les charges du trésor & empêcher l’exportation du numéraire.

M. le marquis de Foucault. Je demande la question préalable sur cet article ; il attaque les droits qu’a tout homme de jouir des récompenses qui lui ont été accordées, par-tout où ses besoins, ou ses affaires l’appellent. Lorsqu’on accorde une pension, on n’y met point pour condition qu’on la perdra, lorsque des circonstances particulières forcent celui qui l’a méritée à quitter le royaume ; il n’est point au pouvoir de l’assemblée de mettre des clauses dirimantes à des engagemens, pris par le gouvernement envers des personnes qui l’ont servi avec zèle & assiduité. L’absence n’est point un délit ; vous ne pouvez traiter plus sévèrement les absens que les autres pensionnés de l’état sans une grande injustice, & par conséquent une violation des droits que vous êtes jaloux de faire respecter.

M. le président met aux voix la question préalable ; MM. de Fumel, de Mirepoix, de Foucault et-Bouchotte assurent que la décision de l’assemblée est douteuse, ils demandent l’appel nominal ; l’on n’en passe pas moins à la discussion ultérieure de l’article.

M. Bouchotte. Tous les droits de l’homme sont violés par votre projet de décret ; une pension est une propriété puisqu’on l’a acquise par des services réels, par un travail de plusieurs années ; l’on a donc le droit d’en consommer le produit par-tout où l’on pourroit dépenser son revenu territorial, & je ne pense pas que vous veuilliez mépriser les principes à ce point de regarder les absens comme-déchus du droit de propriété, comme spoliés de leurs biens par le seul fait de l’absence.

M. de Menou. C’est à tort que les préopinans invoquent les droits de l’homme contre le décret proposé ; ce n’est point attaquer la liberté que de mettre des conditions aux dépenses du trésor public ; nous n’empêchons personne d’aller & venir, & où il lui plaît, mais nous devons à la nation dont nous sommes les représentans, d’empêcher l’abus des grâces & des récompenses publiques ; nous pouvons mettre des conditions aux traitemens que le trésor public, fait à des hommes qui non-seulement ne rendent aucun service à l’ètat, mais même dépensent dans l’étranger un revenu, que l’utilité publique demande qu’ils emploient à l’avantage de nos manufactures & à l’encouragement de l’industrie par leurs consommations.

Plusieurs membres rappellent qu’on discute un sujet sur lequel on a demandé la question préalable, et qu’il y a eu du doute dans la décision de l’assemblée sur la question préalable : on demande de nouveau de mettre aux voix la question préalable ; l’épreuve donne le même résulitat, la question préalable est rejettée ; quelques membres demandent l’appel nominal.

M. Duport. Je propose de substituer au mot pension, ceux-ci, traitemens & appointemens attribués à des fonctions publiques. M. Gleizen. Je propose d’ajouter l’amendement de M. Duport au mot pension, & non point de l’y substituer ; s’il est juste que les pensionnaires de l’état dépensent leurs revenus en France, il est encore plus indispensable que des fonctionnaires publics ne touchent point de traitement à une distance qui ne leur permet pas de remplir leurs devoirs.

M. le président se prépare à mettre ; en délibération l’amendement de M. Duport ; MM. Bouchotte & Foucault réclament l’appel nominal, quelques autres demandent l’ajournement ; le président a peine à se faire entendre ; il y parvient.

M. le président. Je dois suivre les décrets de l’assemblée, elle a d’abord décidé que la délibération seroit continuée sans remise, ensuite qu’elle délibéreroit quant à présent.

MM. de Foucault, de Mirepoix, l’évêque de Perpignan, Bouchottë &ç. réclament contre cette manière de présenter la question ; il s’élève beaueoup de rumeur ; le président consulte l’assemblée, elle décide que la manière dont M. le président a posé la question est exacte.

M. de Foucault. En demandant la continuation