610 ARG
l’hiver, dans les serres, & l’été dans les jardins
parmi les autres plantes exotiques.
5. Argan soyeux. Dans la Caroline, où cet arbrisseau croît naturellement, il s’élève de vingt pieds de haut. Il pousse de sa racine plusieurs branches longues, & droites, qui se divisent en plusieurs rameaux, lesquels donnent naissance à un grand nombre de feuilles ovales, d’un verd luisant en dessus, & couvertes en dessous d’un duvet soyeux, blanc & luisant. Ce duvet, qui dans la jeunesse des feuilles, est argenté, devient roussâtre à mesure qu’elles vieillissent, & finit par être doré, ce qui produit un effet aussi agréable que rare. Ses fleurs sont très-petites, & en très-grand nombre ; elles sont rassemblées par petits bouquets dans les aisselles des feuilles. Jusqu’à présent elles n’ont point encore donné de fruit en france.
Culture. Il y a trop peu de tems que nous possédons
cette espèce, pour que nous puissions
donner des détails bien étendus sur sa culture.
Tout ce que nous pouvons dire, c’est qu’ayant
reçu d’Angleterre un individu très-jeune qui nous
fut donné sous le nom d’un arbre de la Zone torride,
nous le traitâmes, en raison de cette dénomination,
comme les arbres de ce pays, c’est-à-dire, qu’il
fût placé pendant l’été sur une couche tiède, &
rentré à l’automne dans une serre chaude, &
mis dans la tannée. Il passa ce premier hiver
en pleine végétation ; une partie de ses feuilles
tombèrent, mais elles furent remplacées sur-le-champ
par de nouvelles. Ces jeunes feuilles d’une
part, & de l’autre la délicatesse des pousses
qui s’étiolèrent bientôt, attirèrent une multitude de
pucerons, & de gâles insectes qui manquèrent de
faire périr cet arbrisseau. Au printems, la végétation
qui avoit été trop forcée pendant l’hiver, s’arrêta ;
il resta languissant pendant l’été, & ce ne fut
qu’à l’automne qu’il se rétablit parfaitement ;
comme la chaleur de la tannée l’avoit incommodé
l’année précédente, on lui fit passer le
second hiver sur les tablettes de la même serre,
près des croisées. Il s’en trouva mieux ; cependant
ses pousses s’étiolèrent encore, preuve certaine
qu’il étoit dans un endroit encore trop
chaud. Nous le plaçâmes le troisième hiver, sur
les gradins d’une serre tempérée, & il fut beaucoup
plus vigoureux. Depuis ce tems là, nous
le tenons à l’orangerie, où il se conserve très-bien ;
Il perd une partie de ses feuilles, mais son bois
est clair & bien aoûté ; actuellement que nous savons
que cet arbrisseau croît en Caroline dans les lieux
secs, nous ne doutons pas qu’il ne puisse résister
en pleine terre à nos hivers, en le couvrant pendant
les fortes gelées, comme on est obligé de le
faire pour une partie des productions de ce climat.
C’est la première expérience que nous tenterons
lorsque nous aurons un second individu
de cet arbre.
ARG
Quant à sa mutiplication, cette espèce paroit avoir des dispositions à pousser des drageons de sa racine, ce qui fournira un moyen plus sûr que celui des boutures, qui ne nous a pas encore réussi ; la voie des greffes ne sera guères praticable, que lorsque l’Argan à feuilles de saule, sera assez multiplié pour le faire servir de sujet à cette espèce, ce qui paroît encore un peu éloigné.
Usage. En attendant que cet arbrisseau soit assez acclimaté chez nous, pour croître en pleine terre, on peut s’en servir pour jeter de la yariété dans les orangeries ; il conserve assez de feuilles pendant l’hiver pour produire de l’agrément. Mais lorsqu’on pourra le faire entrer dans la composition des bosquets, son feuillage argenté ou doré, suivant les saisons, fournira une nouvelle ressource pour varier les masses.
6. L’Argan à feuilles de saule est un arbrisseau laiteux, de quinze à vingt pieds de haut, très-branchu, & garni d’épines assez fortes ; ses feuilles sont longues, étroites, d’une verdure pâle, & tombent chaque année à la fin de l’automne. Ses fleurs sont petites, de couleur herbacée, & réunies par paquets dans les aisselles des feuilles ; elles donnent très-rarement des graines dans notre climat ; en général, cet arbrisseau est plus rare qu’il n’est agréable.
Culture. Cette espèce est la plus anciennement cultivée dans nos jardins. Pendant long-tems on l’a mise dans des pots ou dans des caisses que l’on rentrait tous les hivers dans l’orangerie, mais on a reconnu qu’elle pouvoit vivre en pleine terre, placée au pied d’un mur, à l’exposition du midi, & couverte de paille pendant les gelées. Nous l’avons même conservée en pleine terre, dans un lieu isolé, plusieurs années de suite, sans autre précaution que de couvrir ses racines. Mais elle ne put résister aux gelées de 1776, qui la firent périr entièrement. On multiplie cet arbrisseau de semences, de marcottes, & quelquefois de boutures. Les semences doivent être mises en terre, peu de tems après leur maturité, ou au plus tard au printems suivant. Passé ce tems, il est rare qu’elles lèvent ; on les sème dans des terrines remplies d’une terre sablonneuse & meuble ; elles n’ont besoin d’être recouvertes que de quatre à cinq lignes. Ces terrines doivent être placées sur une couche tiède à l’exposition du levant ; il convient d’arroser fréquemment les semis jusqu’à ce que les graines soient levées, & très-souvent elles ne lèvent que la seconde année, particulièrement celles qui ont été semées au printems. On ne risque rien de laisser les semis en plein air, tant qu’ils ne sont pas levés ; mais aussi-tôt qu’ils sont sortis de terre, il est très-à propos de les rentrer à l’orangerie, & de les placer sur les