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DISCOURS


feroit passer aux autres sociétés les objets qu’elle se procureroit plus aisément, soit graines, soit instrumens, soit instructions; de manière cependant que dans tous ses rapports avec elles, elle ne s’arrogeât pas un titre de prééminence, qui perdroit tout.

S’il est un plan de sociétés d’agriculture, qui soit propre à l’avancement de cet art, c’est celui qui vient d’être exposé, parce qu’il est fondé sur la connoissance de la manière, dont les gens de la campagne se laissent instruire. Je passe à des moyens d’un autre genre.

Les terres en France sont cultivées ou par des propriétaires ou par des locataires. Parmi les premiers, les uns possèdent en toute propriété, par suite d’héritage ou d’acquêts, sans être tenus à aucune redevance. Les autres jouissent à la charge d’une rente ou d’un cens, parce que leurs pères n’ont ni hérité, ni acquis, mais se sont engagés a reconnoître Une concession moyennant une taxe convenue. Ceux-ci ne font valoir que peu de terres ; ceux-là ont de grandes exploitations.

Les locataires se divisent en fermiers de en métayers ; les fermiers paient les propriétaires en argent, & les métayers en denrées; ordinairement ces derniers donnent la moitié du produits. Quelquefois on paie une partie en argent & une autre en denrées. Il y a encore des propriétaires qui distraïent de leurs fermes ou métairies une certaine quantité d’arpens de terre pour les louer à des particuliers à prix d’argent ou de denrées. Les propriétaires qui cultivent eux-mêmes sont de pauvres gentilshommes ou des bourgeois retirés à la campagne dans leurs domaines ; les autres sont dans la classe des paysans. On ne voit point d’hommes riches se livrer à l’exploitation des terres, comme on assure qu’il y en a dans plusieurs cantons de l’Angleterre. Il résulte delà, qu’on ne peut jamais aller que pas à pas. Le cultivateur françois se presse de semer des grains pour récolter, se nourrir & vendre, tandis que s’il étoit plus fortuné, il sacrifieroit les premières années à des cultures de diverse nature, qui lui procureroient des engrais abondans en fournissant la nourriture à beaucoup de bétail. Le fermier, en supposant qu’il soit en état de faire quelques tentatives, est retenu par la brièveté de son bail, dans la crainte qu’un autre ne jouisse de ses améliorations. Ce n’est qu’à regret que le métayer voit la moitié du produit de ses champs, le fruit de ses peines, passer dans les mains d’un propriétaire, qui recueille où il n’a pas semé. Il s’enfuit que l’agriculture auroit une marche plus rapide, si les gens riches, attirés par le luxe & les plaisirs dans les villes, & sur-tout dans la capitale, ne préféroient une vie oisive & volupteuse à une profession utile, qui exige de l’activité & de la tempérance, si les baux des fermes avoient un terme beaucoup plus long que neuf ans, si par-tout le royaume il y avoit des débouchés pour les denrées, ce qui éteindroit les métairies,