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leurs gâteaux. Elles se réunissent plusieurs pour les fardeaux trop pesans.

Les abeilles d’un nouvel essaim commencent par enduire leur ruche avec du propolis. Elles forment ensuite, à sa partie supérieure, une forte attache, & travaillent à un premier gâteau qu’elles placent perpendiculairement. Bientôt elles en font un second & un troisième, qui sont parallèles, ne laissant entr’eux que le passage de deux abeilles de front. Ces gâteaux sont percés en plusieurs endroits, vraisemblablement pour multiplier les routes & épargner du chemin. Ils sont aussi attachés latéralement les uns aux autres & aux parois de la ruche. Sans cette précaution, quand ils sont remplis de miel, ils tomberoient. C’est à cause de cette observation qu’on dispose, dans la partie supérieure des ruches, des bâtons en croix, capables de servir de support aux gâteaux ou rayons. Il paroît que « l’abeille rend par la bouche la cire dont elle forme son ouvrage. Ce n’est alors qu’une liqueur mousseuse, & quelquefois une espèce de bouillie, qu’elle pose avec sa langue & qu’elle façonne avec ses dents. Elle prend peu-à-peu de la consistance, & devient une cire parfaitement blanche ; car les gâteaux nouvellement faits sont blancs. S’ils jaunissent, s’ils deviennent même bruns & noirs, c’est parce qu’ils sont exposés à des vapeurs, qui changent leur couleur naturelle. » Les abeilles ne mettent en œuvre que la cire qu’elles ont elles-mêmes recueillie ; car si on leur présente des rayons, elles les brisent pour en extraire le miel, & laissent la cire sans y toucher, peut-être parce qu’elle est sèche & qu’elles ne peuvent en faire usage que quand elle est liquide. On prétend que les abeilles, qui ébauchent le travail, ne sont pas celles qui le perfectionnent, & que chacune a son emploi particulier ; mais c’est encore une de ces assertions douteuses.

Les gâteaux sont composés d’alvéoles, ou de tuyaux à six pans, posés sur une base pyramidale. On trouve des détails sur ces alvéoles, dans les mémoires de l’académie des sciences, année 1712, & dans les mémoires pour servir à l’histoire des insectes, par M. de Réaumur. Je ne crois pas devoir les rapporter ici, parce qu’ils sont trop étendus, & plus curieux qu’intéressans, ce qui, d’ailleurs, m’écarteroit de mon objet principal.

On assure qu’une abeille, à son retour des champs, choisit un alvéole, dans lequel elle verse le miel contenu dans son estomac à l’aide d’un mouvement de contraction de cet organe. Lorsqu’il y a dans la ruche plus d’un rang de gâteaux, ce sont ceux de la partie supérieure qui se remplissent les premiers. Une abeille ne suffit pas pour apporter seule ce qu’un alvéole peut contenir ; plusieurs y déposent leur miel. La dernière couche est toujours plus épaisse que les autres ; on croit que les abeilles la soulèvent, pour y glisser par-dessous ce qu’elles veulent y mettre. Il y a des alvéoles même fermés par un couvercle de cire ; afin que le miel ne coule pas & ne s’évapore pas.

Les alvéoles, qui ne renferment pas du miel, sont occupés par le couvain. On donne ce nom aux rudimens des abeilles qui se trouvent dans trois états différens ; dans celui d’œuf, ou dans celui de ver, ou dans celui de nymphe. J’ai exposé ce qui concerne ces métamorphoses, en parlant de la ponte de la reine ; j’ajouterai seulement que, depuis le printems jusqu’à l’hiver, il se forme du couvain, en sorte que les abeilles ouvrières, pendant tout ce tems, se livrent aux soins qu’il exige. Ils consistent à nourrir les petits vers avec des alimens convenables à leur foiblesse ; à couvrir de cire l’entrée des alvéoles, dont les vers sont prêts à se changer en nymphes, & à nettoyer & essuyer les abeilles nouvellement nées.

Ce seroit ici le lieu, sans doute, de rappeller ce qu’on avancé sur l’intelligence, la prévoyance & la police des abeilles. Les rapports que les hommes ont de tout tems avec ces insectes, les avantages qu’ils en tirent, les occasions fréquentes, qu’ils ont de les voir, enfin, l’imagination des poètes, sont la cause de l’espèce d’enthousiasme qui s’est emparé des esprits & des exagérations qu’on a faites de leur industrie. On s’est moins occupé des autres animaux, parce que le fruit de leurs travaux, n’étoit pas de nature à servir autant aux hommes. Je conviens qu’en examinant la structure des gâteaux des abeilles, l’art avec lequel elles emploient la cire, & arrangent le miel dans les cellules qu’elles pratiquent, l’ordre qui règne dans leurs travaux, le soin qu’elles prennent de ce qui doit former leur postérité, & de leurs habitations, on ne peut se refuser à les admirer, & à les croire pourvues, en quelque sorte, dune intelligence particulière qui les guide, & à la faveur de laquelle elles dirigent, d’une manière peu commune, leurs travaux vers un but déterminé. Mais cette intelligence est bornée, puisque les abeilles agissent toujours uniformément, à moins que des obstacles ne les forcent à changer, ou plutôt à modifier seulement leur manière d’agir. Tous les ans, au printems, elles vont chercher la cire, pour en former des gâteaux ; quand la saison en est arrivée, elles recueillent sur les fleurs le miel qui doit faire leur nourriture. L’intérieur de leurs ruches, ou les creux d’arbres ou de murailles où elles se logent, sont toujours disposés une année comme l’autre ; qui les a bien étudiés une fois, les connoît à jamais ; pour peu que l’on soit attentif, on est assuré de ne rien perdre de ce quelles ramassent ; on les trompe sans cesse ; on leur prend ce qui leur appartient, sans qu’elles cherchent à cacher leurs provisions. Tout cela ne suppose pas cette prévoyance qu’on leur a accordée, ou du moins elle est bien foible. On s’est beaucoup étendu sur la police gue l’on a cru établie dans une ruche. On a assuré que la mère-abeille y