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plutôt diminuer l’espace, & tenir la ruche baissée ; la gêne & la chaleur feroient partir l’essaim.

Plusieurs observateurs ont proposé des moyens de former des essaims artificiels, ou plutôt de hâter la formation des essaims naturels. Le premier est M. Schirach, pasteur à Klein-Bautzen, & Secrétaire de la société économique pour le soin des abeilles dans la haute Lusace. Son procédé consiste à prendre au premier mai, dans différentes ruches, des gâteaux garnis de couvain, d’autres remplis de miel, d’autres seulement formés de cire, de les entremêler en les attachant aux chevilles d’un râteau placé dans une boîte, qui est la ruche adoptée par M. Schirach, de couvrir le râteau d’un morceau de gâteau, dans lequel soient trois sortes de couvain ; c’est-à-dire, des œufs, des vers plus ou moins avancés & des nymphes. S’il n’y a pas assez d’abeilles dans les gâteaux, on en ajoute 3 ou 400 ; on ferme exactement la boîte, qu’on place dans une chambre d’une chaleur tempérée ; on a soin de mettre du miel dans un tiroir pratiqué à la boîte, afin de nourrir les abeilles. On les retient ainsi, presque sans les laisser sortir, pendant quinze jours ; au bout de ce tems la reine est née & l’essaim est formé. Il ne s’agit plus que de le faire passer dans une ruche commode ; ceci se concevra encore mieux quand j’aurai parlé des ruches de M. Schirach.

Le même observateur a trouvé une méthode plus simple de former des essaims. A la fin de février, il transporte dans un endroit bien exposé, ou sous un toit, des ruches dont il ôte une partie des gâteaux ; quinze jours ou trois semaines après, si les abeilles ont réparé leur perte, il choisit des ruches vides, semblables, autant qu’il est possible, à celles dont il désire avoir les essaims ; il les approche à une heure après midi, tems où les abeilles sont en course ; il y introduit, comme il est dit plus haut, des gâteaux remplis des trois sortes de couvain, & des gâteaux de miel & de cire, en les prenant aux ruches qu’il veut imiter. Alors il ôte de leurs places les anciennes ruches pour y substituer les nouvelles. Trompées par la ressemblance, les abeilles, à leur retour, rentrent dans ces dernières ruches ; elles y travaillent avec ardeur ; le couvain se développe bientôt, & par ce moyen on a des essaims, sans faire tort aux mères ruches, parce qu’il y reste toujours assez d’abeilles, de celles qui travailloient dans l’intérieur, pendant que les autres étoient aux champs. Il y a, dans ce cas, deux précautions à prendre ; l’une, d’empêcher qu’il ne retourne aux anciennes ruches un trop grand nombre d’abeilles ; pour cet effet, une personne se tient auprès, & avec une plume les inquiète, afin de les forcer à aller dans les nouvelles ; l’autre de ne pas laisser les mères-ruches s’épuiser par une grande désertion. M. Schirach assure que, dès le troisième jour, les ruches anciennes & nouvelles forment des peuples totalement distincts, qui n’ont rien de commun entr’eux.

Un des grands avantages de la méthode de M. Schirach, est de ne point perdre d’essaims ; comme on est exposé à en perdre, en abandonnant leur sortie à la nature. Il lui en attribue beaucoup d’autres, qui ne paraissent pas aussi réels. On assure que, pendant bien dés années, il n’a eu d’essaims que ceux qu’il s’est formés lui-même, & que les abeilles réussissoient toujours au-delà de ses espérances ; motifs puissans pour déterminer à adopter sa méthode, qui est très-ingénieuse. On ne peut se dissimuler cependant qu’elle exige beaucoup de soins, & plus d’attentions que la plupart des agriculteurs ne sont pas capables de prendre. D’ailleurs, le tems qu’on passeroit à former ainsi des essaims, seroit-il suffisamment payé, par l’excédent du produit ?

MM. Duhoux & Perillat ont une manière particulière de former des essaims ; on ne peut en faire usage qu’après qu’une ruche, dans un rucher, a donné un second essaim : car on a besoin d’une reine ; il n’y a guère que les seconds essaims qui en aient plus d’une. Au moment où un second essaim vient de partir, on voit ordinairement quelques reines sur la table ; on en saisit une avec la main, ou en mettant dessus un verre, qu’on fait glisser sur une feuillé de papier. Il y en a aussi qui voltigent autour de l’endroit où un essaim s’est jeté. On peut encore là en prendre une avec la main, couverte d’un gant, ou avec un bâton englué. Enfin, pour se procurer une Reine surnuméraire, on plonge un nouvel essaim dans un tonneau plein d’eau ; on prend les abeilles avec une cuiller percée, pour en ôter les reines, ayant soin d’en laisser une ; ensuite on les remet dans la ruche, dont on ferme l’ouverture avec un canevas clair ; on l’expose au soleil ; les abeilles se sèchent, & n’en sont pas incommodées, à ce qu’on assure. Quand on a des reines à sa disposition, on prépare une ruche vide, qu’on apporte au milieu du jour auprès d’une ruche bien peuplée & prête à donner un essaim ; on déplace celle-ci, & sur-le-champ, avec la ruche nouvelle, on couvre l’endroit où elle étoit, après avoir mis sur la table une reine imbibée de miel délayé dans un peu d’eau. Les abeilles qui restoient sur la table, s’approchent de la reine & la lèchent ; celles qui reviennent des champs, sont d’abord étonnées & furieuses ; peu-à-peu elles s’appaisent & se mettent à travailler. En ôtant de sa place l’ancienne ruche, il faut la poser sur des bâtons, pour ne pas écraser d’abeilles, précaution qu’on doit toujours prendre. Si l’on craint qu’il n’y en ait pas assez dans la nouvelle ruche, en frappant quelques petits coups sur l’ancienne, il en sortira un certain nombre, qui iront se joindre aux autres ; on éloigne pour quelque tems l’ancienne ruche.

Cette méthode me paroît d’une exécution
difficile,