Page:Encyclopedie Methodique - Agriculture, T01, 1787.djvu/331

Cette page n’a pas encore été corrigée

ABE ABE 317

que les faux-bourdons, elle surpasse de beaucoup les ouvrières en longueur & en grosseur. Ses ailes ne se prolongent pas jusqu’à l’extrémité de son corps. Elle est d’un brun-clair pardessus, & en dessous d’un beau jaune : on ne lui voit, sur les jambes, ni palettes, ni brosses ; sa trompe est très-courte & très-déliée. Il paroît que la nature l’a conformée différemment des abeilles ouvrières, soit parce qu’elle n’étoit pas comme elles destinée à travailler, soit par quelqu’autre raison inconnue ; elle ne sort presque jamais de la ruche, du moins on ne s’en apperçoit pas. Selon Swamerdam & M. de Réaumur, qui ont fait, sur cet objet, des observations & des recherches nombreuses, la reine d’une ruche est d’une fécondité considérable, qui engage les abeilles à rien souffrir qu’une, parcequ’elles seroient exposées à des travaux excessifs, s’il y en avoit plusieurs. On a eu la patience de calculer qu’un essaim pouvoit être composé de 32 256 abeilles ; une ruche en donne quelquefois trois, & par conséquent fourniroit une population de 96 768 abeilles, qui devroient leur naissance à la même mère.

Les faux-bourdons sont moins longs que la reine & plus gros que les ouvrières. Leur trompe est courte, ils n’ont ni palettes aux jambes, ni aiguillon. Quelques observateurs disent avoir trouvé, dans des ruches, des insectes aussi petits que des abeilles ouvrières, qu’ils ont nommés aussi faux-bourdons, parce qu’ils étoient miles. On croit que 1’emploi unique des faux-bourdons est de féconder la reine. Les abeilles ouvrières, dit-on, les souffrent tant qu’ils sont nécessaires. Ce tems étant passé, elles les tuent. Le nombre des faux-bourdons varié depuis trois cens jusqu’à deux mille, selon l’ancienneté de la ruché. On ne les y voit paroître qu’après l’hiver, à la fin de l’été il n’y en a plus.

Les abeilles ouvrières, plus petites que la reine & les faux-bourdons, ont une trompe longue, pointue & mobile en tout sens ; leurs yeux sont à facettes & couverts de poils ; leurs pattes ressemblent des brosses ; celles de derrière sont creuses & faites, en forme de spatules voûtées ; elles ont un aiguillon composéde deux dards renfermés dans un étui. Lorsqu’elles piquent, il s’introduit dans la plaie une liqueur que contient une vessie placée à la base de l’aiguillon : cette liqueur, par sa qualité venimeuse, cause une vive douleur. La plupart des observateurs ont cru que les abeilles ouvrières étoient des mulets qui ne se reproduisoient pas. Quelques physiciens allemands ont essayé, depuis peu, d’élever des doutes sur cette opinion ancienne & accrédité,sur-tout MM. Schirach & Riems ; mais ils ne s’appuient pas d’observation & d’expériences propres à convaincre. C’est sur les ouvrières que paroît rouler tout le travail ; elles vont chercher le miel & la cire, forment des gâteaux, entretiennent la propreté dans la ruche nourrissent la reine, les faux-bourdons, les jeunes essaims, & veillent, à ce qu’on croit, avec vigilance & courage à la sûreté de tout ce qui est renfermé dans la ruche.

La ponte de la reine a lieu pendant toute l’année, excepté dans les tems rigoureux, pour réparer les pertes journalières ; c’est particulièrement au printems qu’elle est plus considérable, parce que c’est la saison des essaims. Les oeufs sont déposés, au fond des alvéoles, ou cellules destinées pour les recevoir. Ils y éclosent le troisième jour, sur-tout dans la belle saison, par la seule chaleur de la ruche, qui est communément plus grande que celle qu’une poule communique à des oeufs. Les vers qui en proviennent, assez semblables aux vers à soie, sont d’abord nourris d’une espèce de bouillie dont on ne connoît pas la nature ; les abeilles ouvrières, qui la leur fournissent, leur portent dans la suite du miel. Vers le huitième jour, ces vers occupent chacun presque tout leur alvéole. Ils changent plusieurs fois de peau, prennent leur accroissement, filent une soie fine, & se convertissent en nymphes blanches ; desquelles, au bout de douze jours, sortent les abeilles toutes formées. On distingue les jeunes abeilles des vieilles, parce que celles-ci, qui sont d’une couleur plus rousse, ont les ailes un peu déchiquetées & frangées aux extrémités.

On n’a que des conjectures sur la durée de la vie des abeilles. M. de Réaumur croit qu’elles ne vivent qu’un an. Ce qu’il y a de certain, c’est que, dé cinq cens abeilles qu’il avoit marquées en rouge avec un vernis dessiccatif, au mois d’avril, & qu’il avoit vues les mois suivans, il n’en trouva pas une au mois de novembre.

Des essaims.

Un objet très-important pour les propriétaires d’abeilles, c’est la conservation & la multiplication des essaims. Quand la population d’une ruche est trop considérable, eu égard à sa capacité, il se sépare une partie des jeunes abeilles, qui vont chercher un antre domicile. M. de Réaumur s’est assuré qu’elles ne quittent pas les environs de la ruche où elles sont nées, à moins qu’elles ne soient accompagnées d’une reine. La réunion de ces insectes s’appelle un essaim.

Selon la température du climat & l’exposition des ruches, les essaims commencent à sortir plutôt ou plutard. Dans les provinces peu éloignées de Paris, c’est ordinairement vers la mi-mai. Il en part jusqu’à la fin de juillet ; ce qui dépend des saisons plus ou moins favorables. Les ruches bien abritées du nord & exposées au midi, donnent leurs essaims de bonne-heure. C’est donc pendant l’espace de deux mois ou deux mois & demi seulement, qu’on doit les attendre & veiller leur sortie. Il est rare quelle ait lieu avant neuf heures du matin ; le plus souvent c’est depuis ces momens du jour jusqu’à cinq heures du soir, c’est-à-dire, pendant la plus grande chaleur. Un rayon ardent