celle du Levant, mais convenable pour les trames des étoffes de première qualité, telles que les velours, les satins, les chinés, & pour les
chaînes même des étoffes de qualité inférieure. La quantité de soie
que fournit l’étranger aux manufactures de plusieurs villes se paie en
productions du sol ou en ouvrages; le prix de la main d’œuvre reste
dans le royaume. C’est un dédommagement sans doute, mais
il_ne
doit pas ralentir le zèle de l’activité des provinces propres à l’éducation
& à la multiplication des vers à foie, parce qu’il faut peu
de terrein
pour beaucoup de mûriers blancs, parce qu’on en peut planter le long
des chemins, parce qu’enfin au moment où les vers à soie éclosent
& subissent toutes leurs métamorphoses, les travaux essentiels de la
campagne, c’est-à-dire, les moissons, ne sont pas encore commencés,
du moins dans beaucoup de provinces.
Il semble qu’il ne manque à l’agriculture françoise, pour pouvoir, au moins en partie, fournir de matières premières les manufactures les plus importantes, que de cultiver les arbrisseaux qui portent le coton. Mais ils ne se plaisent que dans des climats chauds. Quelques contrées de l’Europe, de l’Amérique, de l’Asie & de l’Afrique se consacrent à cette culture. On l’a essayé en Corse, sans succès, mais ce n’étoit qu’une première tentative, qui ne doit point ralentir le zèle de ceux qui ont à cœur de l’introduire dans cette isle, où je sais qu’on s’en occupe avec de grandes espérances. Nos colonies d’Amérique en produisent de plusieurs espèces, parmi lesquelles il y en a de la plus grande beauté.
C’est encore à l’agriculture qu’on doit l’exportation des mulets que l’Espagne tire de quelques-unes de nos provinces. Cette branche de commerce, autrefois si florissante, se rétablira lorsqu’on aura supprimé les étalons dans le Bigorre, dans la Navarre françoise, dans le diocèse de Cominges, dans le petit pays nommé les Quatre-Vallées, & dans les Pyrénées françoifes, qui, calcul fait d’après les registres des commerçans, vendôient, il y a cinquante ans, dix-neuf vingtièmes de mulets de plus à l’Espagne. La haute Auvergne se plaint aussi de la diminution énorme de ses mulets depuis qu’on y a établi des étalons, parce qu’on ne permet aux paysans de livrer au baudet que les plus petites jumens, rebutées par les inspecteurs des haras.
Une partie des objets dont je viens de faire mention est portée dans tout le royaume par le commerce intérieur pour la consommation des habitans. Les pays, où la vigne ne peut venir, sont fournis de vins par ceux qui la cultivent, excepté dans le cas ou, à cause de l’éloignement, les frais de transport deviennent trop considérables. Les gens riches ne manquent pas de s’en procurer, à quelque prix que ce soit. Mais le peuple y supplée par une autre boisson; le Normand boit du cidre, le Flamand, l’Artésien, le Picard boivent de la bière