Page:Encyclopedie Catholique - T14-LO-NYS.djvu/332

Cette page n’a pas encore été corrigée

MAttTYUS.

MAKTYHS.

(328)

dans le premier cas la justice commandait d’en faire une recherche exacte, aucune société ne pouvant et ne devant pas tolérer des hommes que leurs crimes rendent dangereux ; mais si les chrétiens étaient exempts de tout reproche, pourquoi les punir à cause de leur religion ? En vérité, la justice de Trajan n’était que de la tyrannie, et sa bonté était une véritable cruauté On n’est donc pas étonné de voir ce prince condamner lui-mème saint Ignace à mort en passant à Antioche, et l’envoyer à Rome pour y être exposé aux bêtes. Voir la lettre de ce saint martyr aux Romains et celle de saintPolycarpe aux Philippiens.) Suivant Eusèbe (Hist. eccl., liv. m chap. 33) la persécution fut si violente sous Trajan, que toute l’Asie en fut ébranlée. Les tombeaux des catacombes de Rome nous fournissent aussi la preuve de la persécution de Trajan. Sur l’un de ces tombeaux on voit le nombre trente écrit en chiffres,et puis ces mots Surra et Sénéc. cons., ce qui indique que dans cette tombe se trouvent réunies les dépouillesde trente personnes qui ont été martyrisées sous le consulat de Surra et Sénccion qui étaient consuls précisément sous l’empire de Trajan. Le règne d’Adrien ne fut pas non plus favorable aux chrétiens. Sulpice Sévère et saint Jérôme placent la quatrième persécution sous son règne, et elle fut très violente, suivant saint Jérôme ; il y eut beaucoup de martyrs en Italie, en Sardaigne et en Orient. Celse nous apprend que sous l’empire d’Adrien les chrétiens tenaient leurs assemblées en cachette pour éviter les peines décernées contre eux (liv. i, n° 3 ; liv. 2, n° 18), et que lorsqu’ils étaient pris, on les mettait en croix, on leur faisait souffrirtoutes sortes de tourments (liv. vin, n°" 39, 43, 48). La chronique des Samaritains porte aussi que cet empereur lit massacrer en Egypte beaucoup de chrétiens ; il est vrai que l’apologie de la religion par Aristide et Quadrat, ainsi que la lettre de Sérénus Granianus, adoucirent la persécution. Maisla lettre que ce prince adressa à Minucius Fondanus prêtait beaucoup à l’arbitraire, puisqu’il y est dit que si quelqu’un se rend accusateur des chrétiens, et montre qu’ils agissent en quelque chose contre la loi on doit les punir selon la qualité de la faute. Or, les lois de l’empire proscrivant le christianisme, c’était dire que tous ceuxqui en faisaient profession devaient être punis. Les chrétiens eurent à subir une nouvelle persécution sous le règne d’Antonin-le-Pieux. Ce prince se montra d’abord très bien disposéen leur faveur. 11adressa aux Etats d’Asie une constitution où il va jusqu’à reprocher aux païens de chasser et de persécuter les chrétiens, parce qu’ils sont fidèles au culte de Dieu ; mais dans la suite Antonin montra d’autres sentiments à leur égard, comme l’indiquent ces paroles d’un chronologiste juif : « Judas-le-Saint, prince de la nation juive, vécut sous trois empereursqui persécutèrentles chrétiens etfurent très favorables aux juifs, Antonin-le-Pieux, Marc-Aurèle et Commode.C’est sous le règne de ce prince qu’eut lieu l’emprisonnement du célèbre Péregrin, qui d’abord souffrit beaucoup pour la foi, mais qui dans la suite y renonça (Lucien Histoirede la mort de Péregrin). Ajoutonsà toutes ces preuves de la persécution que l’empereur Antonin fit éprouver à l’Eglise celle non moins forte que nous tirons de l’inscription suivante, trouvée sur le tombeau d’un martyr dans le cimetière de Calixte « Alexandre n’est pas mort il vit au-dessus des étoiles, et son corps repose dans cette tombe. Il a cessé de vivre sous l’empereur Antonin qui ne lui a payé que par de la haine ce qu’il devait de faveur et de bonté ; car, tandis qu’il fléchissait les genoux pour sacrifier au vrai Dieu, il fut entraîné au supplice. Oh ! malheureux temps où, au milieu de nos cérémonies sacrées et de nos prières, nous ne pouvons être en sûreté mème dans des cavernes. Quoi de plus misérable aussi que la mort ! car nous ne pouvons pas même être ensevelis par nos amis et nos familles» (Arringhi Roma subterranea, tom. 2, p. 685). Ces dernières paroles nous font suffisamment connaître la violence de la persécution. Celle qui eut lieu sous Marc-Aurèlefut également très sanglante, ainsi que nous le montrent les paroles déjà citées du chronologiste juif, ainsi que les reproches que cet empereur,dans son livre des Uétlcxions morales fait aux chrétiens d’aller à la mort avec trop d’ardeur et de mépris. Le gouverneur de Lyon ayant demandé à ce prince ses ordres relativement aux chrétiens qu’il avait fait arrêter et tourmenter cause de leur religion, il répondit de faire punirde mort tous ceux qui persisteraient à confesser Jésus-Christ, et de mettre en liberté ceux qui le renieraient. Uneinfinité de chrétiens furent immolésà Vienne et à Lyon, après avoirsubi les plus affreusestortures, commeon peut s’en convaincre par le récit d’Eusèbe (Hist. eccl. liv. v, chap. i). Lesdeux églises de Lyon et de Vienne se virent privées durant cette persécution de ceux qu’elles considéraient commeleurs principaux appuis. Saint Pothin, évoquede Lyon, et quarante-huit fidèles, d’après ce que dit Grégoirede Tours, souffrirent le martyre en même temps. Le récit de leur martyre est rapporté dans la lettre que les églises de Lyon et de Vienne adressèrent aux fidèles de l’Asie et de la Phrygic et qui nous a été conservée par Eusèbe. C’est aussi sous l’empire de Marc-Aurèleque saint Justin et saint Polycarpe évoque de Smyrne, scélèrent la foi de leur sang, et que les fidèles de Smyrnes’excitèrent au martyre, à l’exemple de leur illustre évèque, ce qu’ils n’auraient pas fait, si la persécution n’avait pas emporté un grand nombre de fidèles. Commodecontinua la persécution continuée par son père Marc-Aurèle.La huitième persécution eut lieu sous Sévère. Cet empereur défendit, sous de grièves peines, qu’on embrassât le christianisme et le judaïsme (Spartien, Vie de Sévère, p. 70). C’est aussi pour empêcher leurs réunions qu’il publia un rescrit, qui déférait au préfet de Rome ceux qui tenaient des réunions illicites (Baronius, à l’année 204 ;. Sous ce prince il n’y eut presque pas de ville, suivant Eusèbe, qui n’eût ses martyrs (liv. 6, ch. i), et l’on appelait les chrétiens gens à sarments et à poteaux, sarmenlalii et semoxii, parce qu’on les attachait à des poteaux et qu’on les entourait de sarments pour les brûler (Tertul., l. Apologet., c. 48).

C’est pendant la persécution de Sévère que saint Irénée, évèque de Lyon, et un très grand nombre de chrétiens de cette ville souffrirent le martyre. Suivant Oddon, dans sa Chronique, saint Irénée fut immolé avec une multitude innombrable de chrétiens. Une épitaphe en vers léonins, qui se lit dans l’église du saint à Lyon, en porte le nombre à 9,000. Saint Grégoire de Tours dit que saint Irénée avait converti presque tous les habitants de cette ville, qui furent associésà ses combats, en sorte que des ruisseaux de sang coulaient dans les rues. Caracalla, fils de Sévère, poursuivit les chrétiens avec la mème haine que son père. Cécilien, auteur païen et contemporain de Sévère et de Caracalla, nous apprend, dans MinuciusFélix, quesous leur règne les chrétiens étaient exposés aux supplices, aux croix et au feu. Dans le dessein de perdre entièrement le christianisme, le sophiste Fronton prononça contre les chrétiens diverses harangues où il les chargeait de toutes sortes de calomnies. La persécution ne s’interrompit pas sous les règnes de Macrin et d’Héliogabale. Alexandre, qui remplaça ce dernier sur le trône impérial, fit paraître beaucoup d’attachement pour les maximes des chrétiens et adora Jésus-Christ avec les autres dieux. Maisil ne put empêcher que, dans beaucoup de lieux, leschrétiens ne fussent poursuivis par les magistrats ou par la populace altérée de sang. Ce fut même sous son règne que Domitius Ulpianus recueillit, dans un ouvrage intitulé Du devoir desproconsuls, les rescrits des empereurs contre les chrétiens, afin que l’on sùt quelles peines il fallait leur infliger. La persécution se ralluma avec plus de force que jamais sous l’empereur Maximien, qui avait fait massacrer Alexandre, son prédécesseur, et que les autres païens, Capitolin, Hérodien et Zozime,nous représentent comme un monstre qui avait pour maxime que l’on ne pouvait conserver l’empire que par la cruauté, et d’après ce que ces mêmes écrivains nous disent, ce prince la poussa jusqu’à ses dernières limites, il n’épargna ni l’âge, ni le sang des innocents, ni celui des premiers personnages de l’Etat ; il ne ménagea pas non plus le sang des fidèles, ainsi que nous l’apprennent les auteurs chrétiens.Il les regardait,ainsi que tous les empereurs païens, comme les ennemis des dieux et de l’Etat. La haine dont il était animé contre la famille d’Alexandre, où il y avait plusieurs personnes qui faisaient profession du christianisme, le porta à commander de faire mourir tous les pasteurs de l’Eglise (Eusèbe, liv. 6, ch. 48). On voit donc qu’en suivant l’ordre des persécutions, depuis l’ascension de notre Seigneur jusqu’au règne de Maximien, et qu’en nous appuyant sur les monuments les plus certains, l’Eglise fut mise à de cruelles épreuves, et qu’elle fut glorifiée par une multitude de martyrs. Mais on nous oppose un passage d’Origène, où il est dit (liv. 3, n° 8) que l’on peut aisément compter ceux qui sont morts pour la religion chrétienne, parce qu’il en est mort un petit nombre, et par intervalles, Dieu ne voulant pas que cette race d’hommes fût entièrement détruite. Maisil est évident qu’Origène, dans ce passage, ainsi qu’on l’a très bien fait remarquer avant nous, ne parle du petit nombre des martyrs, que par comparaison avec celui des chrétiens qui n’avaient pas péri ; ce qu’il est facile de conclure des der-