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DÉSIR - DESMAN


il s’en faut infiniment. Des désirs bornés, c’est-à-dire en rapport avec nos moyens actuels, peuvent seuls concourir à notre bonheur. Se contenter de peu, voilà la moitié du bonheur et de la sagesse. Il est du moins infaillible que l’homme tourmenté par une multitude de désirs dont la source est dans une vagabonde imagination ou une sensualité désordonnée aille droit au crime ou à la bassesse et pourquoi, en effet, ne nous éloignerions— nous pas du bonheur à mesure que nous cous éteignons de la nature ou de la raison ? Concluons donc avec l’expérience de tous les temps que les désirs artificiels sont un double obstacle au bonheur, dès qu’ils dépassent la limite de nos ressources et de notre puissance légitime, et que l’homme placé dans les meilleures conditions de bonheur est celui qui ne désire actuellement que ce qu’il peut immédiatement ou prochainement.

L’un des caractères du désir qui porte avec soi le plus d’enseignement pour le philosophe, c’est qu’il est insatiable et inépuisable de sa nature. Nous en avons déjà fait la remarque à un désir satisfait succède aussitôt un désir à satisfaire, et ainsi de suite à l’infini durant toute la vie, sous peine de souffrance, d’ennui, d’atonie, et même de perturbation mortelle dans l’organisme intellectuel, moral et physique. En vain, au milieu de la carrière, le désir nous parait un mirage’; de nouveau altérés de bonheur, nous marchons de nouveau à sa recherche, croyant bien pour cette fois le saisir et le posséder et si nous ne renouvelons pas en cela les travaux infructueux des Danaïdes, remplissant leur tonneau toujours vide ; si nous ne subissons pas le sort de Tantale ou celui de Sisyphe, nous réalisons du moins quelque chose comme l’histoire de la toile de Pénélope. Quelle ambition fut jamais satisfaite ? quelle intelligence a jamais assez appris, vu et connu ? quel cœur fut jamais assez rempli d’amour ? quels désirs enfin n’aperçoivent plus d’espace et de conquête devant leur noble convoitise, même ceux des Alexandre, des César, des Napoléon, des Aristote, des Newton, des Kepler et des Descartes, des Socrate, des Confucius et de Jésus-Christ ? Qui en ce monde a rencontré une gloire une science, un amour, au-delà desquels il cessait d’aspirer et d’entrevoir.

Dieu donc ici-bas ne peut combler la mesure, satisfaire la soif de nos désirs. Qu’est-ce à dire si ce n’est que par-delà ce séjour il y a d’ultérieures stations, aussi infinies en nombre et en promesses que notre amour l’est lui-même en désirs et en aspirations. Et comment se refuser à cette encourageante croyance Si le bien c’est Dieu, le bien est infini comme Dieu ; et dès lors, comme l’a dit un grand écrivain de nos jours : « Pour tous les êtres intelligents, le désir sera éternel, puisque le bien qui est l’objet de leur amour est Muni (1)[1]. »

Reid, Œuvres complètes, traduites par Th. Jouffroy : Paris, 1836, 2 volumes in-8o.

Dugald-Stewart, Esquisse de philosophie morale, trad. Par Th. Jouffroy ; Paris, 1836, 1 vol. in-8o.

De Gérando, Du perfectionnement moral, ou de l’éducation de soi-même, Paris, 1836, 2 vol. in-8o.

C. Pecqueur.

DÉSISTEMENT. (Jurisprudence.) Le désistement consiste dans faction de renoncer à une procédure commencée. Il faut, pour donner un désistement, avoir la pleine et libre disposition de ses droits, et cet acte doit être revêtu de certaines ibrmatités, indiquées au Code de procédure, art 402-403. Le désistement accepté entraîne deux effets premièrement, les parties sont remises au même et semblable état qu’avant la demande, et, par conséquent, tous les actes de procédure sont anéantis secondement, celui qui se désiste est tenu de tous les frais de la procédure interrompue.

E. Boucher.

DESMAN. (Histoire naturelle.) Mygale. Classé d’abord parmi les musaraignes, l’animal singulier qui sert de type au genre désigné sous ce nom avait été regardé comme un castor par Linné. 11 a effectivement une queue écailleuse dont la conformation est tout à fait analogue à celle de l’ondatra ; les pieds, surtout ceux de derrière, palmés, et les habitudes aquatiques les plus prononcées. Mais il offre, sous d’autres rapports, des points de ressemblance avec tes hérissons et les taupes. Comme ces dernières, il est aveugle ou à peu près, et ses mains étant très-fortement armées, il s’en sert pour fouir. Ce qui le particularise est une trompe, la mieux conformée, la plus mobile et proportionnellement la plus longue après celle de t’étéphant. Une sensibilité exquise réside dans cet organe, où le tact semble s’être perfectionné en raison de la privation de la vue. Comme un composé en diminutif de tant d’animaux très-difïerents, le desman habite la Suède, la Poméranie et l’Ukraine ; on ne l’a pas retrouvé à l’ouest du Dniéper, ni à l’est du Wotga toujours dans les lieux marécageux, it marche ou nage iudiffé*. remment au fond de l’eau, grimpant le long des branchages qui y plongent, et s’y tenant bien plus que dans l’atmosphère. C’est un rongeur, presque poisson par ses habitudes. et poursuit, sans y voir, sa proie, qui consiste en larves d’insectes fouillant aussi la vase avec sa trompe, afin de saisir les vers qui s’y cachent. Il se creuse, dans tes berges des rivières et des étangs, des terriers ouverts auttj Lamennats.

  1. (1) Lammenais.