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au moins jusqu’aux rois de la seizième dynastie, désignés seulement par leurs prénoms distinctifs ; comme ces prénoms royaux se retrouvent sur d’autres monuments accompagnés des noms propres (Ramessèss, Aménophis, Thouthmosis, etc.), on applique sans difficulté ces noms aux prénoms de la Table d’Abydos ; et ce monument prend ainsi une autorité historique, à laquelle on ne peut encore rien comparer dans l’antiquité égyptienne.

M. Mimaut le fit enlever du mur, lorsqu’il était consul général de France à Alexandrie. Il l’avait rapporté en France. A sa mort, la table d’Abydos fut achetée, pour le British museum, où elle est à présent déposée.

Letronne.

ABYSSINIE. (Géographie.) Grand pays de l’Afrique orientale au sud de la Nubie. Les limites qui le séparent de cette contrée de celle des Gallas au sud et au sud-ouest, et du royaume d’Adel au sud-est, varient suivant le sort incertain des armes. Si l’on y comprend les côtes de la mer Rouge à l’est de l’Abyssinie, qui autrefois dépendaient immédiatement de ce royaume, et les provinces occupées par les Gallas, il peut avoir 200 lieues de longueur du 15° au 7° degré de latitude nord, sur 250 lieues de largeur du 32° au 42° degré de longitude est de Paris. L’Abyssinie forme un plateau doucement incliné au nord-ouest, avec deux grands escarpements, l’un à l’est vers la mer Rouge, l’autre au sud vers l’intérieur de l’Afrique. Les plus hautes cimes sont le Lamalmon, l’Amba-Gédéon, le Samen, le Naméra ; la neige ne reste un certain temps que sur ces deux dernières.

Un grand nombre de rivières considérables arrosent ce pays ; la plus célèbre est le Bahr-el-Azreck ou Nil d’Abyssinie, l’Astapus des anciens, qui traverse le lac de Dembea. Ce sont les sources de cette rivière que Bruce a prises pour celles du Nil d’Egypte : elles avaient été découvertes avant lui, en 1618, par le P. Paëz, missionnaire portugais.

L’élévation du sol, l’abondance des pluies pendant certaines saisons, les nombreux courants d’eau, rendent le climat des parties hautes de l’Abyssinie plus tempéré que sa position géographique ne le ferait croire ; mais dans les plaines et les vallées basses, les chaleurs sont étouffantes à l’intérieur du pays. La saison des pluies, qui commence en juin, dure jusqu’en septembre ; elles sont fréquemment accompagnées d’orages affreux, et si abondantes qu’elles font suspendre tous les travaux.et même cesser les opérations militaires. Les mois les plus sereins sont ceux de décembre et de janvier. Sur les bords de la mer Rouge, à l’est des montagnes, la saison des pluies commence lorsqu’elle a pris fin dans l’intérieur.


Les voyageurs qui ont visité cette contrée montagneuse ne parlent pas des mines qu’elle doit renfermer ; quelques relations disent néanmoins qu’il s’y en trouve de fer, de cuivre et de plomb ; probablement leur exploitation est très imparfaite. On retire de l’or extrêmement pur du lavage des sables et graviers de quelques fosses peu profondes. On trouve l’or le plus fin au pied de quelques montagnes des provinces occidentales. Dans les plaines situées au bas de la chaîne, on rencontre du sel gemme en cristaux d’une dimension considérable ([1]).

De vastes forêts couvrent plusieurs cantons de l’Abyssinie ; on y remarque le cusso, le vouginos, l’érythrine à fruit de corail, le tamarinier, diverses espèces d’acacias épineux, le dattier et d’autres arbres curieux. Le cafier croît spontanément sur quelques montagnes : les plus arides nourrissent des euphorbes ligneuses.

L’on cultive le sorgho ou millet, le froment, l’orge, et le tef, graminée du genre des poa, dont la graine est extrêmement mince et sert à faire des gâteaux. Deux récoltes ont lieu tous les ans, l’une pendant la saison des pluies, en juillet, août ou septembre ; l’autre au printemps : dans quelques endroits la terre donne jusqu’à trois récoltes. L’ensété, espèce de bananier, et la vigne obtiennent aussi les soins des Abyssins, mais ils font peu de vin ; ils aiment mieux une espèce d’hydromel. Les jardins offrent plusieurs espèces d’arbres fruitiers et de légumes ; les champs produisent des plantes oléagineuses inconnues en Europe. On trouve en Abyssinie le cypérus à papier, l’arbre qui donne le baume de Judée, et celui de la myrrhe ; enfin les campagnes sont embaumées de l’odeur suave qu’exhalent les roses, les jasmins, les lis, et les œillets.

Beaucoup de bêtes féroces, entre autres, les lions, les léopards, les panthères, les lynx bottés, les hyènes, infestent l’Abyssinie. La girafe, diverses espèces de gazelles, des singes, des sangliers, des buffles, l’éléphant, le rhinocéros à deux cornes, et l’hippopotame, se trouvent aussi dans ce pays. Quelques voyageurs ont dit que le zèbre y errait au moins dans les provinces méridionales ; ils font aussi mention de l’achkoko, petit animal de la famille des pachydermes. Les bœufs sont très gros ; l’âne et le mulet remplacent le cheval dans cette région montagneuse ; les lacs et les rivières sont remplis de crocodiles. Les oiseaux aquatiques y sont rares ; plusieurs oiseaux singuliers font l’ornement des campagnes et des forêts ; on y voit plusieurs espèces d’aigles et l’autruche. On ne connaît pas bien les sortes de poissons de cette contrée. Les abeilles y

  1. Voyez la fin de cet article, Col. k20 et suiv.