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tion morale qui résulte du changement de lieu & de la réunion de tous les agrémens que l’on rencontre dans les endroits où l’on prend les eaux. Nous laisserons aux médecins observateurs, dont l’esprit est dégagé de préventions, à prononcer sur une question de cette importance.

Eaux minérales factices. Eaux minérales composées dans les laboratoires.

Dès que l’on a pu déterminer la nature & la proportion des substances qui entrent dans la composition des différentes eaux minérales, il a paru facile de les composer artificiellement, & ce problème a été résolu, d’une manière assez exacte, par différens pharmaciens. Il a suffi de doser les substances qui les composent, & de les dissoudre dans de l’eau distillée.

Parmi ces substances, il en est qui ont présenté quelques difficultés ; ce sont les différéns gaz, & en particulier l’acide carbonique, que les eaux aérées contiennent. Pour introduire ces gaz & les combiner avec l’eau, on a imaginé divers appareils, tels, par exemple, que l’appareil de Noot ou de Parker, composé dé trois vaisseaux de verre A, B, C, fig. 743. Le premier, A, contient les substances d’où l’acide carbonique doit se dégager. C’est ordinairement un mélange de carbonate de chaux ou de carbonate alcalin, avec de l’acide sulfurique, étendu dans une grande quantité d’eau. Le second, B, contient l’eau qui doit être saturée ; & le troisième, C, sert à fournir, dans le second B, l’eau qui lui est nécessaire, & recevoir celle qui reflue lorsque l’acide carbonique, dégagé avec trop d’abondance, pèse trop fortement sur la surface de l’eau en B.

Le vase intermédiaire B a trois tubulures : l’une supérieure, a, pour y placer le vase C ; la deuxième intermédiaire, b, pour faire sortir l’eau saturée ; enfin une troisième inférieure, c. Celle-ci est fermée par un bouchon cylindrique de cristal, percé d’un canal : à la surface supérieure se trouve une soupape demi-sphérique de verre, au-dessus de laquelle est pratiqué un second bouchon, percé de beaucoup de petits canaux. Il existe entre les deux bouchons un espace assez grand pour que la soupape puisse céder un peu par en haut. Ce vase intermédiaire sert à contenir l’eau qu’on veut charger d’acide carbonique.

En faisant usage de cet appareil, l’acide carbonique, dégagé dans le vase inférieur, passe par le canal du bouchon de cristal, soulève la soupape, & pénètre à travers les canaux fins du second bouchon, dans l’eau du vase intermédiaire. Le gaz y est absorbé d’autant plus rapidement qu’il y arrive en filets très-fins.

Cet appareil a le désavantage qu’on ne peut charger l’eau que d’une très petite quantité d’acide carbonique, & qu’il est difficile de l’employer pour combiner d’autres gaz avec l’eau.

Le duc de Chaulmes, Devignes, Fierlinger & beaucoup d’autres, ont fait quelques améliorations à l’appareil de Noot ; enfin, on lui en a substitué un autre, dans lequel on fait arriver le gaz acide par le moyen d’une pompe.

On a, pour cet effet, un cylindre de laiton A, fig. 744, fixé sur un plateau de bois BB ; il est fermé, dans sa partie supérieure, par un chapeau D, dans lequel est fixée une pompe foulante EE. Une vessie pleine du gaz que l’on veut combiner à l’eau, communique en G avec le bas de la pompe. En soulevant le piston & ouvrant le robinet de la vessie, l’air entre dans le corps de pompe ; fermant le robinet & abaissant le piston, l’air, comprimé, pénètre dans le cylindre par un tube H, & sort à travers une immensité de petits trous, pour se répandre dans l’eau & s’y combiner.

À l’aide de cet appareil, on peut combiner à l’eau toute espèce de gaz, & l’on peut lui faire dissoudre cinq à six fois son volume de gaz acide carbonique. L’opération est d’autant plus prompte que le corps de pompe contient un plus grand volume de gaz, & que le jeu du piston est plus rapide.

Dès que l’eau est saturée convenablement de gaz, on la met en bouteille au moyen du robinet k, auquel on adapte un bec conique, qui descend jusqu’au fond de la bouteille, & on ferme exactement le col. Une rainure, pratiquée le long du bec, laisse dégager l’air du vase ; cette rainure est fermée à pression par un petit ressort en cuivre, muni d’un morceau de peau. Lorsque la bouteille est remplie, on la bouche, on ficelle le bouchon & on le goudronne.

On prépare en grand, à Paris, les eaux minérales factices, chez Tryare & Jurine, rue Saint-Lazare ; & chez Rive, rue des Batailles, quai Chaillot, no 34. L’eau y est acidulée par le moyen d’une machine de compression particulière. Le gaz acide carbonique se dégage par le feu, à l’aide d’un cylindre métallique qui traverse un fourneau, & qui, à une de ses extrémités, est pourvu d’un appareil avec lequel on recueille, on lave, on purifie & l’on mesure le gaz. Celui-ci arrive par des conduits mobiles dans une pompe de compression, avec laquelle on fait combiner ce gaz dans de l’eau contenue dans des tonneaux, & dans laquelle on a fait dissoudre à l’avance les sels qui caractérisent l’espèce d’eau minérale que l’on veut obtenir.

L’établissement de Tryare & Jurine est placé près des vastes jardins de Tivoli, afin de procurer, aux personnes qui prennent les eaux, une partie des agrémens que l’on trouve dans les endroits où l’on prend les eaux minérales naturelles. On peut y prendre tous les bains chauds ou froids que la nature de la maladie exige ; on peut y recevoir des douches ; enfin, on a réuni dans cet établissement tout ce que l’on peut se procurer dans les diverses eaux minérales que l’on connoît.

Bien certainement si les cures que procurent les