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les leçons de physique qu’il donnoit à l’École polytechnique[1], un moyen de perfectionner les balances, & de leur faire indiquer, comme les balances à leviers égaux, toutes les divisions de l’unité. Gattey[2] a fait quelques changemens au perfectionnement propose par Hassenfratz, & a fait exécuter sa balance. Enfin, Paul de Genève[3] a fait exécuter une balance romaine avec les mêmes perfectionnemens.

Ces perfectionnemens consistent à réunir plusieurs poids à la balance romaine, comme cela se pratique pour la balance chinoise, & de les construire de manière que l’un indique des dixièmes du premier, un autre des centièmes, & un autre des millièmes. Gattey ayant remarqué qu’il y avoit un inconvénient assez grand à placer sur la même verge deux masses que des circonstances fréquentes pouvoient amener souvent aux mêmes points, il lui parut que le moyen le plus sûr de parer à cette difficulté, étoit d’adapter à la balance deux verges parallèles, dont l’une porteroit la grosse masse & l’autre la petite, de sorte que ces deux masses pussent se mouvoir indépendamment l’une de l’autre, & sans s’embarrasser. Paul n’a laissé à sa balance qu’une seule verge ; & comme celle-ci a été très-multipliée, qu’on s’en sert de préférence à la balance romaine, & qu’elle a beaucoup d’avantage sur cette dernière, nous allons faire connoître le rapport que Pictet de Genève a fait de cette balance, à la Société pour l’avancement des arts établis dans cette même ville.

« La place de vérificateur des poids & mesures que Paul occupe à Genève, l’ayant mis dans le cas d’examiner avec soin un grand nombre de balances romaines, il a eu l’occasion de se convaincre que la plupart de ces instrumens, & surtout les romaines, sont construits sur de mauvais principes, & paroissent avoir été fabriqués par des artistes qui ne connoissoient pas les principes du levier. Il a réussi à perfectionner cet appareil, & les romaines en particulier. Celles-ci ont, dans les usages ordinaires du commerce, deux avantages sur les balances : le premier, que leur axe de suspension n’est chargé que du poids de la marchandise, outre le poids constant de l’appareil lui-même, tandis que l’axe de la balance porte, outre le poids de l’instrument, une charge double de celle de la marchandise ; 2o. l’usage de la balance exige un assortiment de poids assez considérable, lequel augmente proportionnellement le prix de l’appareil, indépendamment des chances d’erreurs qu’il multiplie, & du temps que l’on emploie à chercher l’équilibre. Ces motifs ont engagé l’intelligent artiste Paul à s’occuper des moyens de perfectionner la balance romaine, assez pour que, soit dans les opérations délicates des arts, soit dans celles du même genre auxquelles on est fréquemment appelé dans la pratique des sciences physiques, ces instrumens pussent être substitués avec avantage aux balances ordinaires.

« Pour faire mieux entendre en quoi consiste le perfectionnement des romaines, il convient d’indiquer quels étoient les défauts des romaines ordinaires.

« 1o. Il n’en existoit aucune dans laquelle les points de suspension se trouvassent dans le prolongement de la ligne des divisions du fléau ; circonstance qui changeoit nécessairement les rapports des bras du levier de la puissance & de la résistance, selon que la direction du fléau changeoit relativement à l’horizontale. On a vu des romaines dans lesquelles un degré seulement de différence dans l’inclinaison du fléau, produisoit une différence de plus d’une livre fsr le résultat.

» 2o. Lorsque la coupe, le fléau & le peson sont faits comme à l’aventure, le particulier qui possède une romaine ne peut connoître si cet instrument est dérangé, & l’artiste même ne peut le réparer qu’en tâtonnant & en y perdant beaucoup de temps.

« 3o. La construction des romaines ordinaires, qui ont un petit & un grand côté, oblige à les retourner fréquemment ; opération pénible quand les instrumens sont lourds, & qui expose les axes à s’égriffer par l’effet des chocs que ces retours occasionnent.

» Ce double côté mettant dans l’obligation d’avoir un fléau fort étroit pour qu’il soit moins défectueux, il se courbe facilement ; nouvelle source d’erreurs ; & la face qui porte les numéros étant étroite à proportion, il est difficile d’y loger des numéros visibles.

» Ces inconvéniens sont tous évités par la construction de l’artiste Paul, laquelle offre, en outre, plusieurs avantages que ne possédoient point les anciennes romaines.

» 1o. Les centres des mouvemens de suspension, soit les deux centres constans, sont placés sur la ligne précise des divisions du fléau, à l’exception d’une élévation presqu’imperceptible, dans l’axe du fléau, destinée à compenser la très-légère flexion de la barre.

» 2o. L’appareil est, par la construction du fléau, lesté au-dessous de son centre de mouvement ; en sorte qu’à vide, le fléau demeure naturellement horizontal, & reprend cette position lorsqu’on l’en détourne ; comme aussi, lorsque la romaine est chargée, & que le peson est à la division qui doit accuser le poids de la marchandise. On reconnoît la situation horizontale, dans cette romaine comme dans les autres, au moyen de la languette qui s’élève verticalement au-dessus de l’axe de suspension.

» 3o. On découvre que la romaine est dérangée, lorsqu’à vide, le fléau ne demeure pas horizontal.

» 4o. On remplace, dans ces romaines, l’avan-

  1. Journal des Mines, tomeVIII, pag. 683.
  2. Ibidem, pag. 691.
  3. Ibidem, pag. 671.