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deux branches du ressort, comme dans les essais sur la force des mains ; le second sert pour toutes les expériences qui exigent de tirer le ressort par ses deux extrémités.

On voit, d’après la construction de cet instrument, que l’on peut en faire usage de deux manières, par compression ou par traction.

Par compression, on éprouve ordinairement la force musculaire des mains. Pour cela, on empoigne les deux branches du ressort, le plus près du centre, de manière que les bras soient un peu tendus & inclinés en en-bas, à peu près à l’angle de 45 degrés. Cette position, qui paroît la plus naturelle, est aussi la plus commode pour agir dans toute sa force.

Des expériences faites sur la force musculaire des mains ont donné, pour force moyenne, cent deux livres de pression : il est des personnes qui indiquent jusqu’à cent cinquante livres. La force moyenne des femmes doit être équivalente à celle d’un jeune homme de quinze à seize ans, c’est-à-dire, à peu près les deux tiers de la force ordinaire des hommes.

On fait usage de la traction pour essayer une foule de forces. Nous ne rapporterons ici que l’emploi que l’on en fait pour connoître la force de traction des chevaux & celle de la force du corps des hommes, ou pour mieux dire, celle des reins.

Pour essayer la force des reins, on place sous les pieds l’empatement d’une crémaillère CD, fig. 739 (a) ; on passe à l’un des crans de cette crémaillère un des coudes du ressort ; l’autre coude s’adapte au crochet E, fig. 739 (b), que l’on tient dans la main en F, G. Dans cette position, on est d’aplomb sur soi-même, & l’on peut soulever un grand poids sans être exposé aux accidens qu’un effort pourroit occasionner si on tenoit une position gênée.

L’effort moyen des hommes, pour soulever, estimé par le dynamomètre, est de deux cent soixante-cinq livres. On a vu un homme vigoureux, mais qui n’auroit pas voulu essayer de lever, à la manière ordinaire, un poids de cinq cents livres, déterminer, sur le dynamomètre, un effort de sept cent cinquante-cinq livres.

Quant à la mesure de la traction des chevaux, on place l’un des coudes du dynamomètre sur un point fixe ; l’autre est placé dans un anneau sur lequel sont attachées les cordes de traction des chevaux, & l’on juge de leur effort par la marche de l’aiguille. Des expériences faites sur quatre chevaux ont donné, pour traction moyenne, sept cent trente-six livres.

Des hommes tirant une charrette ou un bateau, à l’aide d’une bricole, ont indiqué, au dynamomètre, une traction moyenne de cent deux livres : celle des hommes les plus forts ne s’est pas élevée au-delà de cent vingt-trois livres. Ces épreuves s’accordent avec l’opinion reçue, que la traction d’un cheval équivaut à celle de sept hommes. Ce que les épreuves de la force de traction des hommes ont de remarquable, c’est qu’il y-a peu de différence entre l’action d’un homme fort, tirant une charrette, & celle d’un homme de moyenne force ; la raison en devient sensible, si l’on observe qu’alors les hommes n’agissent guère qu’en raison de leur poids, tandis qu’en soulevant des fardeaux, ils agissent en proportion de leurs forces musculaires.

Les philosophes ont reconnu depuis long-temps l’avantage que devoit présenter l’usage d’une machine propre à mesurer les forces, estimées par des poids. Borelli (De Motu animali) ; de Lahire, dans un Mémoire qui a pour titre : Examen de la force de l’homme, &c., Académie des Sciences, 1697, se sont particulièrement occupés de cet objet. On a construit, pour cet effet, diverses sortes de balances : les unes, à leviers égaux, estimoient par des poids ; d’autres, à leviers inégaux, estimoient, comme dans la balance romaine, par le mouvement d’un poids sur les plus grands leviers ; enfin, d’autres par des ressorts.

Buffon & Guenau de Montbeillard, voulant faire des expériences sur les forces des hommes, comparées dans les différens âges de la vie, chargèrent Regnier d’imaginer une machine portative qui, par un jeu facile & commode, pût les conduire à résoudre la question qui les occupoit.

Ces deux savans connoissoient les machines inventées par Graham, & perfectionnées par Desaguillier ; ils connoissoient également le dynamomètre de Leroy, de l’Académie des Sciences ; mais la machine de Graham étoit trop volumineuse & trop lourde pour être portative. Le dynamomètre de Leroy, composé d’un tube de métal de dix à douze pouces de long, posé verticalement sur un pied, & contenant intérieurement un ressort à boudin, surmonté d’une tige graduée, ne pouvoit pas être appliqué à la multitude d’expériences que ces savans vouloient faire pour apprécier la force musculaire de chaque membre séparément, & de toutes les parties du corps.

Encouragé par ces deux célèbres naturalistes, Regnier s’occupa de la construction d’un instrument qui pût être appliqué à tous les efforts musculaires, & il imagina, en conséquence, le dynamomètre que nous avons décrit, & qui porte le nom de dynamomètre de Regnier.

DYSESTHÉSIE, de δυς, difficilement, αισθησις, sentiment, dysæsthesia. Diminution de la sensibilité, difficulté de sentir.

Dans l’anesthésie, la sensibilité est totalement anéantie. Il y a anesthésie chez les personnes paralytiques. La dysesthésie est l’acheminement à cet état fâcheux, dont elle ne diffère que parce que le malade peut encore percevoir, mais d’une manière confuse & imparfaite, l’impression des corps qui