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par la facilité avec laquelle on peut rompre, par la percussion, les particules des corps ; tandis que la dureté s’apprécie, soit en usant un corps par le frottement, soit en le comprimant, soit en le laissant pénétrer par un autre corps.

Un des caractères physiques dont les minéralogistes font usage pour distinguer les minéraux, c’est la dureté. Haüy divise les substances minérales, relativement à leur dureté, en quatre classes : 1o. substances qui raient le quartz ; 2o. substances qui raient le verre ; 3o. substances qui raient la chaux carbonatée ; 4o. substances qui ne raient pas la chaux carbonatée. Werner les divise également en quatre classes : 1o. dures ; 2o demi-dures ; 3o. tendres ; 4o. très-tendres. Les substances dures sont celles qui ne se laissent pas entamer par le couteau, & donnent du feu avec l’acier. Il sous-divise les minéraux durs en trois sections : 1o. résistant à la lime, ou extrêmement durs ; 2o. cédant un peu à la lime, ou très-durs ; 3o. cédant à la lime, ou assez durs. Il donne le nom de demi-durs aux minéraux qui se laissent entamer difficilement par le couteau, & ne font plus feu avec l’acier ; le nom de tendres, aux minéraux qui se laissent facilement entamer & tailler par le couteau, mais ne reçoivent pas l’empreinte de l’ongle ; enfin, le nom de très-tendres, aux minéraux qui se laissent très-aisément tailler avec le couteau, & prennent aussi facilement l’empreinte de l’ongle.

Réaumur a proposé, pour essayer les différens aciers, de les rayer avec des substances qui aient des duretés différentes, il propose, pour cet effet, huit sortes de substances, dont les duretés vont successivement en diminuant : 1o. le diamant ; 2o, le saphir ; 3o. la topaze d’Orient ; 4o. le jaspe oriental ; 5o. l’agate ; 6o. le caillou de Médoc ; 7o, le cristal de roche ; 8o. le verre. On remarquera que, parmi ces substances, le jaspe, l’agate & le caillou de Médoc sont classés, par Haüy, parmi les cristaux de roche, & que le verre présente des duretés très-variables.

Hassenfratz, dans sa Sydérotechnie, §. 1222, a employé, pour juger la dureté de l’acier, huit sortes de substances : 1o. le diamant ; 2o. la télésie ; 3o. le rubis ; 4o. le grenat ; 5o. l’éméraude ; 6o. le quartz ; 7o. l’axinite ; 8o. le pyroxène. On pourroit ajouter, pour compléter la liste, en descendant : 1o. le dipyre ; 2o. le diallage ; 3o. la néphéline ; 4o. la chabasie ; 5o. la chaux fluatée ; 6o. la strontiane carbonatée ; 7o. la chaux sulfatée ; 8o. le mica.

Fourcroy, en comparant le plus ou le moins de difficultés que l’on éprouve pour polir les métaux ductiles, & l’effet du choc dans les métaux cassans, a formé cinq rangs de duretés dans les métaux. Il a trouvé qu’en commençant par celui de la plus grande dureté, on devoit placer :

Au premier rang, le fer & le manganèse ;

Au second rang, le platine & le nickel ;

Au troisième rang, le cuivre & le bismuth ;

Au quatrième rang, l’argent ;

Au cinquième rang, l’or, le zinc, le tungstène ;

Au sixième rang, l’étain & le cobalt ;

Au septième rang, le plomb & l’antimoine ;

Au huitième rang, l’arsenic, le plus fragile des métaux cassans.

Le mercure, toujours fluide, ne peut pas être comparé par cette propriété, il ignoroit la dureté comparative du titane, de l’urane, du molybdène & du chrôme.

Thomson a indiqué la dureté respective des métaux par des nombres. Il les place dans l’ordre suivant :

Palladium plus de 9 Antimoine 6,5

Tungstène plus de 9 Étain 6

Fer 9 Cobalt 6

Manganèse 9 Plomb 5,5

Nickel 8,5 Arsenic 5

Platine 8 Iridium

Cuivre 7,5 Osmium

Argent 7 Titane

Bismuth 7 Columbium

Or 6,5 Tantalium

Zinc 6,5 Cérium

On discute depuis long-temps sur la cause de la dureté des corps ; mais cette question ne paroît pas avoir été, jusqu’à présent, résolue d’une manière satisfaisante.

Aristote & les Péripatéticiens regardent la dureté comme une qualité secondaire, prétendant qu’elle est l’effet de la sécheresse, qui est une qualité première. Les causes éloignées, suivant les mêmes philosophes, sont le froid ou le chaud, selon la diversité du sujet. Ainsi, disent-ils, la chaleur produit la sécheresse, & par conséquent la dureté de la boue, & le froid fait le même effet sur la cire.

Épicure, ses sectateurs & les corpusculaires expliquent la dureté des corps par la figure des parties qui les composent, & par la manière dont s’est faite leur union.

Suivant ce principe, quelques-uns attribuent la dureté aux atomes, aux particules des corps, qui, lorsqu’elles sont crochues, se tiennent ensemble & s’emboîtent les unes dans les autres ; mais cela s’appelle donner pour réponse la question même ; car il reste à savoir pourquoi ces particules crochues sont dures.

Descartes & ses nombreux disciples prétendent que la dureté des corps n’est produite que par le repos de leurs parties ; mais le repos n’ayant point de force, on ne conçoit pas comment des parties qui sont simplement en repos, les unes auprès des autres, peuvent être si difficiles à séparer.

Brisson & quelques autres physiciens attribuent la dureté des corps à la pression d’un fluide environnant, qui ne seroit pas l’air atmosphérique, mais un fluide beaucoup plus subtil, qui agit à l’extérieur des corps, & pressant leurs parties les