Page:Encyclopédie méthodique - Physique, T2.djvu/61

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nombre ; en effet, on en distingua jusqu’à 13, en les regardant à travers un prisme.


« Ayant mis un prisme au-devant de la fenêtre pour rompre le trait de lumière introduit dans la chambre obscure, & pour faire retomber l’image oblongue des couleurs sur un miroir, on couvrit le miroir d’un papier noir qui avoit un trou au milieu, au travers duquel l’une des couleurs pouvoit aller donner sur le miroir, tandis que toutes les autres étoient interceptées par le papier. Cela fait, les anneaux n’avoient d’autres couleurs que celles qui tomboient sur le miroir. Le miroir étoit illuminé de rouge : les anneaux étoient entièrement rouges, avec des intermittences obscures : s’il étoit illuminé en bleu, les anneaux étoient entièrement bleus, & ainsi des autres couleurs ; & lorsqu’ils étoient ainsi composés d’une seule couleur, les carrés de leur-diamètre, mesurés entre les parties les plus lumineuses de leur orbite, étoient suivant la proportion arithmétique des nombres 0, 1, 2, 3, 4, & les carrés des diamètres de leurs intervalles obscurs étoient suivant la progression des nombres intermédiaires : Mais si la couleur changeoit, la grandeur des anneaux changeoit aussi : c’est dans le rouge que les anneaux étoient les plus amples, & dans l’indigo & le violet qu’ils étoient les plus petits. Dans les couleurs intermédiaires, le jaune, le vert & le bleu, les anneaux étoient de différentes grandeurs intermédiaires, répondant à chacune de ces couleurs, c’est-à-dire qu’ils étoient plus grands dans le jaune que dans le vert, & plus grands dans le vert que dans le bleu. On connut par-là, que lorsque le miroir étoit illuminé d’une lumière blanche, le rouge & le jaune, dans la partie extérieure des anneaux, étoient produits par les rayons les moins réfrangibles, & le bleu & le violet par les rayons les plus réfrangibles ; & que les couleurs de chaque anneau se répandoient parmi les couleurs des anneaux qui les avoisinoient des deux côtés, & qu’en se mêlant ensemble, elles s’affoiblissoient si fort entr’elles, qu’il n’étoit pas possible de les distinguer, excepté hors du centre où elles étoient moins mêlées : car dans cette observation on pouvoit voir les anneaux plus distinctement & en plus grand nombre qu’auparavant, en ayant compté, dans la lumière jaune, huit ou neuf, outre les traces légères d’un dixième. Pour s’assurer jusqu’à quel point les couleurs des différens anneaux se répandoient l’une dans l’autre, on mesura les diamètres du second & du troisième anneau, & l’on trouva que ces anneaux étoient produits par les confins du rouge & de l’orangé : ces diamètres étoient, par rapport aux diamètres des mêmes anneaux produits par les confins du bleu & de l’indigo, comme 9 à 8 ou environ ; car il étoit difficile de déterminer exactement cette proportion. De même les cercles produits successivement par le rouge, le jaune & le vert, différoient davantage l’un de l’autre, que ceux qui étoient produits successivement par me vert, le bleu & l’indigo ; car, à l’égard des cercles tracés par le violet, ils étoient trop obscurs pour être vus. »

Supposons donc, pour poursuivre ce calcul, que les différences des diamètres des cercles que forment, par ordre, le rouge le plus extérieur, les confins du rouge & de l’orangé, les confins de l’orangé & du jaune, les confins du jaune & du vert, les confins du vert & du bleu, les confins du bleu & de l’indigo, les confins de l’indigo & du violet le plus extérieur, sont en proportion comme les différences des longueurs du monocorde qui forme ces sons dans une octave : sol, la, fa, sol, la, mi, fa, sol ; c’est-à-dire, comme les nombres Alors Newton calcula, dans cette hypothèse, quel doit être le rapport des diamètres des cercles formés par le rouge le plus extérieur & par le violet également le plus extérieur, & il trouva que ce rapport est comme 3 à 2, semblable à celui qu’il a trouvé en observant & en calculant les rayons colorés vus à travers les deux objectifs.

Regardant sur le miroir les portions de la surface qui produisoient les anneaux colorés vus sur le carton, Newton s’assura que les anneaux étoient produits par des couleurs réfléchies, propagées sous divers angles du miroir sur le carton.

En relevant la lame d’étain qui recouvroit la surface extérieure du miroir, le phénomène eut également lieu, quoique d’une manière plus foible. Un miroir de métal ne produisoit pas d’anneaux ; d’où le savant observateur conclut que ces anneaux ne provenoient point d’une seule surface spéculaire, mais qu’ils dépendoient de deux surfaces de la plaque de verre dont le miroir est composé, & de l’épaisseur des verres entre ces deux surfaces ; en effet, deux miroirs d’un même foyer, mais de différentes épaisseurs, produisirent des anneaux qui avoient des diamètres différens ; le miroir le moins épais donnoit naissance aux plus grands anneaux.

Pour s’assurer, par le calcul, que ces anneaux étoient produits par la même cause que les anneaux réfractés des objectifs, Newton mesura l’épaisseur du miroir qui avoit servi à ses expériences : il le trouva d’un quart de pouce. Supposant ensuite que la lumière brillante, transmise par chacun de ces anneaux, devoit être la lumière jaune ; sachant que la tranche d’air qui laissoit poser la couleur jaune du premier cercle dans l’expérience des objectifs devoit avoir parties d’un pouce d’épaisseur ; déterminant par les rapports des sinus d’incidence & de réfraction de l’air dans le verre, l’épaisseur, de la couche de verre qui devoit former le premier anneau jaune, & divisant un quart de pouce par ce nombre, il trouva que l’épaisseur de son miroir devoit transmettre la lumière brillante du 34386e. anneau jaune. Alors, supposant que le centre blanc des anneaux correspondoit aux autres couleurs, il a