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Il verdit le sirop de violette & brunit le papier humide de curcuma. Les animaux meurent lorsqu’ils respirent ce gaz. Il éteint les lumières ; on peut les y plonger trois ou quatre fois, & l’on remarque que la flamme s’agrandit avant l’extinction ; elle est alors jaune-pâle, & descend sur la fin jusqu’à la partie inférieure du vase. Ce gaz s’enflamme à une température très-élevée.

Sa pesanteur spécifique est de 0,000731, d’après Kirwan, à une température de 7 degrés centigrades. Il conserve son état gazeux à un froid de 48 degrés centigrades au-dessous de zéro.

Faisant passer du gaz ammoniac à travers de la glace ou de la neige, il est absorbé, & la température s’abaisse. Dans l’eau, au contraire, le liquide s’échauffe ; il diminue de densité. Trois parties d’eau peuvent absorber une partie de gaz ammoniac, ou 430 fois son volume ; ainsi, 0,096 d’ammoniaque & 0,904 d’eau ont 0,9607 de densité ; 0,159 d’ammoniaque & 0,841 d’eau ont 0,9385 de densité, & 0,260 d’ammoniaque & 0,740 d’eau ont 0,9054 de densité.

Jusqu’à présent l’ammoniaque n’a été trouvé qu’à l’état de combinaison avec les acides sulfurique, muriatique, phosphorique, acétique, carbonique dans les urines des hommes, les excrémens des chameaux, les matières animales putréfiées, & dans quelques mines d’alun.

On le retire de ses combinaisons salines avec la chaux vive ; celle-ci s’empare des acides & laisse l’ammoniaque à nu ; il se dégage sous forme gazeuse : c’est principalement du muriate d’ammoniaque qu’on l’extrait.

Berthollet[1] ayant fait passer une suite d’étincelles électriques à travers 1,27 pouces cubes de gaz ammoniac, le volume s’augmenta, & fut, après l’expérience, de 3,3 pouces cubes ; le gaz provenant de cette expérience étoit un mélange de gaz azote & hydrogène ; la proportion étoit de 9 d’azote sur 24 d’hydrogène, en négligeant les fractions.

Cette expérience, répétée avec beaucoup de soin[2], a produit quelques différences dans les résultats, parce que le gaz a été desséché avec plus de soin. On s’accorde aujourd’hui à avancer que 100 parties de gaz ammoniac occupent, après la décomposition, un volume double, contenant 50 parties de gaz azote & 150 parties de gaz hydrogène.

D’abord le gaz augmente considérablement de volume par l’action des premières étincelles, ensuite l’augmentation se ralentit & devient presqu’insensible.

On se sert, pour faire cette expérience, d’une éprouvette, fig. 97, composée d’un tube gradué : dans la partie supérieure est d’un conducteur recourbé a b c d, terminé par une boule à chaque extrémité. Ce conducteur est isolé par un petit tube vers b c. Après avoir introduit du gaz bien sec dans cet appareil, posé sur un bain de mercure, on fait entrer, par la partie inférieure, un second conducteur de fer, terminé par une boule e ; alors faisant communiquer la boule a du conducteur supérieur avec une machine électrique, on fait passer une suite d’étincelles entre les deux conducteurs, jusqu’à ce que le volume de gaz soit double. Si l’on analyse ensuite ces deux gaz avec de l’oxigène, on voit que le quart est du gaz hydrogène, & les du gaz azote.

Soumis à l’action d’une chaleur rouge-cerise, & passant à travers un tube de porcelaine, l’ammoniaque n’éprouve aucune décomposition. Le gaz recueilli dans un vase, & exposé ensuite à l’action de l’eau, y est entièrement absorbé ; mais si l’on met de l’oxide de manganèse dans le tube, alors on obtient, dans un vase vide d’air, du nitrate d’ammoniaque, & l’oxide perd tout son oxigène. Ici l’azote & l’hydrogène contenus dans une portion de l’ammoniaque se combinent avec l’oxigène de l’oxide, & génèrent de l’acide nitrique & de l’eau ; l’ammoniaque non décomposé se combine avec l’acide nitrique & produit du nitrate d’ammoniaque.

Austin annonce qu’il se forme de l’ammoniaque par l’azote de l’acide nitrique & l’hydrogène de l’eau décomposée, en humectant de l’étain avec de l’acide nitrique, & que l’on peut reconnoître cet ammoniaque par la présence de la chaux. Il dit encore que l’on peut composer de l’ammoniaque en mettant dans une cloche de l’azote & de la limaille de fer humectée d’eau, parce que l’hydrogène de l’eau décomposée par le feu, se combine avec l’azote libre.

L’ammoniaque[3] est la base des linimens volatils, tel que celui de Fuller, composé de 3 onces d’huile d’olive, un gros d’ammoniaque, 20 grains de camphre dissous dans 4 gros d’eau thériacale. Ce liniment est employé dans les douleurs rhumatismales, dans la paralysie, les fausses ankiloses, les humeurs froides, l’artrodinye ; mais ce qu’on nomme communément, en pharmacie, liniment volatil, est un simple mélange d’huile & d’ammoniaque.

Il est stimulant lorsqu’il est employé à l’état liquide dans les cas de syncope ou d’asphyxie, pour rappeler à la vie en exhalant les propriétés vitales : on le fait respirer aux malades.

Delassonne recommande l’usage intérieur de l’ammoniaque, à la dose de cinq à six gouttes dans un verre d’eau, comme un spécifique contre la rage. Malgré tous les faits qu’on a cités, il n’est pas encore permis d’y croire.

Affoibli & long-temps appliqué sur des tumeurs produites par des engorgemens laiteux ou glanduleux, l’ammoniaque est, dans quelques cir-

  1. Journal de Physique, année 1786, tom. II, pag. 178.
  2. Chimie de Thenard, tom. I, pag. 114.
  3. Dictionnaire de Médecine, tome I, pag. 467.