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balance. Cet acide doit ensuite servir d’étalon pour éprouver les diverses potasses du commerce dont on veut connoître les quantités de matières alcalines.

Cette donnée une fois établie, on fait dissoudre, dans une quantité d’eau suffisante, une masse quelconque, mais connue, de la potasse que l’on desire essayer ; l’on verse ensuite, dans cette dissolution, de l’acide nitrique étalon, jusqu’à ce que les dernières gouttes ne produisent plus sensiblement d’effervescence. Lorsqu’on est arrivé à ce point, on chauffe quelques instans la liqueur sans la faire bouillir, afin de chasser l’acide carbonique qui y est resté combiné ; on mêle quelques gouttes de la liqueur dans un peu de teinture de tournesol, pour voir s’il n’y a pas un excès d’acide ; on en mêle aussi avec la teinture de violette ; & si elles ne changent point, c’est un signe certain qu’on a saisi exactement le point de saturation ; si le contraire arrivoit, il faudroit ajouter de la liqueur, & vice versâ.

Il ne s’agit plus alors, pour connoître les quantités absolues d’alcali contenues dans la potasse, que de comparer la quantité d’acide absorbée dans cette opération, avec celle qui a été nécessaire à la saturation de la potasse pure employée pour servir de base.

Pour l’exactitude des résultats, il est essentiel que l’acide ne soit pas trop concentré, parce qu’alors il seroit plus difficile d’arriver à la saturation parfaite. Celui dont Vauquelin s’est servi avoit 20 degrés à l’aréomètre de Baumé, & sa densité étoit à celle de l’eau :: 1145 : 1000.

Si l’on vouloit essayer des soudes, il faudroit faire l’épreuve de l’acide sur de la soude purifiée à l’alcool ; mais dans ce cas il seroit plus convenable d’employer de l’acide muriatique que de l’acide nitrique, parce que le premier se combine plus facilement avec la soude.

Rien de plus simple maintenant que d’obtenir des résultats exacts avec l’alcalimètre de Decroisil. Il faudroit pour cela, 1o. saturer toute la dissolution alcaline, après en avoir séparé le résidu, de manière que de nouvelle eau ne puisse plus en retirer d’alcali ; 2o. lui donner une graduation qui indique les quantités d’alcali réel ou d’alcali purifié à l’alcool, contenues dans le sel essayé.

Mais comme il faut des proportions différentes du même acide pour saturer des quantités égales de potasse & de soude, on voit qu’il faudroit deux graduations différentes, l’une appliquée à la potasse, l’autre à la soude.

On obtiendra facilement cette graduation en saturant une quantité donnée de potasse & de soude, & déterminant quelle quantité de liqueur d’épreuve il faut pour saturer des décigrammes de l’un & de l’autre des alcalis, graduant ensuite, en versant dans le tube des poids successifs de la liqueur ; mais il est bon de porter cette graduation jusqu’à cent, afin de pouvoir éprouver des alcalis purs.

Cela fait, on dissolvera un décagramme de sel ; on en séparera, par le lavage & la filtration, tout l’alcali du résidu, & l’on conservera tout le liquide obtenu ; alors on jugera de la quantité d’alcali contenue par celle de l’acide employé pour saturer.

Kirwum a proposé[1] de déterminer les quantités respectives des parties alcalines par le poids des précipités qu’elles produisent ; pour cela, il dissout dans l’eau des masses égales de ces alcalis, d’abord pour en séparer les matières terreuses qui sont insolubles, & il ajoute à la liqueur une dissolution d’alun, jusqu’à ce qu’il ne se forme plus de précipité, & que la liqueur manifeste un léger exces d’acide ; il lave ensuite le dépôt & le fait chauffer jusqu’au rouge, pour en chasser l’eau & l’acide carbonique qui y sont combinés.


ALCARAZAS, subst. fémin. ; alcaraza ; alcaraza. Vase poreux employé en Espagne, en Égypte, dans les Indes, la Perse & la Chine, pour faire rafraîchir, par l’évaporation, les liquides qu’ils contiennent.

Ce sont des espèces de cruches de 32 centimètres de haut, 16 centimètres de large, dont le col est plus étroit que le corps du vase, & qui ont un évasement à leur sommet.

On croit que les Maures en ont porté l’usage en Espagne. Volney, dans son Voyage d’Égypte, parle de vases de terre qui ont la même propriété, & qui sont très-communs sur la côte d’Afrique. Les meilleurs alcarazas viennent encore d’Anduxar, ancienne ville de l’Andalousie, qui fut long-temps sous la domination des Maures.

L’alcaraza bien fabriquée est poreuse ; l’eau que l’on y verse, transsude & couvre promptement toute la surface extérieure. Si on l’expose à l’air libre, ou mieux encore à un courant d’air, l’eau qu’elle contient se rafraîchit en peu de temps, & à un degré si sensible, qu’à Madrid, en été, le thermomètre marquant 30 degrés à l’ombre, l’eau des alcarazas descendoit à la température de l’eau conservée long-temps dans les caves.

Il existe d’autres alcarazas dont la terre est rouge, & qui donnent à l’eau un goût argileux désagréable. Quoique ces vases soient moins poreux & rafraîchissent moins, ils sont cependant recherchés par les femmes de Madrid ; quelques-unes même pilent les fragmens de ces vases & en mêlent la poudre au tabac. Les filles ont un attrait particulier pour cette espèce de poterie ; elles en mangent lorsqu’elles ont les pâles couleurs.

Puisque tous les liquides, en s’évaporant, absorbent une quantité considérable de calorique qu’ils enlèvent aux corps qu’ils touchent, on conçoit que l’eau qui s’infiltre à travers les pores des alca-

  1. Annales de Chimie, tom. XVIII, pag. 179.