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acide chlorique, en se décomposant, se transforme en chlore & en oxigène. Le volume des gaz que l’on obtient est à celui qu’occupoit l’acide : : 6 : 3. De 50 parties de gaz ainsi décomposé, on retire en volume 40 parties de gaz chlore, & 20 de gaz oxigène.

Pour obtenir cet acide, on met dans une fiole cinq à six parties de muriate suroxigéné avec trois à quatre parties d’acide muriatique ; on adapte au col de la fiole un tube recourbé, on la place sur un fourneau, & on la chauffe légèrement. Par ce moyen le muriate suroxigéné se décompose peu à peu, & on obtient, d’une part, du deuto-muriate de potassium qui est en dissolution dans la liqueur, & d’autre part, du gaz acide chlorique mêlé d’un peu de gaz chlore. On recueille ces gaz sur le mercure, & on les laisse en contact avec le métal pendant plusieurs heures, jusqu’à ce que l’on juge que le chlore soit absorbé.

Berthollet, à qui l’on doit la découverte des muriates suroxigénés, démontre que ces sels devoient être formés d’acide muriatique oxigéné & de base salifiable. Chenevix, dans son analyse du muriate oxigéné de potasse, recueillit le gaz oxigène, & examina le résidu de la cornue ; il crut pouvoir déterminer que 100 parties de sel contenoient 58,3 d’acide muriatique oxigéné, consistant en 20 d’acide muriatique, & 38,3 d’oxigène ; d’où il suit que 100 parties d’acide chlorique seroient composées de

16 d’oxigène.
84 d’acide muriatique.
____
100

D’après Thenard, sa composition doit être de

36,5 d’oxigène.
63,5 d’acide muriatique.
____
100

Il paroît que Davy est le premier qui soit parvenu à isoler cet acide. On croyoit même qu’il ne pouvoit exister qu’en combinaison avec d’autres corps.

ACIDE FLUOBORIQUE ; acidum fluoboricum ; fluoborische’sauer. Combinaison des acides borique & fluorique nouvellement découverte par Gay-Lussac & Thenard.

Cet acide s’obtient sous forme de gaz. Ce gaz[1] est absolument sans couleur ; son odeur est piquante, & ressemble à celle de l’acide muriatique ; on ne peut le respirer sans être suffoqué ; il éteint sensiblement les corps en combustion, & rougit avec l’énergie la plus puissante les couleurs bleues végétales. Lorsqu’on le met avec l’air contenant de l’eau hygrométrique, il en résulte des vapeurs aussi épaisses que celles que forment ensemble le gaz acide muriatique & le gaz ammoniac. Sa pesanteur spécifique est de 2,371. Cent pouces cubes pèsent 73,5 grains.

Il diffère du gaz fluorique, en ce qu’il n’a aucune action sur le verre ; il en a au contraire une très-grande sur les matières végétales & animales ; il les attaque avec autant de force que l’acide sulfurique concentré, & paroît agir sur ces matières comme cet acide, en déterminant une formation d’eau, car il les carbone ; aussi transforme-t-il facilement l’alcool en un véritable éther, & noircit-il sur-le-champ le papier le plus sec, en répandant des vapeurs dues à l’eau qui se forme, & par laquelle il est absorbé ; cependant on peut le toucher sans se brûler.

Exposé à l’action d’une très-haute température, il ne se décompose point ; il se condense par le froid sans changer d’état. Lorsqu’on le met en contact avec le gaz oxigène ou l’air, soit à froid, soit à chaud, il n’éprouve aucune sorte d’altération ; seulement il s’empare, à la température ordinaire, de l’humidité que ces gaz peuvent contenir, se liquéfie, & donne naissance à des vapeurs extrêmement épaisses. Il se comporte de la même manière avec tous les gaz qui contiennent de l’eau hygrométrique : pour peu qu’ils en contiennent, il y produit des vapeurs très-sensibles. On peut donc l’employer, avec beaucoup de succès, pour savoir si un gaz est sec ou humide.

Aucun corps combustible non métallique, simple ou composé, n’attaque le gaz acide fiuoborique. Parmi les métaux anciennement connus, aucun ne décompose l’acide fluoborique. On n’a encore opéré de décomposition qu’en le traitant par le potassium & le sodium : ces deux métaux nouveaux, à l’aide de la chaleur, brûlent dans le gaz fluoborique, presque comme dans le gaz oxigène. Du bore & du deuto-fluate de potasse sont les produits de cette décomposition ; d’où il résulte que ce métal s’empare de l’oxigène de l’acide borique, qu’il met le bore à nu, s’oxide & se combine avec l’acide fluorique.

Pour obtenir ce gaz acide, on prend une partie[2] d’acide borique vitrifié & deux parties de fluate de chaux ; après les avoir réduites en poudre dans un mortier de fer ou de laiton, on les mêle intimement dans une fiole avec douze parties au moins d’acide fluorique concentré ; puis on adapte un tube recourbé au col de la fiole ; on la place, par le moyen d’un gril, sur un fourneau ; on la chauffe peu à peu : bientôt le gaz fluoborique se produit, chasse l’air, & apparoît sous forme de vapeur très-épaisse ; on le recueille sur le mercure. Il n’est pur que lorsque l’eau peut l’absorber entièrement & subitement ; il y est excessivement soluble.

  1. Recherches physico-chimiques de Gay-Lussac & Thenard, tom. II, pag. 37.
  2. Annales de Chimie, tom. LXXXVI, pag. 178.