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fortement cet acide, il se dégage du gaz oxigène, & une partie repasse à l’état d’oxide blanc.

Six parties d’eau, à la température de l’atmosphère, dissolvent lentement une partie d’acide arsenique. Dans deux parties d’eau bouillante, il se dissout presqu’instantanément. Cette solution retient l’acide, même en faisant évaporer une grande quantité d’eau. Lorsqu’il ne reste plus que la moitié du poids de l’acide, la dissolution prend une consistance sirupeuse ; en poursuivant l’évaporation, il se dépose des cristaux sous la forme de grains.

Cet acide est un des plus violens poisons que l’on connoisse. Les symptômes qui caractérisent ses ravages[1] sont, une saveur austère, un resserrement du gosier, un ptyalisme, des vertiges & des douleurs atroces d’estomac ; les lèvres, la langue, le palais & la gorge s’enflamment ; le malade éprouve une fièvre ardente, une soif inextinguible, quelquefois des nausées, le hoquet, des palpitations suivies d’une grande prostration de forces ; la respiration devient difficile, la face prend une teinte livide, le corps s’enfle, les extrémités deviennent insensibles ; l’haleine est infecte, les déjections sont fétides, l’urine est sanguinolente, le délire s’empare du malade ; il pousse des soupirs, il a des syncopes fréquentes, il meurt.

Dès qu’une personne se trouve empoisonnée par l’arsenic, le premier soin que l’on doit prendre est de provoquer le vomissement sans employer les émétiques irritans ni l’huile, mais en faisant boire au malade du lait, de l’eau de gruau, de l’eau de graine de lin & une décoction de racine de guimauve, & en chatouillant le pharynx. On peut aussi employer les sulfures alcalins ou l’hydrogène sulfuré, pour neutraliser les effets de l’arsenic ; mais ces deux substances opèrent difficilement, lorsque l’arsenic a été pris sous forme sèche.

Quelqu’effroyables que soient les effets de l’acide arsenique, il n’en est pas moins employé en petite dose en médecine, dans les fièvres intermittentes, dans les maladies de peau, dans plusieurs maladies invétérées. Pour cela, on met un grain de cet acide dans une once d’eau ; & l’on boit chaque matin un gros de cette eau, ce qui porte à un huitième de gros la quantité d’arsenic que l’on prend.

L’acide arsenique est employé dans les arts : combiné avec la potasse, il fait un mordant très-utile pour fixer la garance sur les toiles de coton : on s’en sert aussi dans les verreries pour rendre le verre opaque ; il entre dans la composition de quelques vernis. On mélange cet acide avec de la farine, des amandes pilées, du vieux fromage ou de la graisse, pour former de la mort-aux-rats.

Bucholz prépare l’acide arsenique en dissolvant 8 parties d’oxide blanc d’arsenic dans 2 parties d’acide muriatique à 1,20, & 24 parties d’acide nitrique à 1,25 ; il fait bouillir le mélange jusqu’à ce que l’oxide soit dissous & qu’il ne se dégage plus de gaz nitreux. Il fait ensuite évaporer sa dissolution dans un creuset, & lorsque la matière est sèche, il fait rougir le creuset ; il ne tient que très-peu de temps la matière au feu, parce qu’une chaleur trop forte & long temps continuée décompose une partie de l’acide arsenique ; & il passe à l’état d’oxide blanc.

Pendant l’opération, l’oxide blanc d’arsenic augmente, d’après Proust, de 0,15 de son poids, & d’après Bucholz, de 0,16. Cette coïncidence de résultat est aussi parfaite qu’il est possible de le desirer dans des expériences d’une nature aussi délicate ; & comme tout prouve que c’est de l’oxigène qui s’est combiné à l’oxide d’arsenic dans cette expérience, il s’ensuit que l’acide arsenique est composé d’environ

86,5 d’oxide blanc d’arsenic.
13,5 d’oxigène.
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Mais comme l’oxide d’arsenic contient à peu près 0,25 d’oxigène, il s’ensuit que l’acide arsenique contient, d’après les expériences de Proust & de Bucholz,

65 d’arsenic.
35 d’oxigène.
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Les mêmes résultats ont aussi été trouvés par Rose ; cependant Berzelius porte la proportion de ses composans à :

48,571 d’arsenic.
51,428 d’oxigène.
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ACIDE BENZOÏQUE ; acidum benzoicum ; benzoe sœure. substance acide que l’on retire du benjoin.

Cet acide est ordinairement en poudre blanche & légère, qui a une espèce de flexibilité. Lorsqu’il est obtenu par sublimation, il forme des prismes ou des aiguilles flexibles & soyeuses. Vauquelin, laissant refroidir lentement une dissolution aqueuse de cet acide, après l’avoir concentrée, obtint l’acide benzoïque cristallisé en belles lames.

Sa saveur est âcre, chaude & un peu amère ; son odeur est foible, quelquefois aromatique, ce qui provient, sans doute, d’un peu d’huile volatile qu’il retient ; car, suivant Gièse, lorsque l’acide est pur, il est sans odeur. L’acide benzoïque n’altère pas sensiblement le sirop de violettes, mais il rougit fortement la teinture de tournesol.

Hassenfratz a trouvé sa pesanteur spécifique de

  1. Dictionnaire des sciences médicales, tom. II, pag. 208 & 209.