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ARD-ARÉ
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trois pouces, & d’un foyer beaucoup plus court. Ayant expoſé au foyer un grand nombre de fois de l’or très-fin & très-pur, en le mettant ſucceſſivement ſur des ſupports de différente nature, tels que des creuſets d’argille réfractaire, des teſſons de poterie de grès, de porcelaine pure, crue ou cuite, de pierre de grès très-réfractaire, & de charbon ; ils obtinrent, dans preſque toutes ces épreuves, des vitrifications de couleur brune pourprée à la ſurface de ce métal ; néanmoins ils n’osèrent pas d’abord aſſurer poſitivement que ces vitrifications fuſſent dues à une portion de la ſubſtance même de l’or.

Ces académiciens obſervèrent encore, 1o. un cercle de couleur rouge pourprée ſur le ſupport de l’or, qu’ils obtinrent toujours de quelque nature que fût ce ſupport ; 2o. une fumée très-ſenſible, ſortant certainement de ce métal, de même que de l’argent, & s’élevant quelquefois juſqu’à cinq ou ſix pouces, & qui ſûrement n’eſt au moins en partie, qu’une portion de ces métaux même, réduits, dans l’état vaporeux, puiſqu’une lame d’argent fut très-bien dorée à cette seule fumée de l’or, de même qu’une lame d’or a été argentée à celle de l’argent ; 3o. une rotation rapide de petits globes d’or & d’argent fondus au foyer qui leur parurent aſſez conſtamment dans les ſens où elle devoit être, en ſuppoſant qu’elle eût pour cauſe une impulſion des rayons ſolaires ; 4o. des faits importans ſur les chaux & terres ferrugineuſes. Aucune de celles de ces ſubſtances qui furent expoſées au foyer ne ſe convertit en verre transparent, mais fut fondue en matière opaque de couleur de fer ; & ce qu’il y a ſur-tout de remarquable, c’eſt que toutes ces terres ferrugineuſes, ſoit qu’elles fuſſent naturellement inaltérables par l’aimant, ſoit qu’elles euſſent été rendues telles par les opérations chimiques les plus efficaces pour les dépouiller de principe inflammable ; & enfin, quoique placées ſur des ſupports de pierre de grès bien pur, bien calciné & incapable de leur fournir aucune matière inflammable, ont éprouvé une eſpèce de réduction de leur partie métallique & ſont devenues conſtamment très-attirables à l’aimant par la ſeule action du foyer ; 5o. une multitude d’autres effets ſinguliers & inattendus de végétations, de cryſtalliſations, de vitrifications, que leur ont préſentés un grand nombre de pierres, de foſſiles & de minéraux mis en expérience. Les loupes ou lentilles à eau, sont encore plus fortes que les verres ardens. Voyez Lentille à eau, Dioptrique. Verre.

Ardent, ſignifie quelquefois une ſorte de météore ignée qui reſſemble à une lampe allumée. Voyez Météore & Feu-follet.

ARE

ARÉOMÈTRE. Ce mot qui vient du grec, ainſi qu’un grand nombre de ceux qui ſont relatifs aux ſciences, eſt dérivé d’αραιός tenuis, & de μετρον, menſura, & il déſigne un inſtrument de phyſique qui est propre à meſurer la denſité ou peſanteur ſpécifique des fluides. On penſe aſſez communément que l’aréomètre fut inventé vers la fin du quatrième ſiècle, par Hypatie, fille de Theon, ſelon que nous l’apprend Sineſius Cyrénée dans ſa quinzième lettre. Les anciens appeloient cet inſtrument baryllion ou hygrobaroſcope ; & ceux qui par état meſuroient chez les Romains, le poids des eaux, étoient appelés baryliſtes & baryniles. Quelques-uns ont donné le nom d’hygromètre à l’aréomètre ; mais cette dénomination doit être ici rejetée, parce que ce nom eſt conſacré à ſignifier un inſtrument bien différent, & dont nous parlerons au mot Hygromètre. C’eſt ſur-tout dans l’étude des ſciences qu’on doit obſerver de ne jamais exprimer le même objet par différens noms, ni de déſigner diverſes choſes par les mêmes termes.

L’aréomètre eſt repréſenté dans la figure 262 ; il eſt compoſé d’une boule Α, ſurmontée par un tube C D, & terminée en bas par un petit tube intermédiaire & une boule B, dans laquelle il y a du mercure, afin que l’inſtrument puiſſe ſe tenir verticalement, lorſqu’il eſt plongé dans un fluide, ſon centre de gravité étant de beaucoup au-deſſus du centre de figure, & vers la partie inférieure. Cet inſtrument se fait ordinairement avec du verre ſoufflé à la lampe de l’émailleur. D’autre fois on le fabrique en métal. Le tube eſt diviſé ſelon ſa longueur, en différentes parties, ſoit par de petits boutons de verre qu’on y a ſoudés, ſoit par un tuyau de papier ſur la circonférence duquel on a marqué une graduation convenable. Le haut du tube eſt fermé hermétiquement ; on peut le terminer en anneau, afin de pouvoir le ſuſpendre commodément.

Cet inſtrument étant plongé dans une liqueur, ne s’y enfonce pas en entier, parce qu’en le conſtruiſant, on a eu ſoin de le faire un peu plus léger qu’un égal volume de la liqueur qu’il déplace. Conſéquemment on peut, par ſon moyen, évaluer la peſanteur d’un fluide, en obſervant ſur les degrés de la graduation, le plus ou le moins de profondeur à laquelle l’aréomètre deſcend. Il deſcend davantage dans un fluide moins denſe, & conſéquemment plus léger : au contraire, il deſcend moins dans un fluide plus peſant, & qui a plus de denſité. Si, par exemple, cet inſtrument s’enfonce dans l’eau juſqu’en C, il pourra, mis dans l’eſprit-de-vin, deſcendre juſqu’en D ; & de même s’arrêter au point du milieu entre C & D, s’il eſt plongé dans une liqueur dont la denſité ou peſanteur ſpécifique ſoit moyenne entre l’eau & l’eſprit-de-vin.

[ En effet, c’eſt une loi générale, qu’un corps peſant s’enfonce dans un fluide, juſqu’à ce qu’il occupe dans ce fluide, la place d’un volume qui lui ſoit égal en peſanteur ; de-là il s’enſuit que