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les espèces peuvent se multiplier ? Je réponds i | f ou plutôt la nature répond elle-même, jusqu’à c - ce que nous ayons assez de classes pour nous régler dans l’usage des choses relatives à nos bec soins : & la justesse de cette réponse est sensible , c puisque ce^ sont nos besoins seuls qui nous dé- ì terminent à distinguer des classes, puisque nous f n’imaginons pas de donner des noms à des choses c dont nous ne voulons rien faire. Au moins est-ce I ainsi que les hommes se conduisent natutellement. > II est vrai que lorsqu’ils s’écartent de la natute pour < devenir de mauvais philosophes, ils croient qu’à < force de distinctions auffi subtiles qu’inutiles, ils expliqueront tout, & ils brouillent tout. 1 Tout est distinct ; dans la nature ; mais notre ’ esprit est trop borné pour la voir en détail d’une ’ manière distincte. En vain nous analysons ; ìl reste ’ toujours des choses que nous ne pouvons ana- 1 lyscr, & que , par. cette raison, nous ne voyons que confusément. L’art de classer, si nécessaire ’ pour se faire des idées exactes, n’éclaire que les ’ points principaux

les intervalles restent dans

’ r.obscurité, & dans ces intervalles, les classes mitoyennes se confondent. Un arbre , par exemple , & un arbrisseau sont deux espèces bien distinctes. Mais un arbre peut être plus petit, un arbrisseau peut être plus grand ; & Ton arrive à une plante qui n’est ni arbre ni arbrisseau , Ou qui est tout-à-la-fois l’un & l’autre ; c’est-à-dire , qu’on ne fait plus à quelle espèce la rapporter. Ce n’est pas là un inconvénient : car demander si cette plante est un arbre ou un arbrisseau, ce n’est pas, dans le vrai, demander ce qu’elle est 5 c’est seulement demander si nous devons lui donner le nom d’arbre , ou celui d’arbrisseau. Or il importe peu qu’on lui donne l’un plutôt que l’autre : si elle est utile, nous nous en servirons & nous la nommerons plante. On n’agiterait jamais de pareilles questions, si Ton ne fupposoìt pas qu’il y a dans la nature comme dans notre esprit, des genres 8c des espèces. Voilà Tabus qu’on fait des classes : il le falloit connoître. II nous reste à obserrer jusqu’où s’étendent nos connoissances , lorsque nous classons les choses que nous étudions. Dès que nos sensations sont les seules idées que nous ayons des objets sensibles, nous ne voyons en eux que ce qu’elles représentent

au-

delà nous n’appercevons rien, & par conséquent nous ne pouvons rien connoître. II n’y a donc point de réponse à faire à ceux qui demandent, quel est le sujet des qualités du corps ? quelle est fa nature ? quelle est son essence ? Nous ne voyons pas ces sujets , ces natures, ces essences : en vain même on voudroit nous les montrer, ce seroit entreprendre de faire voir | des couleurs à des aveugles. Ce sont-Ià des mots dont nous n’avons point d’idées ; ils signifient Encyclopédie. Logique & métaphysique. Tant. I feulement qu’il y a sous les qualités quelque chose que nous ne connoissons pas. L’analyse ne nous donne des idées exactes, qu’autant qu’elle ne nous fait, voir dans les choses que ce qu’on y voit ; tk il faut nous accoutumer à ne voir que ce que nous voyons. Cela n’est pas facile au commun des hommes, ni même au commun des philosophes. Plus on est ignorant, plus on est impatíent’de juger : on croit tout savoir avant d’avoir rien observé ; tk Ton dirait que la connoissance de la nature est une espèce de divination qui se fait avec des mots. Les idées exactes que Ton acquiert par l’analyse , ne sont pas toujours des idées complettes : elles ne peuvent même jamais Têtre , lorsque nous, nous occupons des objets sensibles. Alors nous ne découvrons que quelques qualités , 8c nous ne pouvons connoître qu’en partie. Nous feroirc Tétude de chaque objet de la même manière que nous faisions celle de cette campagne qu’on voyoit des fenêtres de notre château : car il y a dans chaque objet, comme dans cette campagne, des choses principales auxquelles toutes les autres doivent se rapporter. C’est dans cet ordre qu’il les faut saisir , si Ton veut se faire des idées distinctes & bien Ordonnées. Par exemple, tous les phénomènes de li nature supposent Tétendue 8c le mouvement t toutes les fois donc que nous voudrons en étudier quelques - uns, nous regarderons Tétendue. & le mouvement comme les principales qualités des corps. Nous avons vu comment l’analyse nous fait connoître les objets sensibles, & comment les idées qu’elle nous en donne sont distinctes 8 : conformes à Tordre des choses. II faut se souvenir que cette méthode est Tunique, & qu’elle doit être absolument la même dans toutes nos études : car étudier des sciences différentes, ce n’est pas changer de méthode, c’est seulement appliquer la même méthode à des objets différens, c’est refaire ce qu’on a déjà fait ; & le grand point est de le bien faire une fois, pour le savoir faire toujours. Voilà, dans le vrai, où nous en étions, lorsque nous avons commencé. Dès notre enfance, nous avons tous acquis des connoissances : nous avons donc suivi à notre insu une bonne méthode. II ne nous restoit qu’à le remarquer, c’est ce que nous ayons fait ; & nous pouvons désormais appliquer cette méthode à de nouveaux ’ objets. Des idées des choses qui ne tombent pas fous . les sens. En observant les objets sensibles, nous noirs élevons naturellement à des objets qui ne tombent pas fous les sens, parce que, d’après les effets qu’on voit, on juge des causes qu’on aç voit pas. „ l yPPP.