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moins éclairé. C’est avec ces facultés qu’elles
exécutent les intentions
de la nature,qu’elles
servent à l’ornement de Tunivers,
«Sc qu’elles
accomplissent la volonté, inconnue pour nous,
que le créateur euten les formant. (Ane. Encyc.)
JUGEMENT,
f, m. Les facultés intellectuelles
n’ayant p^s été seulement données à Thomme
pour la spéculation , mais auffi pouf Ia conduite
de fa vie, Thomme seroit dans un -triste état,
s’il ne pouvoit tirer du secours-, ’pour cette direction,
que des choses qui sont fondées fur la
certitude d’une véritable connoissance ; car cette
espèce de connoissance étant resserrée dans des
bornes fort étroites,
comme nous avons déjà
vu , il se trouveroit
souvent dans de parfaites
ténèbres, ôc tout-à-fait
indéterminé dans_ la
plupart des actions dé fa vie, s’il n’avoit rien
pour se conduire , dès qu’une connoissance claire
ôc certaine viendroit à lui manquer. Quiconque
ne voudra manger qu’après avoir vu démonstrativement
qu’une telle viande le nourrira , «Sc
quiconque ne voudra agir qu’aptes avoir connu
infailliblement
que Taffaire qu’il doit entreprendre
sera suivie d’un heureux succès, n’aura guères
autre chose à faire qu’à se tenir en repos ôc à
périr en peu de temps.
C’est pourquoi,
comme Dieu a exposé certaines
choses à nos yeux avec une entière évidence ,
ôc qu’il nous a donné quelques connoissances
certaines, quoique réduites à un très-petit
nombre,
en comparaison de tout ce que
les créatures intellectuelles peuvent comprendre,
Sc dont celles-là font apparemment comme des
avant-goûts,
par où il nous veut porter à désirer
Ôc à rechercher un meilleur état ; il ne nous
a fourni auffi, par rapport à la plus grande partie
des choses qui regardent nos propres intérêts,
qu’une lumière obscure , ôc un simple crépuscule
de probabilité,
si j’ose m’exprimer ainsi, conforme
à Fétat de médiocrité 8c d’épreuve où il
lui a plu de nous mettre dans ce monde ; afin
de réprimer par-là notre présomption «Scla confiance
excessive que nous avons en nous-mêmes,
en nous faisant voir sensiblement, par une expérience
journalière,
combien notre esprit est
borné ôc sujet à Terreur, vérité dont la conviction
peut nous être un avertissement continuel
d’employer les jours de notre pèlerinage à
chercher Sc à suivre avec tout le soin ôc toute
Findustrie dont nous sommes capables , le chemin
qui peut nous conduire à un état beaucoup
plus parfait ; car rien n’est plus raisonnable que
de penser , quand bien la révélation sc tairoit
sur cet article, que, selon que les hommes font
valoir les talens que Dieu leur a donnés dans
m monde,.
ils recevront leur récompense sur la
fin du jour, lorsque le-soleil sera couché pour’
eux, Sc que la nuit aura terminé leurs travaux."’
La faculté que Dieu a donnée à Thomme poursuppléer
au défaut d’une connoissance claire’ ôc"
certaine dans des cas où Ton ne peut l’obtenir ;
1
c’est le jugement, par où l’esprit suppose que ses’
idées conviennent
ou disconviennent-,
ou,ce
qui est la même chose,-qu’une
proposition
est’
vraie ou fausse, sens appercevoir uiié évidence’
démonstrative dans les preuves.’
L’esprit met sou-
1
vent en usage ce jugement par nécessité, dans
des rencontres où l’on ne peut avoir de preuves
démonstratives Ôc une connoissance certaine ; ôc’
quelquefois
aussi il y a recours par négligence’
faute d’adresse , ou par précipitation , lors même
qu’on peut trouver des preuves démonstratives
«St certaines. Souvent ses hommes ne s’arrêteot 1
pas pour examiner avec soin la convenance ou
la disconvenance de deux idées qu’ils souhaitent
’
ou qu’ils sont intéressés de connoître ; mais incapables
du degré d’attention qui est requis dans
une longue fuite de gradations,
ou’ de différer 1
quelque temps à sc déterminer ;
ils jettent légèrement
les yeux dessus , ou
"négligent entièrement
d’en chercher les preuves : «Sc ainsi fans :
découvrir la démonstration,
ils décident de là-’
convenance ou de la difeonvenance de deux idéesJ
à vue de pays, si j’ose ainsi dire ; «Sccomme elles
paroissent considérées en éloignement,
supposant
qu’elles conviennent ou disconviennent,
selon
qu’il leur paroît plus vraisemblable,
après un
si léger examen. Lorsque cette faculté’s'exerce
immédiatement fur les choses, on îa nomme jugement ;
ôc lorsqu’elle roule sur des vérités exprimées
par des paroles , on Fappelle plus communément
astentiment ou dissentiment ; ÔC comme
c’est-là la voie la plus ordinaire dont l’esprit a-’
occasion d’employer cette faculté ; j’en parlerai
sous ces noms-là, comme sujets à équivoque dans
notre langue.
Ainsi l’esprit a deux facultés qui s’exercent fur
Ia, vérité «Scfur la fausseté.
La première est la connoissance par où l’esprit 1
apperçoit certainement,ôc
est indubitablement’
convaincu de la convenance ou de la- difcon-’
venance qui est entre deux idées.
La seconde est le jugement qui consiste à joindre
des idées dans l’esprit,
ou à les séparer Tune
de l’autre, lorsqu’on ne voit pas qu’il’y ait en- 1
tr’elles une convenance ou une disconvenancecertaine,
mais qu’on le présume ; c’est-à-dire,
selon ce qu’emporte ce mot, lorsqu’on le prend 1
ainsi avant qu’il paroisse certainement. Et si Tes-’
prit unit ou sépare les idées, selon qu’elles font’
dans la réalité des choses, c’est un jugement droit,
’
( LOK , Entend, hum. )