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EFFET (CAUSE & EFFET.) Tous les objets dont la raison humaine se propose la recherche, se divisent naturellement

en deux classes ;" la pre-

mière comprend les relations des idées, 8c Ia seconde les choses de fait. Ala première appartiennent toutes les propositions de Géométrie, d’Algèbre 8c d’Arithmétique,

toutes celles en un

mot qui font ou intuitivement,

ou démonstrati-

vement certaines. Dire que le quarréde l’hypotenus est égal aux quarrés des deux côtés, c’est exprimer une relation entre des figures. Dire quetrois fois cinq font égaux à la moitié de trente, c’est en exprimer une entre.des nombres. Les propositions .

de ce genre se découvrent par de simples opérations de Ia pensée , 8c ne dépendent en rien des choses qui existent dans l’univers. N’y eût-il ni cercle, ni triangle dans la nature , les théorèmes démontrés par Èuclide n’en conserveroient pas moins leur évidence 8c leur éternelle vérité. Ce n’est pas ainsi que s’établit la certitude des chosesde fait, qui composent la seconde classe des objets fur lesquels la raison s’exerce : quelque grande que puisse être cette certitude, elle est

d’une nature différente. Le contraire de chaque fait demeure toujours possible ; 8c ne pouvant jamais impliquer contradiction

, l’esprit le con-

çoit aussi distinctement &C auffi facilement que s’il étoit vrai & conforme à la réalité. Le soleil se lèvera, 8c le soleil ne selèvera pas, font deux propositions également intelligibles 8c aussi peu contradictoires l’une que l’autre. On entreprendroit en vain de démontrer Ia fausseté de la dernière : si elle étoit démonstrativementfausse, elle

impliqueroitcontradiction,

8c l’esprit ne pourroit

jamais se la représenter d’une manière distincte. S’il- y a donc une évidence qui nous certifie les existences réelles , & fur laquelle reposent les choses de fait, qui ne font ni présentes aux sens ni enregistrées dans la mémoire, fa nature est

un objet très-propre à exciter notre curiosité. On ne trouve pas que ni les anciens ni les modernes se soient fort appliqués à cultiver cette branche de la Philosophie ; 8c cela doit rendre d’autant plus excusables le ’doutes 8c les erreurs où nous _

pourrons tomber en travaillant à une tâche auffi importante , en nous engageant fans guide 8c fans conseil d ;Ls des sentiers auffi raboteux. Ces doutes même8#fces erreurs peuvent devenir utiles en servant à rallumer en nous le désir de conno ítre , & en y détruisant cette sécurité 8c çette foi implicite,

qui sont si funestes au raisonnement & à la liberté de penser. S’il arrive que nous découvrions des défauts dans Ia Philoso- "

Encyclopédie. Logique t> métaphysique, Tom, 1 phie commune , je pense que cette découverte ; loin de nous abattre , nous animera plutôt à tenter d’arriver à quelque chose de plus parfait 8c de plus satisfaisant.

Les raifonnemens

que nous formons fur les

choses de fait paraissent avoir tous pour fondement Ia relation qui a lieu entre les causes & les effets. Elle est en effet la feule qui puisse nous transporter au-delà de l’évidence qui accompagne les lens 8c la mémoire. Demandez à un homrríe pourquoi il croit un fait qui se passe dans des lieux où il n’est pas ; par exemple, que son ami séjourne à Ia campagne où qu’il voyage en France, il vous donnera pour raison un autre fait ; il alléguera une lettre qu’il a reçue de lui, des résolutions qu’il lui a vu prendre, des promesses qu’il lui a entendu faire. Je trouve dans une île déserte une montre ou queîqù’autre ouvrage de méchanique ; auffi-tôt je conclus que cette île a été découverte avant que j’y abordasse. Tous les autres raifonnemens qui concernent des faits sont de Ia même nature : on y suppose toujours une liaison entre le fait présent 8c celui qu’on en déduit par manière de conséquence ; s’il n’y avoit point de liaison , toutes nos inductions scroient précaires. Pourquoi une voix-articulée 8c un discours raisonnable ; entendus dans un lieu de ténèbres, m’assurenr-ils de Ia présence d’un homme ? C’est à cause que ce sont-Ià des actes affectés à I’organisation

humaine. Analysez tous

les raifonnemens de cette espèce , vous les trouverez tous appuyés fur Ia relation qui subsiste entre les causes 8c les effets ; &z cette relation se présentera toujours, ou prochaine ou éloignée > ou directe ou collatérale. C’est ainsi que la chaleur 8c la lumière sont des effets collatéraux du feu , 8c qu’on peut légitimement inférer l’existence de l’un de l’existence de l’autre. Pour satisfaire donc l’esprit sur la nature de cette évidence, qui nous cerrifie les choses de fait, il est besoin d’examiner Ia route que nous tenons dans la recherche des causes & des effets. Je hasarderai ici une proposition que je crois générale 8c fans exception, c’est qu’il n’y a pas un seul cas assignable, où la connoissance du rapport qui est entre Ia cause 8c Veffet puisse être obtenue à priori ; mais qu’au contraire cette connoissance est uniquement due à l’expérience qui nous montre certains objets dans une liaison constante. Présentez au plus fort raisonneur qui soit sorti des mains de la natu’re, à l’homme qu’elle a doué de la plus haute capacité , un objet i qui lui soit entièrement nouveau, laissez-lui exai Ddd