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la sensation qu’il éprouve,

& un objet différent

de lui-même qui lui cause cette sensation. Aussi peut-on dire que ks sensations de Todorat, de l’ouïe,

du goût, de la vue sont tout-à-la-fois aidées Se troublées par le toucher ; aidées, en ce que le toucher nous fait connoître Texistence des corps- qui occasionnent

en nous ces sensations ;

troublées , en ce que Texistence de ces corps une fois connue par le toucher , fait juger au vulgaire ce qui n’est pas ; savoir , que ks odeurs, les sons, les saveurs, les couleurs appartiennent aux objets extérieurs Sc non pas à nous ; au lieu que ces sensations Se celle de la Yue même, ( au moins dans ks premiers instans ) si elles étoient feules ,.

Se que le toucher ne s’y mêlât pas, nous -apprendraient,

ce qui est cneffet, que les odeurs, les. sons, les saveurs, les couleurs n’existent «que dans nous-mêmes.

Òn peut remarquer,

au reste, que le goût n’est

qu’un toucher modifié : la raison qui a porté les philosophes à en faire un sens particulier , c’est i°.

que Torgane du goût est affecté à une partie feule de notre corps,

tandis que le toucher est

attaché à toutes les autres indistinctement ; 2°. que

cette espèce de toucher,

exclusivement affectée

à une partie de notre corps, produit en nous une sensation particulière

qui se joint au toucher ,

mais qui en est différente. Observons cependant à cette occasion que, si on établissoit la différence de nos sens fur celle de nos sensations , il faudroit admettre bien plus de cinq sens , même en ne mettant pas de ce nombre celui que Bacon Se d’autres philosophes après lui ont appelle le sixième sens, je veux dire, le sens physique de Tamour. La sensation de chaleur, par exemple ,

Sc. celle du froid sont absolument différentes de celle du toucher ; 8c, si nous les rapportons communément à ce dernier sens, c’est parce que, pour Tordinaire,nous éprouvons cette sensation dans les parties extérieures de notre corps, qui sont Torgane du toucher ; car d’ailleurs, le toucher , considéré en lui-même,

ne nous donne proprement

qu’une sensation , celle de Timpénétrabilité Se de la résistance plus ou moins grande des corps , d’où nous concluons la réalité de leur existence. Les sensationsqlte nous acquérons, ou que nous pouvons acquérir en touchant un corps , comme celle du froid, du chaud, du sec, de Thumide, Sec.

font aussi différentes de la sensation du toucher même , que la sensation du goût , quoique cette dernière sensation dépende aussi du toucher. St, d’un côté ,i on peut multiplier le nombre de nos sens au-delà de celui que les philosophes ont fixé, on peut, sous un autre point de vue, réduire tous les sens à une espèce de toucher ; ce toucher s’exerce , ou d’une manière immédiate , comme dans k goût Se le toucher proprement dit, ou d’une manière médiate , comme dans la vue , Touie 8c Todorat-,

par le moyen de quelque ma-

tière invisible que le corps lumineux ,. sonore ou

odoriférant , envoie ou fait agir fur rios organes.

Mais outre ces cinq sens, il en est un qu’on peut appeller interne, qui est comme intimement ré-.,

pandu dans notre substance , Sc dont le siège se trouve à la fois dans toutes les parties externes 8c internes de notre corps. Ce sens ne peut être rapporté ni médiatement ni immédiatement au toucher ; il résulte de la disposition actuelk» des parties intérieures ou extérieures de notre propre corps , Sc produit en nous , en conséquence de cette disposition , des sensations agréables ou pénibles, fans que les autres corps occasionnent ces sensations par kur action fur nos organes, ou du, moins par une action sensible. Ce sens, interne a encore cela de particulier , qu’au lieu que les autres sens agissent fur notre ame, fans en recevoir mutuellement aucune impression ; Taction- du sens interne fur Yame , Se de Yame íur le sens interne est réciproque , c’est-à-dire , que tantôt la disposition de Yame est produite par la manière dont le sens interne est affecté , tantôt la disposition du sens interne par celle de Yame. C’est vers la région de Testomse que ce sens interne paroît fur-tout résider. Nous pouvons nous en assurer dans les émotions vives de Yame , de quelqu’espèce qu’elles soient : Teffet de ces émotions vives porte presque toujours fur cette région, Se nous fait éprouver,

dans les parties qui

en font voisines , une pesanteur , une dilatation , un resserrement, en un mot, une impression sensible, Sc différente , suivant la nature de Témotion qui Ta occasionnée.

Cette région semble donc être le siège du sentiment , comme les organes de nos sens celui de nos sensations , 8e le cerveau celui de nos pensées. Mais , à Toccasion de ces différentes parties de notre corps, auxquelles nous rapportons les impressions ou ks idées qui nous affectent , qu’il nous soit permis de faire une remarque qui paroît avoir»échappé à tous les métaphysiciens. La sensation Se la pensée , que les philosophes semblent avoir confondues 8e regardées comme du meme genre , n ont pourtant aucun rapport entr’elles ; car quel rapport entre la vue d’une couleur,

paf exemple,

Sc Tidée de l’îhjuste ?

Pourquoi donc ces mêmes philosophes, si atten-

tifs à démêler les défauts de rapport entre les’" choses , 8e en conséquence à assigner de fa différence entr’elles,

n’ont-ils pas distingué la substance qui sent de la substance qui pense, par la même raison qu’ils ont distingué la substance pensante de la substance étendue ; la pensée pure Sr simple n’ayant guères plus d’analogie avec la sensation qu’avec l’étendue ? Ce n’est pas tout. Les sentimens qui affectent notre ame, soit purement passifs comme la joie , soit actifs comme le désir, n’ont aucun rapport ni aucune ressemblance entr’eux , ni avec la sensation 8e la pensée ; pourquoi donc les philosophes n*ònt-ils pas aussi at-