Et afin de s’indemniser du refus que faisoient quelques provinces, de contribuer à l’aide de douze deniers, imposée sur les choses vendues dans l’intérieur du royaume ; ce monarque ordonna que ces provinces seroient traitées, comme les pays étrangers, dans leur commerce avec celles où l’aide avoit cours ; c’est-à-dire, que le droit de sortie de douze deniers seroit payé sur les marchandises sortant de ces dernieres provinces, pour aller dans celles où l’aide n’étoit pas établie, de la même façon qu’elle étoit payée sur ce qui sortoit du royaume pour le pays étranger.
C’est par une suite de ces dispositions, qu’il fut successivement établi des barrières, ou lignes de séparation formées par des bureaux, entre la Picardie & l’Artois ; dans l’Anjou & le Maine, du côté de la Bretagne ; dans le Poitou, du côté de l’Angoumois ; dans le Berry & le Bourbonnois, du côté de la Marche, de l’Auvergne & du Forez ; & dans le Lyonnois & le Languedoc, du côté du Dauphiné & de la Provence.
Dans cet état des choses, les marchandises ou denrées sortant des provinces où étoient placés ces bureaux, payoient trois sortes de droits ; celui de rève, de quatre deniers ; celui de l’imposition foraine, de douze ; & celui de haut passage, de sept ; soit qu’elles fussent envoyées en pays étranger ou dans les provinces réputées étrangères ; c’est-à-dire, dans celles où les aides ne se levoient pas[1]. Il faut observer aussi que le droit de haut passage, créé en 1362, ne se percevoit que sur les marchandises qui avoient été prohibées sous Charles-le-Bel, telles que les draps, les peaux, les laines, le fil, le lin, les toiles, le fer & l’acier non fabriqués, les armes, & quelques autres. Ces trois sortes de droits étoient indépendans de ceux qui étoient perçus dans l’intérieur des provinces sur les marchandises vendues, conséquemment à l’ordonnance de 1360, à moins qu’elles n’en fussent nommément exemptées par une autorité particulière[2].
Charles, qui avoit été régent du royaume pendant la captivité & l’absence du
- ↑ Les États d’Artois, du Boulonnois & Comté de Saint-Paul, ayant donné au roi une somme par forme de subvention extraordinaire, il fut rendu une ordonnance le 19 novembre 1366, portant que tout subside & imposition, treizième sur le vin, le quint du sel & toute autre aide extraordinaires imposés pour la délivrance du roi, cesseront en Artois, Boulonnois & Comté de Saint-Paul ; & que les habitans des pays qui acheteront dans les pays où ce treizième sur le vin, & cinquième sur le sel, ont cours, des marchandises pour les mener chez eux, & non ailleurs, pour leur consommation & usage, seront quittes des impositions & de toutes entrées & issues qui se levent sur ceux qui menent denrées aux pays où les aides n’ont pas cours. On entend toujours par ces mots d’aides, l’imposition de 1360, à la vente des marchandises & boissons ; & quoiqu’on donne la même dénomination indistinctement à tout subside de ces tems, il faut pourtant distinguer, suivant Ducange, les aides légitimes & coutumieres, établies depuis long-tems, des aides extraordinaires & gracieuses, qui étoient demandées dans des besoins pressans, ou accordées volontairement à titre de secours.
- ↑ Les coquilles, médailles & autres marchandises de quincaillerie, vendue au mont Saint-Michel, à ceux qui y alloient en pélerinage, furent exemptées des douze deniers d’aide, par lettres du 15 février 1393.
cueillis, qu’il en existoit depuis long-tems, & qu’ils étoient de douze deniers pour livre. Voyez les notes précédentes, 62 & 63.
On en trouve une nouvelle preuve dans l’ordonnance rendue le 29 janvier 1363, par le maréchal Daudeneham, lieutenant du roi dans le Languedoc. Elle permet aux marchands nationaux & étrangers, de décharger à Lattes leurs marchandises, & de les faire transporter de-là à Montpellier, en payant les mêmes droits, jura clavaræ, qu’ils eussent acquittés, en les faisant décharger à Aigues-Mortes, avec défense de débarquer sur la côte, depuis Leucate jusqu’au grau de Passone.
L’ordonnance du 2 novembre 1364, fait mention aussi d’un droit d’entrée très-anciennement levé, en renouvellant l’obligation de payer ce droit d’un denier pour livre de la valeur des marchandises dont seront chargés les vaisseaux, soit nationaux, soit étrangers, à peine de confiscation des navires & des marchandises.