Page:Encyclopédie méthodique - Economie politique, T01.djvu/415

Cette page n’a pas encore été corrigée

réussirent à établir quelque culture. Ce commencement de bien fit sentir à la cour de Lisbonne qu’une colonie pouvoit devenir utile à sa métropole autrement que par des métaux. Dès 1525 on la vit jeter des regards moins dédaigneux sur une possession immense, que le hasard lui avoit donnée, & qu’elle étoit accoutumée à regarder comme un cloaque où aboutissoient toutes les immondices de la monarchie.

L’opinion du ministère devint celle de la nation. Avant tous les autres, tes grands seigneurs s’animèrent de ce nouvel esprit i le gouvernement accorda successivement à ceux d’entre eux qui te demandoient, la liberté de conquérir un espace de quarante ou cinquante lieues fur les côtes, avec une extension illimitée dans Tintérieur des terres. Leur charte les autorisoit à traiter le peuple assujetti de la manière qui leur conviendrait. Us pouvoient disposer du sol envahi en faveur des portugais , qui le voudraient mettre en valeur ; ce qu’ils firent la plupart, mais pour trois vies feulement, 8c moyennant quelques redevances. Ces grands propriétaires dévoient jouir de tous les droits régaliens. On n’en excepta que la peine de mort, que la fabrication des monnoies, que la dixine des productions ; prérogatives que la couronne se réserva. Pour perdre des fiefs si utiles 8c si honorables, il falloit négliger de les cultiver, les laisser

fans défense , n’avoir point d’enfant mâle, ou se rendre coupable de quelque crime capital. Ceux qui avoient sollicité ou obtenu ces provinces, s’attendoient bien à s’en mettre en possession fansbeaucoup de dépense pour eux, sans de grands dangers pour leurs lieutenans. Us fondoient principalement leur espérance sur- Tinertie des peuplades qu’il falloit dompter.

On trouva le Brésil distribué en petites nations, les unes cachées dans les forêts, les autres éta-

blies dans les plaines ou fur les bords des rivières ; quelques

unes sédentaires, un plus grand nombre nomades ; la plupart fans aucune communication entr’elles. Celles qui n’étoient pas continuellement en armes les unes contre les autres, étoient divisées par des haines ou des jalousies héréditaires. Ici ; Tune tiroir, fa subsistance de la chasse 8c déla pêche, l’autre de la culture des champs. Tant de différences dans la manière d’être 8c de vivre , ne pouvoient manquer d’introduire de la variété

dans les moeurs 8c dans les coutumes. -

Les moeurs des naturels du pays annonçoient le courage 8c la férocité.

Les brésiliens n’étoient pas disposés à recevoir patiemment les fers dont on vouloitTes charger : niais que pouvoientîdes sauvages contre tes armes & la discipline de TEurope ?Un assez grand nomire avoit subi le joug, lorsqu’en 1549, la cour de Lisbonne jugea convenable d’envoyer un chef

Pour régler un établissement abandonné jusqu’alors

aux fureurs 8c aux caprices de quelques brigands, En bâtissant San - Salvador, Thomas de Souza donna un centre à la colonie : mais la gloire de la faire jouir de quelque calme , étoit réservée aux Jésuites qui Taccompagnoient. Ces hommes intrépides,

à qui la religion ou Tambition firent : toujours entreprendre de grandes choses., se dis-

persèrent parmi les indiens. Ceux de ces missionnaires , qui, en haine du nom portugais ; étoient massacrés , se trouvoient aussi- tôt remplacés par d’autres,

qui n’avoient, dans la bouche que les -tendres noms de paix 8c de charité. Tant de, magna- .. nimité confondit des barbares , qui jamais n’avoient su pardonner. Insensiblement ils prirent

confiance en des hommes qui he paroissòient Tes rechercher que pour les rendre heureux. Leur penchant pour les missionnaires ; devint une passion. Lorsqu’un jésuite devoit arriver chez quelque nation , les jeunes gens alloient en foulé au-devant de lui,"

se cachant dans les bois situés fur la route. A son approche , ils sortoient de leur retraite, ilsjouoient de leurs fifres, ils battoient leurs tambours, ils remplissoient tes airs de chants d’allégresse ; ils dansoient , ils n’omettoient rien

de ce qui pouvoit marquer leur satisfaction. A-Tentrée du village étoient les anciens, les Drincipaux chefs des habitans, qui montraient une joie aussi vive, máis plus réservée. Un peu plus loin , onvoyoitles

jeunes filles & les femmes, dans une posture respectueuse 8c convenable à leur sexe. Tous réunis, ils conduisoiént

en triomphé leur

père dans les lieux où Ton devoit s’assembler. Là, il les instruisoit des principaux mystères de la religion ; il les exhortoit à la régularité des moeurs, à Tamour deja justice, à la charité fraternelle, à

Thorreur du sang humain, 8c les baptisoit. ,

Comme ces missionnaires étoient en trop petit nombre pour tout faire par eux- mêmes, ils envoyoient souvent à leur place les plus- intelligens d’entre les indiens. Ces hommes, fiers d’une destination si glorieuse, distribuoient des haches, des .

couteaux,

d.es miroirs aux. sauvages qu’ils trouvoient ; 8c leur peignoient Jes portugais doux, humains, bienfaisans. IJs ne revenoient jamais de leurs courses fans être suivis de quelques brésiliens , dontjls avoient au moins excité la curiosité. Dès que ces barbares avoient vu les jésuites, ils ne pouvoient plus s’en séparer. Quand ils retournoient chez eux ; c’étoit pour inviter leurs familles 8c leurs amis à partager leur bonheur ; c’étoit pour montrer tes présens, qu’on leur avoit faits.

Les brésiliens avoient eu trop sujet de haïr les européens, pour ne pas se défier même de leurs bienfaits. Mais un trait de justice, qui fit un grand éclat, diminua cette méfiance.

Les portugais avoient formé l’établissement de Saint-Vincent sur la côte de la mer, au vingt-quatrième degré de latitude australe. Là, ils commerçoient paisiblement avec les cariges, la nation la plus douce & la plus policée de tout le Brésil. L’utilité qu’on retiroit de cette liaison ; n’empêcha