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sent guères davantage (i). Le Languedoc est plus cultivé 8c plus fertile ; mais ces avantages font peu profitables - parce que le bled qui est souvent retenu dans la province est fans débit ; & il y a si peu de commerce que dans plusieurs endroits de cette province, c.omme dans beaucoup d’autres pays, ks ventes & ks achats ne^s’y font que par trac ou í’échange des denrées mêmes. Les petites moissons que l’on recueille & qui, la plupart étant en seigle (2) fournissent peu de fourrage, contribuent peu à la nourriture des bestiaux, &y on n’en peut nourrir que par le moyen des pâturages ou des terres qu’on laisse en friche : c’est pourquoi on né les épargne pas. D’ailleurs -les métayers toujours fort pauvres , employent le plus qu’ils peuvent ks boeufs que k propriétaire kur fournit à faire des charrois à kur profit.pour gagner quelqu’argent , &.ks propriétaires font obligés de tolérer cet abus pour i se conserver leurs, métayers. Ceux-ci qui trouvent plus dé profit à faire des charrois qu’à cultiver, négligent la culture des terres. Lorsque ces métayers laissent des terres en friche pendant long-temps 8c qu’elles sc couvrent d’épines & de buissons, elles restent. toujours dans cet état, parce que elles | coûteraient beaucoup plus que leur valeur à esserter & à défricher.

Dans ces provinces Jes paysans & manouvriers n’y font point occupés,, comme dans ks pays de grande culture, par des riches fermiers qui les em-- píoyent aux travaux de Pagriculture & au gouvernement des bestiaux. Les métayers trop pauvres kur procurent peu de travail. Ces paysans sc nourrissent de mauvais pain fait de menus grains qu’ils cultivent eux-mêmes, qui coûtent peu de culture 8c qui. raefont d’aucun profit pour l’état. Le bled a peu de débit faute de consommation dans ces pays , car lorsque les grandes villes font suffisamment fournies par ks provinces voisines, le bled ne se vend pas dans celles qui font éloi- , gnées ; on est forcé de k donner à fort bas prix, ou de k garder pour attendre des temps plus favorables pour le débit î cette non-valeur ordinaire des bleds en. fait encore négliger d’avantage la culture : la part de la récolte qui est pour k métayer devient à peine suffisante pour la nourriture de sa famille ; & quand Ia récolte est mauvaise, il est lui-même dans la disette : il saut alors que lé propriétaire y suppléé ; c’est pourquoi ks récoltes qu’on obtient par cette culture ne font presque <f aucune ressource dans les années de disette, parce que dans les mauvaises annéej elles suffisent à peine pour la nourriture du propriétaire 8c du colon. Ainsi la cherté du bled dans les mauvaises années ne dédommage point de la non-valeur de cette denrée dans les bonnes an-, nées ; il n’y a que quelques propriétaires aisés, qui peuvent attendre ks temps favorabkspour la vente du bled Ae leur récolte, qui peuvent en profiter. II faut donc , à Pégard de cette culture, n’en» visager la valeur du bled que conformément au prix ordinaire des bonnes années ; mais k peu de débit qu’il y a alors dans les provinces éloignées de la capitale, tient le bled à fort bas prix : ainsi "nous ne devons P évaluer qu à 12 liv. k feptier, froment & seigle , dans les provinces où les terres font traitées par lapetite culture. C’est en effet dans ces provinces que le prix du bled ne peut soutenir les frais pécuniaires de la grande culture j qu’on ne cultive les terres qu’aux dépens des terres mêmes 8c qu’on en tire le produit que l’on peut en les faisant valoir avec le moins de dépense qu’il est possible.. Ce n’est que parce qu’on laboure avec desboeufs que l’on tire un si petit produit des terres ; on pourrait par ce genre de culture , en faisant les dépenses nécessaires, tirer des terres à-peu-près - autant de produit que par la culture qui se fait avec les chevaux : mais ces dépenses ne pourraient être faites que par les propriétaires, &c’estce, qu’ils ne feront point tant que le commerce du bled ne sera pas .libre , & que les non-valeurs de cette denrée né leur laisseront appercevoir qu’une perte certaine. - ’ On estime qu’il y á trente millions d’arpens de terres traitées par la petite culture ; chaque arpent dufortau foible, produisant, année commune, le grain quatre ou trente-deux boisseaux,noncompris la dixme ; de ces trente-deux boisseaux, il fauten retrancher huit pour la semence, {preste deux septiers qui sc partagent entre k propriétaire & le métayer.. Celui-ci est chargé de la taille & de quelques frais inévitables. . Trente millions d’arpens dé terres traitées paf’ la petite culture , font divises en deux foles qui. produisent du bled alternativement. II y a quinze millions d’arpens qui portent du bled tous les ans,, excepté quelques arpens que chaque métayer se réserve pour ensemencer en grains de mars, car il n’y a point par cette culture de fole particulière pour ces grains. Nous ne distinguerons point dans les quinze millions ^ la petite récolte, des grains de

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  1. On peut juger de-là combien est mal fondée l’opinion de ceux qui croient que la campagne est dépeuplée, parce que les grands propriétaires se sont emparés de toutes les terres, ensorte que les paysans ne peuvent pas en avoir pour cultiver à leur profit : on voit que le fermage des terres est à si bas prix, qu’il leur seroit très-facile d’en affermer autant qu’ils en voudroient ; mais il y a d’autres raisons qui s’y opposent, & que nous examinerons dans la suite ; car il faut dissiper des préjuges vulgaires qui voilent des vérités qu’il est intéressant d’approfondir.
  2. Ceux qui sont assujettis à la petite culture, sont peu attachés au fourrage que produit le froment, parce qu’ils en font peu d’usage ; & ils préfèrent volontiers la culture du seigle, parce qu’il vient plus sûrement dans les terres maigres : d’ailleurs il y a toujours quelque partie de la sole des terres ensemencées qui porte des grains de mars, que nous considérons avec le bled, pour éviter de petits détails peu utiles. On peut compenser la valeur de ces différens grains par un prix commun un peu plus bas que celui du froment.