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cela de favorable aux peuples, que le fermier ne changeant point,.le prix des fermes étoit toujours k même î parce que la. moindre augmentation en-’ ébranlant cétt’e chaîne, où chacun, trouvoit graduellement son profit, auroit infailliblement causé une révolte ;. ressource terrible,mais la seule qu’emploient les pays opprimés par le despotisme.

Peut- être qu’au milieu de cet ordre des choses, il y avoit une foule d’injustices & de vexationsparticulières. Mais du moins la perception des deniers publics se faisant toujours fur, un taux fixe & modéré, P émulation n’étoit point absolument - éteinte. Les’cu’ltiyâteurs sûrs de conserver le produit dé kurs-récoltes, en payant exactement le prix de leur ferme , sccohdoient par leur travàil.la fécondité du sol. Les tisserands, maîtres du prix de léurs ouvrages, libres de choisir l’achereur qui leiir convenoit le mieux, s’attachoient à perfectionner 8c à étendre leurs manufactures. Lës uhs & ks auttés tranquilles fur leur subsistance, se livraient avec joie aux plus doux penchans de la nature, à la passion dominante dans ces climats ; & ils ne yoyoient, dans l’augmentation de leur famille, qu’un moyen d’augmenterJeurs richesses : telles sont évidemment les cáuscsde ce haut dé-’ gré. auquel 1industrie -, Pagriculture ,& la popula- | tion, s’étoient éleyées dans le Bengale.ll scmbloit qu’elles dussent encore,s’accroître fous le gouvernement d’un peuplé libre & ami de Phurnanité. Mais la soif del’or, la plus dévorante, la plus çruellede toutes les passions, a produit une administration destructive. Les anglois, souverains du Bengale, peu corn tens dé percevoir les revenus fur le même pied que les anciens soubas , ont voulu tóutà la fois augmenter le produit, des fermes , & s’en ápprb-

prier.k bénéfice. Ppur remplir ce double objet,

ria compagnie angloife , cette compagnie souveraine -, est devenue la fermière de sonproprè souba, c’est-à-dire, d’un esclave auquel elle venoir de conférer ce vain titre, poUr én imposer plus .-sûrement ; aux peuples. La fuite-de ce nouveau pìan a été de dépouiller les fermiers , pour kur

substituer des agens de la compagnie. Elle s’est

encore- emparée,toujours sous le no’m 8c en apparence poút le compte’du souba, dela Vente exclusive du sel ; du- tabac, du bétel, objets de première nécessité dans ces contrées. II y a plus, elle a fait créer en fa faveur, par ce même souba, jin privilège exciùsifpourla vente du’cotpn venant de l’étranger , afin de le, porter à un prix excessif. -Elk a fait augment’erTes douanes ; & elle a fini par faire publier un édit.quidéíend k commerce, dans f intérieur du Bengale -, à tout particulier eu- . ropéén , & qui le permet aux ’seuls anglois.

Quand on réfléchit à cette prohibition barbare , u ! semble qu’elle n’ait(été imaginée que pour épuiser tous !les moyens, de nuire à "ce malheureux* pays, dont la compagnie angloife ; pour son seul 1 intérêt, auroit dû chercher la prospérité. Au reste ; il est aisé de voir que la cupidité personnelle des membres du conseil de Calcutta, a dicté cette loi honteuse. -Ils.ont voulu s’assurer le produit de toutes les manufactures, pour forcer ensuite les négocians des autres nations , qui voudraient commercer d’Inde en Inde, à acheter d’eux ces objets à des prix excessifs ou à renoncer à kurs entreprises. Cependant, au milieu de cette- tyrannie, si contraire à l’ava.ntage. de leurs commettans, ces agens infidèles ont essayé deTe couvrir de Papparencedu zèle. Ils ont dit que, dáns la nécessitede faire passer eri Angleterre une quantité de marchandises proportionnée- ! Pétendue de son commerce , la concurrence des particuliers nuisoit aux achatsde la compagnie.

Ce n’est pas tout, ks anglois vainqueurs du Bengale , possesseurs des trésors immenses que la fécondité du sol 8c l’industrie des habítahs y avoient rassemblés , ont osé se permettred’altérer le titré des espèces. Ils ont donné Pexemple de cette lâcheté, inconnue aux despotes de Y Asie ; & c’est par cet acte deshonorant qu’ils ont annoncé leur souveraineté aux peuples. II est vrai qu’une , opération si contraire à la foi du commerce. & à. la foi publique, ne put sc soutenir long-temps. La compagnie elle-même en ressentit les pernicieux effets ;.& il fut résolu de retirer toutes les espèces fausses, pour <y substituer une monnoie parfaitement semblable à celle qui avoit eu toujours cours dans çès contrées.

On avoit frappé en roupies d’or environ quinze millions , valeur-nominale ; mais qui ne représen-’ toient effectivement que neuf millions’, parce qu’on y ávoit mêlé quatre dixièmes d’alliage, & même quelque chose de plus. II fut enjoint à tous ceux.qui sc troúveroient avoir de ces roupies d’or de faux aloi, de les rapporter au trésor de Calcutta , ou on ks rembourserait en roupies d’argent. Mais au-lieu dé dix roupies & demi d’argent, que chaque roupie d’or devoit valoir, suivant fa dénomination, on nkn donna que six i de manière que Palliagë fut définitivement en pure perte pour le propriétaire.

Une oppression si générale devoit nécessairement être accompagnée de violence : aussi a-t-il fallu recourir souvent à la force des armes, pour faire exécuter les ordres du conseil de Calcutta. Si, au tableau des vexations publiques, nous ajoutions celui des exactions particulières ’, on ’ verroit presque par- tout ks agens de la compagnie percevant les tributs pour elk avec’ une extrême rigueur, & levant dësVontribútions ppur eux avec la dernière cruauté. On ksverroit portant Pinquisition dans toutes ksTamilles, fur toutes les fortunes, dépouiller indifféremment l’artisan & le laboureur ; souvent faire un crime à un homme & le punir de n’être pas assez riche.