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prélats, ou surintendans, & quelquefois surintendans généraux.

Le pouvoir des états protestans, sur leurs sujets catholiques, est le même que celui des états catholiques sur leurs sujets protestans. Il est convenu que ceux qui avoient l’exercice public de la religion catholique en l’année 1624, reconnoîtront la jurisdiction spirituelle des évêques qui l’exerçoient en la même année ; ainsi ceux qui n’ont eu que l’exercice privé de leur culte, ou qui ne sont tolérés que par une grace spéciale, dépendent uniquement de leur seigneur temporel, lequel cependant ne sçauroit leur prescrire des choses contraires aux principes fondamentaux de leur église. Il n’est point permis aux états protestans de renvoyer les moines d’un couvent situé dans leur territoire, & de les remplacer par des moines d’un autre ordre à moins que les premiers ne soient entièrement éteints ; & même alors le couvent ne peut être rempli que par des moines crées avant la réforme.

Enfin il a été convenu entre les protestans, que si un état luthérien embrassoit la communion calviniste, ou s’il acquéroit une province vouée à cette communion & vice versa, il laisseroit jouir librement ses sujets de l’exercice de leur religion & de tout ce qui en dépend ; que si une communauté adoptoit d’elle-même le culte de son seigneur territorial, l’exercice public lui seroit accordé, mais à ses propres frais & sans préjudice des autres.

Les conseillers de consistoire, surintendans & professeurs de théologie & de philosophie, doivent professer la religion qui étoit en usage dans le pays lors de la paix de Westphalie.

Section XVIIIe
De la forme du gouvernement du corps germanique.

Si l’on examine le corps germanique selon les principes d’Aristote, on ne peut le ranger sous aucune de ses quatre classes ou formes de gouvernement. Pour donner une idée de sa constitution, on peut dire : le saint empire romain est gouverné par un sénat de souverains, tous de la nation allemande, qui s’assemblent pour prendre d’un commun accord les résolutions nécessaires au bien de la patrie, & qui réunissent leurs forces pour la défendre. Le prince qui préside à ce sénat est choisi parmi ses membres. Il obtient, par son élection, le titre d’empereur, avec la première dignité de l’empire, il représente la majesté de tout le corps germanique, & en cette qualité on lui accorde toutes les marques extérieures du plus profond respect ; mais il est obligé de gouverner selon les loix fondamentales du pays, & les conditions qui lui ont été prescrites ; & il ne peut rien entreprendre sans le consentement de ce même sénat, dont il n’est que le premier membre.

Quelques politiques regardent l’empereur comme un simulacre de prince, & ils le comparent au doge de Venise : cette opinion est fort exagérée. Ceux qui se sont appliqués à l’histoire d’Allemagne, sçavent combien les empereurs ont toujours eu de crédit & d’autorité dans l’empire, sur-tout depuis que la couronne impériale est portée par la maison d’Autriche. Quoique cette autorité ait été poussée souvent au-delà de ses justes limites, il est sûr que les loix mêmes accordent beaucoup de pouvoir à l’empereur, comme on peut le voir par la bulle d’or, & par toutes les autres constitutions fondamentales. Voyez bulle d’or, &c. Nous nous contenterons d’observer ici que le pouvoir & l’autorité de l’empereur sont plus grands à mesure que le prince qui occupe cette dignité est plus ou moins puissant par lui-même.

En parlant des électeurs, de l’empereur & de la diète, nous avons dit de quelle manière procède le corps germanique dans les affaires qui intéressent l’empire ; nous ajouterons ici qu’il est composé de pièces de rapport qui doivent en affoiblir la constitution, par la difficulté d’y maintetenir l’harmonie. On verra, dans les différens articles des états de l’empire, qu’ici la puissance souveraine est héréditaire, que là elle est élective ; que dans quelques-uns le pouvoir du prince est absolu, & que dans d’autres il est limité par des capitulations & par la loi ; que les villes libres ont un sénat composé des principaux citoyens, & que l’élection en est confiée aux sénateurs mêmes ; qu’ailleurs le gouvernement est aristocratique ; que ce sont les tribus qui élisent les sénateurs, qu’elles peuvent absoudre ou flétrir, & qu’ainsi elles constituent une véritable démocratie.

Le gouvernement en général ne peut être regardé comme aristocratique. Un pareil gouvernement suppose un sénat fixe & permanent, dont l’autorité souveraine délibère sans opposition sur tout ce qui concerne la république, & qui confie à des officiers subalternes & à des magistrats l’exécution de ses ordres & de ses délibérations. La chambre impériale & le conseil aulique ne sont qu’une image imparfaite de ce sénat souverain : on n’y porte que les affaires par appel ; ainsi ce tribunal resteroit sans fonction, si les parties jugées étoient satisfaites du premier arrêt. Les diètes ne doivent point être regardées comme un sénat permanent & absolu, quoique tout s’y décide à la pluralité des voix. L’Angleterre & la Suède ont leurs parlemens, où les affaires sont réglées par les suffrages des députés des provinces, sans que le gouvernement prenne le nom d’aristocratique. Les biens de chaque sénateur, dans l’aristocratie, dépendent absolument des loix & du sénat, qui peut en prendre une portion pour les besoins de l’état : en Allemagne tous les états ensemble n’ont point de droit sur les biens des particuliers.

On a souvent discuté si l’Allemagne pouvoit être mise dans la classe des monarchies. La question