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tion entr’elles, ou parce qu’il seroit levé des péages onéreux sur les voitures, tant par terre que par eau.

Si ces douanes intérieures étoient d’un tel produit que les revenus publics fussent altérés par leur suppression, il ne s’agiroit plus que de comparer leur produit à celui qu’on pourroit espérer de l’augmentation des richesses sur les terres, & parmi les hommes qui seroient occupés à cette occasion. À l’égalité de produit, on auroit gagné sur la population ; mais un calcul bien fait prouvera que dans ces cas l’état reçoit son capital en revenus : il ne faut qu’attendre le terme. Si ces droits rendent peu de chose au prince, & que cependant ils produisent beaucoup à ses fermiers, il devient indispensable de s’en procurer une connoissance exacte, & de convenir à l’amiable du bénéfice modéré qu’ils auront été censés de voir faire, pour le comparer au profit réel.

À l’égard des péages, il convient de partir d’un principe certain ; les chemins & les rivières appartiennent au roi. Les péages légitimes sont, ou des aliénations anciennes en faveur d’un prêt, ou les fonds d’une réparation publique.

Le domaine est inaliénable, ainsi le souverain peut toujours y rentrer. Le dédommagement dépend de l’augmentation du revenu du péage à raison de celle du commerce : si cette augmentation a suffi pour rembourser plusieurs fois le capital & les intérêts de la somme avancée, eu égard aux différences des monnoies, & aux différens taux des intérêts, l’état, en rentrant purement & simplement dans ses droits, répare un oubli de la justice distributive. Si après cette opération les fermiers du domaine continuoient à percevoir le péage, l’agriculture, le commerce & l’état n’auroient point amélioré leur condition ; le fermier seroit plus riche.

Lorsque les péages sont considérés comme les fonds d’une réparation publique, il reste à examiner si ces réparations sont faites, si la somme perçue est suffisante ou si elle ne l’est pas : dans ces deux derniers cas, il ne seroit pas plus juste qu’un particulier y gagnât, que de le forcer d’y perdre. En général le plus sûr est que le soin des chemins, des canaux & des rivières appartienne au prince qui en est le propriétaire immédiat.

Cessons un moment d’envisager l’agriculture du côté du commerce, nous verrons nécessairement s’élever l’un après l’autre tous les divers obstacles dont nous venons d’exposer le danger. Ils n’ont existé que parce qu’on avoit négligé cette face importante du premier de tous les objets, qui doivent occuper les législateurs. Cette remarque est une preuve nouvelle qui confirme que les progrès de l’agriculture sont toujours plus décidés dans un pays, à mesure qu’il se rapproche des saines maximes, ou qu’il les conserve mieux.

Cependant, comme un principe ne peut être à la fois général & juste dans toutes ses applications, nous ajouterons à celui-ci une restriction très-essentielle, & que nous avons déja trouvée être une conséquence de nos premiers raisonnemens.

L’établissement de l’équilibre le plus parfait qu’il est possible entre les diverses occupations du peuple, étant un des principaux soins du législateur, il lui est également important, dans l’agriculture, de favoriser les diverses parties en raison du besoin qu’il en ressent. On n’y parviendra point par des gênes & des restrictions, ou du moins ce ne peut être sans désordre ; & à la fin les loix s’éludent lorsqu’il y a du profit à le faire. C’est donc en restreignant les profits qu’on fixera la proportion.

Le moyen le plus simple est de taxer les terres comme les consommations, c’est-à-dire toujours moins en raison du besoin ; de manière cependant que l’on n’ôte point l’envie de consommer les moindres choses de nécessité : car on tariroit les sources de l’impôt & de la population. Cette méthode seroit sans doute une des grandes utilités d’un cadastre ; en attendant, il ne seroit pas impossible de l’employer. Si nous avons trop de vignes en raison des terres labourables, cela ne sera arrivé le plus souvent que parce que les vignobles produisent davantage. Pour les égaler, seroit-il injuste que les vignes payassent le quinzième, tandis que les terres labourables paieroient le vingtième ?

C’est ainsi que chaque espèce de terre se trouveroit employée sûrement & sans trouble à ce qui lui convient le mieux. Il ne reste rien de plus à desirer, quand une fois les besoins urgens sont assurés. Quels qu’ils soient d’ailleurs, les loix ne peuvent forcer la terre à produire ; leur puissance peut bien limiter ses productions, mais elle limite la population en même-temps. De toutes les loix, la plus efficace est celle de l’intérêt. On trouvera dans le Dictionnaire d’Agriculture tout ce qui est relatif à la pratique de cet art, & nous y renvoyons le lecteur. Voyez aussi l’article Grains.

AJAOIENS, (république imaginaire des) On se propose d’indiquer dans ce Dictionnaire les divers romans politiques qui ont paru ; & on va dire un mot de celui-ci.

Il est intitulé : la république des philosophes, ou l’histoire des ajaoiens, relation d’un voyage du chevalier S. Van Doelvelt en Orient en l’an 1674, qui contient la description du gouvernement, de la religion & des mœurs des ajaoiens, traduite sur l’original flamand. Ce roman, composé il y a près d’un siècle, n’est public que depuis quelques années. On l’a imprimé à Amsterdam, & l’éditeur l’attribue à Fontenelle ; mais il y a lieu de croire qu’il se trompe. Il est fort rare, & presque inconnu en France & en plusieurs autres pays.

L’auteur établit sa république dans une isle des mers de l’Inde, par 48 deg. 11 min. de latitude & 197 d. longitude. Après avoir donné la des-