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avoir plus de succès que n’en aura probablement désormais la peinture en grand sur le verre, parce qu’il est plus aisé de conserver un morceau de glace qu’une grande vitre.

Verre. Manière d’imiter avec une estampe la peinture sur verre. Ayez un verre blanc de la grandeur de votre estampe, & mettez dessus deux couches d’un vernis que vous ferez de la manière suivante.

Prenez quatre onces de térébenthine de Venise, une once & demie d’esprit de térébenthine, autant d’esprit de vin, deux gros de mastic en larmes, & faites bouillir le tout l’espace d’une heure dans un pot de terre vernissé. Lorsqu’il sera froid, vous en appliquerez une couche sur le verre bien également. La première couche étant sèche, il faut y en mettre une seconde, & si-tôt que celle-ci sera presque sèche, on doit coucher dessus, le plus proprement qu’il se pourra, l’estampe qui doit être préparée auparavant, comme on va le voir.

Prenez un vaisseau de verre, de fayencc, ou de terre vernissée, dont le fond soit aussi large que l’estampe, plat & uni, ayans son ouverture aussi large que le fond. Mettez dans ce vaisseau autant d’eau-forte qu’il est nécessaire pour couvrir tout le fond ; puis vous coucherez votre estampe à plat sur cette eau-forte, du côté de la gravure. Vous l’en retirerez, & l’ayant essuyée bien doucement entre deux linges ou entre deux papiers gris, vous laverez votre estampe dans deux ou trois eaux claires, & l’essuierez comme ci-devant entre d’autres linges ou papiers. Vous l’appliquerez ensuite sur le verre, faisant en sorte qu’elle s’y colle bien uniment, sans faire aucun pli ni élevure du papier. Alors vous mouillerez le bout du doigt dans de l’eau nette, & ayant humecté l’estampe par derrière, vous enleverez, en frottant avec le même doigt, tout le papier où l’impression n’a pas marqué. Il n’y restera enfin que les traits de l’estampe sur lesquels vous pourrez peindre par-derrière avec des couleurs à l’huile, les plus vives & les plus légères ; & vous aurez une peinture que la poussière ni l’air ne pourra gâter. Avec de la patience & de l’adresse, on pourra tirer parti de cet amusement ; mais pour y bien réussir, il faudroit avoir au moins quelque pratique de dessin.

Autre manière. Ayez un verre blanc de la grandeur de votre estampe, & faites-le chaufa fer pour y appliquer avec un pinceau de ltérébenthine de Venise : elle s’étendra facilement & avec égalité en la mentant un peu sur le feu. Appliquez ensuite l’estampe sur ce verre ainsi préparé, du côté de l’impression, après l’avoir fait bouillir l’espace d’un demiquart d’heure dans de l’esprit-de-vin. D’autres se contentent de l’y laisser tremper pendant vingt-quatre heures, sans la faire bouillir. Le verre sur lequel l’estampe est collée étant refroidi, mouillez le bout du doigt, frottez-en doucement sur le papier que vous enleverez petit à petit jusquà ce qu’il ne reste plus que l’impression. Alors vous mettrez bouillir dans un matras, au bain-marie, une partie de térébenthine sur quatre d’esprit-de-vin, pendant un bon quart-d’heure, & vous coucherez de cette composition sur le derrière de l’estampe. Vous mettrez deux de ces couches, & quand la seconde sera sèche, vous pourrez y appliquer les couleurs.

Autre manière. Mettez tremper l’estampe dans de l’eau commune pendant trois jours, dans un bassin plat & uni, dans lequel elle puisse être contenue sans se plier. Frottez le verre devant le feu avec de la térébenthine de Venise, observant d’y en mettre le moins épais que vous pourrez. Ayant retiré votre estampe de l’eau, mettez-la entre deux serviettes bien étendues. Quand elle s’y sera bien essuyée, vous l’appliquerez, du côté de la gravure, sur le côté du verre qui a été frotté de térébenthine, passant légèrement la main par derrière pour l’applatir, en sorte qu’il n’y reste aucune élevure ni pli. S’il y en restoit quelqu’un, on en feroit sortir l’air en perçant le papier en cet endroit avec une épingle. On enlève ensuite le papier jusqu’à la gravure qu’il faut prendre garde d’offenser : cela se fait en frottant légérement, comme on l’a dit, avec le bout du doigt mouillé. Si le papier séchoit trop promptement, il faudroit humecter un peu les endroits secs avec de l’eau & les laisser s’imbiber : alors le papier s’enlevera sans peine. Cela fait, vous passerez avec un pinceau bien net une couche d’huile de térébenthine sur l’estampe, & la laisserez pénétrer jusqu’à ce que la gravure paroisse autant d’un côté que de l’autre. S’il en est besoin, vous mettrez deux couches. L’huile étant un peu sèche, il ne reste plus qu’à appliquer les couleurs comme on l’a dit ci-dessus.

Il faut observer aux personnes qui n’ont aucune connoissance de la peinture ni du dessin, & qui veulent s’amuser de cette sorte d’enluminure qu’on distingue dans la gravure, comme dans les ouvrages peints, l’ombre qui est la partie la plus obscure, les demi-teintes qui tiennent le milieu entre les ombres & les lumières, & les clairs qui, dans les parties les plus lumineuses, sont représentées par le blanc du papier, & dans les autres parties par des travaux très-légers. Il faut garder le même ordre en appliquant les couleurs par derrière l’estampe collée sur le verre. Sur l’ombre, on


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