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liitîon , d’avoir deux ou trois de ces chaffis mobiles dont nous venons de parler, afin d’arrofer & laver d’eau chaude, avec une éponge, celui

<jui viendroit defervir, pendant qu’on employeroit

l’autre, parce que fi , par hafard, il s’etoit attaché quelques particules de paftel au tifTu du taffetas , on ne les porteroit pas fur les autres parties du tableau.

Il feroit encore bon d’avoir , au lieu de plu-

! màceaux , deux ou trois pinceaux faits exprès , 

pour pouvoir les laver de temps en temps dans l’eau chaude. Ces pinceaux doivent avoir, à-peuprès, la forme des vergettes dont on broffe les habits, & la longueur d’environ fix pouces , non ■ compris la poignée qui doit être un pej recourbée : mais ils ne doivent guère avoir que deux rangs de poil de bléreaa , d’environ deux pouces de fortie, parce qu’il ne faut pas répandre à la ■fois trop de liqueur ; elle pourroit s’épancher & confondre les teintes , quoique je n’aye jamais ■éprouvé cet inconvénient. Je me fuis quelque ïfoisfervi d’une pâte de lièvre,

i S’il arrivoit , car il faut tout prévoir , qucn ’étendant la liqueur , les poils du pinceau pcnéitraffent dans le tiffii du taffetas, & fe chargealjfênt de couleur , on s’en apporcevroic fur le champ ; la liqueur ne manqueroît pas de devenir ’louche dans l’afliette à mefure qu’on y tremperoit le pinceau pour en prendre : en ce cas, il faut renouvellet fur le champ la liqueur & chanfger d’alïïette.

On doit compof’er peu de liqueur à la fois, ’parce qu’elle pourroit fe corrompre au bout de [quelques jours, à moins qu’on ne mêlât tout de j fuite la diffolution de colle avec pareille quanti- , té d’efprit de vin ; ce qu’il faut faire en incorporant les deux liqueurs, de manière qu’on verfe alternativement dans la bouteille un verre de diffolution de colle avec autant d’efprit de vin.

!Z)ans un temps froid, cette diffolution fe coaj 

gule & refte en mucilage : mais , pour lui rendre la fluidité néceffaire , ilfuffjt de mettre la bouterlle dans de l’eau, qu’on fera chauffer un inf-

tant. Mettez auffi , dans les temps froids , l’affiette

fur l’eau chaude , pour tenir la compofition plus liquide pendant l’opération.

Comme on pourroit faire quelque méprife k ’première fois qu’on voudra la pratiquei’, il convient d’en faire l’effai fur quelfyu’ouvrage de peu de conféquence , ou même fur la moitié feulement d’un tableau qu’on aura peint tout entier pour cette expérience, afin de juger de la différence des tons lorliqu’ilferafec, & de l’effet" de la liqueur fur le paftel.

Il efi : bon d’a' :tacher quelques morceaux de carte fur les angles du challis de taffetas , lorfqu’on fe propofe d’en faire ufage pour fixer le paftel fur de grands tableaux, parce que le papier des cartes , en effleurant le paftel , a’en em-Bciiux-Arts. Tome IL

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porte pas la moindre particule, lors même qi :9 e chaffis y fait quelque frottement. Telle efl : la manière dont j’ai fixé le paftel fuf des canevas , fou de toile imprimée en détrempe, foie de vélin , Ibit de papier. M. Loriot s’elt fervi d’un autre procédé, qu’il a fait connoîcre enfin le S janvier 1700 à l’Académie de peinture. Il employoit la même compofition ; mais il la faifoit jaillir fur le paftel en forme de pluie , avec une vergetre qu’il tiempoit légèrement dans la liqueur. A l’aide d’une baguette de fer courbé, Il faifoit revenir à lui les foies de cette broffe , & les laiffant enfuite échapper , elles répandoient fur la pein :ure , en fe redreffant brufquement, par l’effet de leur élafticité, des gouttes de liqueur qui la couvroient infenfiblemont toute entière , en continuant d’arrofer ainfi tout le tableau. Ce procédé réuffit bien , mais il exige de la patience & beaucoup d’adreffe. Il faut auffi que la diffolution do colle foit extrêmement claire, & même affez chaude , furtout en hiver ; autrement elle fe fige en l’air & fait des taches.

M. le JPrince de San-Severo a trouvé, de fou côté , un moyen de fixer le paftel , 8c n’en a jamais fait un fecret : on le connoiffoiten France par la relation de M, de la Lande publiée en 1769, onze ans avant que M. Loriot eût ceffé de de cacher le fian. La compofition qu’ils employoient éioit à-pou-près la même. M. le Prince de San-Severo failoit djffoudre de la colle de poiffon dans de l’eau pure , & y mêloit enfui-e de l’efprit devin : msis il commençoit parla faite infufer dans du vinaigre diftillé. Ce n’étoitpcs d’ailleurs fur le paftel qu’il appliquoit immédiatement la liqueur ; mai-i derrière le canevas qu’il tenoit renverfé, la peinture en deffons , de manière qu’elle s’infinuoit au travers & venoit imbiber le paftel. Ce procédé réuffit parfaitenient : on ne court pas le moindre rifque de gâter le tableau ; mais on ne peut l’employer que fur un canevas de taffetas ou de papier bleu : fur tout autre la liqueur ne pénétreroit pas.

Dans les trois procédés rapportés ci-deffus , la compofition de la liqueur eft la même ; tou ;e la différence eft dans la manière de l’appliquer. L’ufage & le temps apprendront quelle eft la plus commode, la plus expéditive, & la moins fujette aux inconvéniens.

On peut, avant de faire diffoudrela colle dans l’eau au bain-marie , commencer par la faire infufer vingt-qtaatre heures dans une once de vinaigre diftillé , fuivant le procédé du Prince de San-Severo, qui d’ailleurs indique des proportions de colle trop fortes : il eft certain que le vinaigre eft utile contre la piquûre des infedes qu’il écarte , & que la colle peut attirer. .11 ne manquoit à la peinture au paftel que la folidité : l’y voilà parvenue. ( Traité de l^. peinture au pajld.)

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