Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T02.djvu/504

Cette page n’a pas encore été corrigée

494

E M A

ture de l’émtiil & de la porcelaine , ce qu’ils peuvent en connoîcre -, ils fe feront beaucoup d’honneur , & ils rendront un fervice important à la peinture. Les peintres fur Vcmcill ont une peine incroyable à compietter leur palette , & , quand elîe elt à peu près completce , ils craignent toujours qu’un accident ne la dérange, ou que quelques couleurs dont ils ignorent la compofleion , & qu’ils employent avec beaucoup de ■ fuccès , ne viennent à leur manquer. Il m’a paru, par exemple, que des rouges de Mars, qui euflent de l’éclat & : de la fixité , étoient très-rares. Comment un art fe periecuonnera ■ t’il , lorfque les expériences d’un artiiLe ne s’ajouteront point aux expériences d’un autre artifle , & que ^ejui qui entrera dans la carrière , fera obligé de toutin’/enter , & de perd.e à chercher les couleurs , un temps précieux qu’il eût employé à peindre’

On vit immédiatement après Pierre Chartier , plufieurs artiftes fe livrer àla feinrure en émail : on fit des médailles, on exécuta un grand nombre de petits ouvrages , on peignit des portraits. Jean Petiioi & Jacqws EorJifr en apportèrent d’Angleterre de fi parfaits, & de fi parfaitement coloriés, que deux bons peintres en miniature , Louis Hance & Louis de Gucnilrr, tournèrent leurs talens de ce côté. Ce dernier fe livra à la peinture er. émailo.-QQ, tant d’ardeur & d’opiniâtreté , qu’il l’eu : fans doute portée au point de perfeâion qu’elle pouvoir atteindre , s’il eût vécu davantage. Il découvrit cependant plufieurs teintes qui rendi,ent fes carnations plus belles que fes prcdicefleurs ne les avoisnt eues. Que font devenues ces découvertes .’

Mais s’il efl : vrai, dans tous les arts, que la diftance du médiocre au bon efb grande, & que celle du bon à l’excellent efl prefqu’infinie, ce font des vérités firguliérement frappantes dans la peinture en émail. Le degré de perfeélion le plus léger dans le iravail , quelques lignes de plus oa de moins fur le diamètre d’une pièce, conftituent, au-delà d’une certaine gtandeur, des différences prod gieufes.

Pour peu qu’une ’pièce foit grande , il eft prefqu’impoffible de lui conferver cette égalité de fuperficie qui permet feule de jouir égale-KLent de la peinture , de quelque côté que vous 5a regardiez. Les dangers du feu augmentent en raifon des furfaces. M. Rouquet , dont je ne pcnfe pas que qui qi ;e ce foit récufe lejugement dans cette siatiere, prétend même, dans fon ouvrage de l’Etat des arts en Argliterrs , que le projet d’exécuter de grands morceaux enéma//, eft une preuve dicifire de l’ignorance de l’artjfte ; que ce genre de peinture perd de fon mérité , à proportion qu’on s’éloigne de certaines limites : que l’artifte n’a plus , au-delà de ces limites la même liberté d’exécution , &’ que le fpedateur feroit plutôt fatigué qu’araufé par Jes E M A

détails , quand même il arriveroît à l’artifte de réuflir.

JsanPetitot , né à Ccnê. e en 1607, -mourut à Vevay en 16^1, l ! ie donna des peines incroyables peur perfeftionner fonialent. On dit qu’il dut l’es belles couleurs à un habile chymifire avee leqtisl il travailla ; mais on ne nomme pointée chyruifte. Petitot, dit M. Rouquet , n’eût jamais mis dans l( ;s ouvrages une manœuvre fi fine & riféduiianie , s’il avoit opéré avec les fubftances ordinaires. Quelques heureufes découvertes lui fournirent les movens d’exécuter fans peine des cliofe» furprenantes, que, fans le fecours de ces découvertes, les o’ganes les plus parfaits n’auroient jamais pu produire. Telsfcnr les cheveux que Petitot peignoit avec une légèreté dont les inftrumens & les préparations ordinaires nt font nullement capables. S’il eft vrai que Petitot ait eu des moyens mécaniques qui fe foient perdus , quel regret potir ceux qui font nés avec un goût vif pour les arts, & qui fentent tout le prix de la pcrfetlion !

PetiiOt copia plufieurs portraits d’après les plus grands maîtres : on les conferve précieufement. Vandick fe plut h le voir travailler, & ne dédaigna pas quelquefois de retoucher fes ouvrages.

Louis XIV .& fa cour employèrent longtetnps fon pinceau. Il obtint une penficn confidérable-, & un logement aux Galeries qu’il occupa jnfqu’àia révocation de l’édit de Nantes. Ce fut alors qu’il fe retira dans fa patrie. Bordier, l’on beau-frere , auquel il s’étoit aP focié, peig.-oit ks cheveux, le- draperies & les fonds ; Petiiotfe chargeoit toujours des têtes & des mains.

Ils traitèrent non-feulement le portrait, mais encore l’hifto’re Ils vécurent fans jaloufie , & amaîTerent près d’un million qu’ils partagèrent fans procès.

On dit qu’il y a un très-beau morceau d’hiffoire de ces deux artiftes dans la bibliothèque de Genève.

M. Rouquet fait l’éloge d’un peintre Suédois appelle Zinck. Ce peintre a travaillé en Angleterre. Il a fait un grand nombre à ; portraits oii l’on voit Vémail manié avec la plu’ grande facilité , l’indocilité des matières fubJLguée3,& les entraves que l’art de Vémail met au génie-, entièrement brifces. Le peintre de Génère dit de Zinck ce qu’il a dit dePetitor, eu il ipoffcdé des manœuvres & des matières qui lui éioient particulières, & fans lefqueiles fes ouvrages n’auroient jamais eu la liberté de pinceau , la fraîcheur , la vérité , l’em-pârement qi ;i leur donnent l’effet de la nature. Les mots par lefquelsM. Rouqiiet finit l’éloge de Zinck, font remarquables : rt-Il eft bien humiliant, dit-il, P pour la naturç huiualae, que les génies ayent