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qu’il étoit à Rome, il se peignit lui-même riant & tenant une coupe de vin ; une femme connue & qui se nommoit la Donna Vénusta, étoit représentée à côté de lui : ce tableau est regardé comme son chef-d’œuvre. Cependant il ne se borna pas au genre du portrait, & se fit une grande réputation dans l’histoire. Son talent fut recherché & récompensé par l’Empereur & par Albert V, duc de Baviére. Il peignit pour ce dernier prince l’invention de la croix, dont on admire l’invention & le coloris. Il étoit dessinateur correct, mais sans avoir pu se dépouiller entiérement de la manière qu’il avoit contractée dans ses premières études en copiant des ouvrages de Spranger. Ses airs de tête, dans ses beaux ouvrages, tiennent de la grace du Corrége. On ignore l’année de sa mort.

Les trois Sadeler ont beaucoup gravé d’après Van-Achen, & quelques-unes de leurs estampes rendent témoignage à la manière gracieuse de ce peintre. Muller a gravé, d’après lui, un Saint-Sébastien.


(67) Octave Van-Véen, plus connu sous le nom d’Otto Vœnius, de l’école de Hollande, naquit à Leyde en 1556, d’une famille distinguée. Son père, qui étoit bourguemestre, le fit élever dans l’étude des lettres, mais il ne combattit point l’inclination que le jeune homme marquoit pour la peinture. Van-Véen apprit les premiers principes de son art dans son pays, & passa ensuite à Rome où, à la recommandation du Prince de Liége, il fut reçu avec distinction dans la maison du Cardinal Madueio. Il se mit sous la conduite de Frédéric Zucchero, consacra sept années à l’étude de l’antique & des grands maîtres, & ne conserva que des traces légères de la manière de son pays.

Sorti de l’Italie, il travailla quelque temps chez l’Empereur, l’Electeur de Baviere, l’Electeur de Cologne, sans que les offres de ces princes pussent le déterminer à renoncer à sa patrie. Il revint dans les Pays-Bas, où le Prince de Parme, qui en étoit Gouverneur, le nomma ingénieur en chef, & peintre du Roi d’Espagne. Après la mort de ce Duc, l’artiste choisit Anvers pour sa résidence ; mais il fut bientôt rappellé à Bruxelles par l’Archiduc Albert, qui lui donna l’intendance des monnoies. On lui fit des offres, au nom de Louis XIII, pour l’attirer en France ; non-seulement il les refusa, mais il ne voulut pas même travailler pour ce prince, ennemi de son souverain, soit qu’il faille attribuer cette délicatesse à un scrupule de patriotisme, soit plutôt qu’il craignit de se rendre suspect à la cour d’Espagne. Il mourut à Bruxelles en 1634, âgé de soixante & dix-huit ans.


Ses deux filles, Gertrude & Cornélie, se sont distinguées dans la peinture. On estime surtout de la dernière le portrait de son père. Il a été gravé par Egid. Ruchol.

« Otto Vœnius avoit, dit M. Huber, un genie facile & sage. Gracieux dans ses airs de tête, & correct dans son dessin, surtout dans les extrêmités, il donnoit de l’expression à ses figures, mais il ne leur prêtoit pas assez de noblesse. Il entendoit très-bien l’art des draperies, ainsi que la science des lumières & des ombres. C’est de tous les peintres Hollandois celui qui a le mieux observé le costume. »

Il peignoit le portrait & l’histoire ; il étoit poëte, historien & littérateur. On compte entre les écrits, l’histoire de la guerre des Bataves contre Civilis & Cérialis, extraite de Tacite, les emblêmes d’Horace avec des observations, la vie de Saint-Thomas d’Aquin. Tous ces ouvrages sont enrichis d’estampes gravées d’après l’auteur.

Gilbert Van-Véen, frère d’Octave, se donnæ à la gravure ; on a de lui, d’après son frère, une Sainte-Famille, & plusieurs allégories.

Malgré tous les talens d’Otto Vœnius, son plus bel ouvrage est d’avoir fait un élève tel que Rubens.


(68) Bernard Castelli, de l’école Génoise, né à Gênes en 1557, imita le Cangiage, se piqua d’acquérir la même facilité, & tomba dans les défauts de ce maître, parce qu’à son exemple il se proposa surtout d’expédier, & quitta la nature pour se livrer à la pratique. Il étoit habile dessinateur, mais maniéré, & auroit pu donner plus de perfection à ses ouvrages, s’il avoit pris la peine de les étudier. Il avoit un génie abondant, peut-être parce qu’il n’avoit pas un jugement difficile à satisfaire ; il se plaisoit aux grandes compositions dans lesquelles peuvent se cacher aisément les grandes fautes, & avoit un bon ton de couleur. Il peignoit à l’huile & à fresque, faisoit l’histoire & le portrait. Il a fait à Rome l’un des tableaux de l’église de St. Pierre : ce tableau représente l’apôtre marchant sur les eaux.

Il avoit de l’esprit, & étoit lié avec les poëtes célèbres de son temps, surtout avec le Tasse. Il a fait pour la Jérusalem délivrée des dessins qui ont été gravés en partie par Augustin Carrache. Cet artiste, qui auroit eu plus de gloire, s’il eût moins abusé des dons de la nature, mourut à Gênes en 1629, à l’âge de soixante & douze ans.

J. Sadeler a gravé, d’après ce peintre, un Saint-François en exstâse.

Bernard a eu un fils nommé Valerio, dessinateur