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il n’a pas assez de corps pour être employé à l’huile. Ce blanc est une terre ou marne blanche qui se fond très-facilement dans l’eau. Pour lui êter son gravier & la purifier, on la fait dissoudre dans de l’eau bien claire & on l’y laisse reposer, ce qui se fait sans aucune manipulation. On jette cette première eau qui est ordinairement claire & sale. On lave cette marne de nouveau, jusqu’à ce que l’eau devienne blanche comme du lait, & on verse cette eau blanche dans des vases bien nets. On l’y laisse reposer jusqu’à ce que l’eau devienne claire & que tout le blanc soit déposé au fond. Alors on décante l’eau, ayant soin de ne la pas agiter, pour qu’une partie du blanc ne se mêle pas de nouveau avec elle. On pétrit le dépôt quand, par un commencement de dessication, il est réduit en une consistance de pâte, & on le laisse sécher à l’air où il se durcit. On met la partie la plus fine en petits bâtons, & on moule en grosses masses le fond qui est toujours plus grossier. Toutes les terres qui servent à la peinture se lavent & s’épurent de la même manière.

Le Blanc de craie est à-peu-près de la même espèce, mais moins fin, & plus dur. On le nomme aussi blanc de Troies, parce qu’il s’en prépare beaucoup en cette ville : la craie est si commune en Champagne, que la plupart des maisons de la ville de Reims en sont bâties. On choisit pour faire le blanc, la craie dont les molécules sont les plus fines, & dont la substance est le moins mêlangée de grains pierreux. On le purifie comme le blanc d’Espagne : il a de même trop peu de corps pour être employé dans la peinture à l’huile.

On pourroit, dit l’auteur du Traité de la peinture au pastel, employer, au lieu du blanc de Troies, le Kaolin, terre blanche, qui, réuni avec le Petuntsé, compose la pâte de la porcelaine. Il y en a de vastes carrières dans le Limosin, près de Saint-Iriex, & dans le diocèse d’Uzès, non loin du Pont-Saint-Esprit en Languedoc. Cette substance n’éprouve aucune altération dans le feu. Tout me porte à croire, ajoute le même écrivain, qu’elle réussiroit beaucoup mieux que la poudre de marbre dans la peinture à fresque. Le kaolin, suivant M. Valmont de Bomare, est une terre composée, blanche, farineuse, graveleuse, brillante. Dans l’analyse qu’il a faite de celui de la Chine, il a reconnu que la partie farineuse est calcaire, que les paillettes brillantes sont du mica, que les parties graveleuses sont de petits crystaux de quarz, & que la partie empâtante qui sert de cément, est argilleuse. Il a trouvé quantité de terre semblable sur les couches de granit qui se voient aux villages du grand & du petit Hertrey, près d’Alençon, & il soupçonne que ce kaolin n’est que du mauvais granit détruit.


Il a recontré de semblable kaolin dans ses voyages en Bretagne, en Allemagne & en Suisse.

Le Blanc de plomb est celui qu’on emp1oie à l’huile ; il fait corps avec elle. Ce blanc est une sorte de rouille ou d’efflorescence du plomb qui le ronge à la longue, comme la rouille ronge le fer. Cependant si l’on ne pouvoit avoir d’autre blanc de plomb que celui qui se forme naturellement sur ce métal par l’acide de l’air, il seroit trop rare pour le grand usage que l’on en fait : mais l’art est parvenu à accélérer la marche de la nature, & l’on a trouvé deux manières artificielles de faire le blanc de plomb.

Dans la première, on réduit le plomb en lames minces que l’on trempe dans du vinaigre fort, & qu’on grate tous les jours pour enlever la rouille qui couvre sa surface. On répète cette opération jusqu’à ce que toute la substance du plomb se soit réduite en efflorescence.

Voici l’autre procédé, tel que le donne M. Watin, dans son Art du peintre, doreur, vernisseur. On coupe du plomb en lames fort minces qu’on pose sur des bois mis en travers dans un vase, au fond duquel on a versé de fort vinaigre à la hauteur de quatre à cinq doigts. On lute bien le vase, on le met sur un feu modéré, ou sur des cendres chaudes, Dans le travail en grand, au lieu de tenir le vase sur du feu, on le dépose pendant une dixaine de jours dans du fumier. Quand on découvre le pot, on trouve que ces lames sont devenues plus volumineuses qu’elles n’étoient, & qu’elles se sont couvertes d’espèces d’écailles blanches, dures & friables ; c’est ce qu’on appelle du blanc de plomb en écailles. Au milieu de ces feuillets, il reste quelquefois de petites lames de plomb qui ne sont pas entrées en efflorescence, & qu’on doit séparer comme inutiles. Quelquefois aussi les feuillets sont couverts d’une matière jaune & grasse qu’on doit ratisser avant que de les broyer. Cette matière jaune peut venir de lames de plomb qui n’étoient pas bien nettes à leur superficie quand on les a renfermées dans le vase.

Quand on veut que le blanc de plomb soit de la plus grande beauté, il faut le broyer à quatre reprises différentes sur le porphyre avec de l’eau claire & le plus promptement qu’il est possible. Plus il est broyé, plus il devient blanc. Il y a des personnes qui le broyent d’abord au vinaigre, & ensuite le lavent à l’eau ; mais la première manipulation est au moins inutile.

On le laisse ensuite sécher en trochisques, ou petits grains, dans un endroit où il ne soit pas exposé à la poussière. Si au lieu de le conserver en cet état, dans lequel il doit rester


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