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qui est l'un de ses meilleurs ouvrages. Il a publié un Recueil de sculptures antiques, grecques & romaines, gravées d'après ses dessins. Il est mort en 1759, âgé de cinquante-neuf ans.

(56) Paul-Ambroise Slodz, né à Paris en 1702, « réunit, dit Dandré Bardon, plusieurs genres de son art. Le dais du balda-quin du grand autel de Saint-Sulpice, les sculptures des deux balcons qui sont dans les bras de la croisée, celles de la chapelle de la Vierge, le bas-relief en bronze représentant les noces de Cana qui est au rétable, les ornemens & les figures du chœur de Saint-Méri, sont les productions de son génie. L'Icare qu'il a sculpté pour sa réception à l'académie, dont il fut professeur, est un ouvrage estimable. » Il est mort en 1758, âgé de cinquante six ans.

(57) Jean-Baptiste Lemoyne, fils de Jean-Louis, naquit à Paris en 1704, & fut élève de son père & de le Lorrain : mais en recevant leurs leçons, il ne consultoit pas avec moins de confiance Lagilliere & de Troi ; il se préparoit ainsi, dès sa première jeunesse, à associer à la sculpture les agrémens de la peinture, & on peut lui reprocher d'avoir trop méconnu les limites de son art en voulant les étendre, & de lui avoir ainsi fait plus de tort qu'il ne lui a procuré de perfection.

A l'âge de vingt ans, il remporta le premier prix de sculpture à l'académie royale, & avoit acquis le droit de faire le voyage de Rome avec la pension du roi mais son père demanda comme une grace que le jeune homme fùt exempt d'accepter ce bienfait, & par une tendresse aveugle, il éteignit devant son fils le flambeau dont il avoit besoin d'être éclairé. Plus le jeune homme montroit de feu immodéré, plus il paroissoit rechercher ces agrémens séducteurs qu'un peut appeller le bel-esprit de l'art, plus il avoit besoin d'être remis dans la route du vrai beau, par le spectacle & l'étude des grands modèles de l'antiquité & des ouvrages des plus sages maîtres modernes.

Il se fit avantageusement connoître par la figure de J. C. dans la composition du baptême du Sauveur, ouvrage dont Jean-Baptiste Lemoyne, son oncle, étoit chargé pour le maître-autel de Saint-Jean-en-Grève, & que la mort l'empêcha de terminer. L'âge de l'auteur, qui n'avoit pas encore vingt-cinq ans, ajouta à l'admiration du public, & ce premier succès valut au jeune artiste une entreprise qui devoit consommer sa réputation ; c'étoit une statue équestre & colossale de Louis XV, destinée pour la ville de Bordeaux. Le monarque est vêtu à la romaine : l'air de noblesse de ce


prince est heureusement saisi. Il commande & son regard se porte du côté opposé à celui qu'indique le geste. Quand Louis XV, suivi de sa cour, vint voir le modèle dans l'attelier de l'artiste, le prince Charles, grand écuyer, blâma ce contraste, & prétendit que le geste devoit être d'accord avec le regard. Le roi, sans prendre la peine d'entrer dans une longue discussion, se pose dans l'attitude du modèle, regarde le grard écuyer, dirige son geste du côté opposé ; c'est ainsi, dit-il, que je commande. Il ajouta à cette justification une pension de quinze cents livres.

Il est certain que la critique du prince Charles étoit fausse, & que l'artiste avoit bien fait de saisir un contraste qui est dans la nature. Souvent on fixe le regard sur celui à qui l'on commande, & l'on indique par le geste un côté opposé, qui est celui vers lequel on ordonne de se porter.

Le succès du modèle étoit décidé ; mais la moitié supérieure de la fonte manqua. Cet accident si grave fut réparé par un procédé ingénieux qu'imagina le fondeur Varin. Il fit tailler à queues d'arronde la partie qui avoit réussi, & par une seconde fonte, le métal réduit à l'état de liquéfaction, se joignit avec solidité à celui de la première. Il est impossible de reconnoître que ce monument, haut de plus de quatorze pieds, n'a pas été fondu d'un seul jet. Ce même procédé a été employé par M. Falconet à Saint Pétersbourg, pour réparer un accident moins considérable à la statue équestre de Pierre I.

Les états de Bretagne voulurent consacrer par un monument immortel la joie qu'ils éprouvèrent avec toute la France, lorsque ce monarque, attaqué à Metz d'une maladie que l'on croyoit mortelle, fut rendu à l'amour de ses sujets. Le Moyne représenta le prince élevé sur une trône orné de drapeaux & de trophées, & près de marcher à de nouveaux exploits. La province de Bretagne, fléchissant le genou devant le souverain, indique aux citoyens la protection qu'il leur accorde. La santé placée a la droite du roi, tient un serpent qui boit dans une jatte qu'elle lui présente. On voit près d'elle un autel entouré de fruits. Quand Louis XV vint voir ce monument terminé, il accueiliit avec bonté l'épouse de l'artiste, promit de faire tenir en son nom, sur les fonds de baptême, l'enfant dont elle etoit nceinte, & dont il assura la destinée par ses bienfaits.

Quoique ces deux ouvrages capitaux aient été transportés dans les provinces, les habitans de la capitale peuvent apprécier les talens de l'auteur. On voit de lui aux Jacobins de la rue Saint-Honoré, le mausolée de Mignard, premier peintre du roi, la statue de Saint-Grégoire & celle de Sainte-Thérèse aux Invalides,


Beaux-Arts. Tome II. Q q