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doit aussi, abstraction faite des, couleurs, considérés les reflets par rapport au clair-obscur. C’est par eux que les parties ombrées ne sont pas entierement obscures. On peut aisement, comme nous l’avons dit ailleurs, remarquer sur un globe ou sur une colonne, la lumière, la demi-teinte, l’ombre & le reflet, c’est-à dire la partie du globe ou de la colonne qui étant plongée dans l’ombre reçoit une lumière qui jaillit des objets voisins, lumière toujours plus foible que la plus forte demi-teinte, mais qui paroît cependant quelquefois assez brillante, quandon la considère par comparaison avec la partie la plus fortement ombrée.

Un objet, dit Dandré Bardon, « ne peut être arrondi sans le secours des reflets ; c’est par leur entremise qu’il prend le plus parfait relief. Ils ne contribuent pas moins à la légèreté, à la vaguesse, à l’harmonie du tout-ensemble, qu’à l’effet, au saillant de tous les détails. »

« En rendant les parties qui tournent plus fuyantes & plus douces, les reflets en favorisent la rondeur ; ils forment l’accord général en communiquant aux corps les réjaillissemens réciproques & des lumières qu’il reçoivent, & des tons dont ils sont colorés. Ces réjaillissemens qui portent une nuance empruntée du sujet qui renvoye, suivent la même marche qu’une balle qui, en rebondissant, ouvre plus ou moins son angle, suivant la force du bras qui la jette & la nature du corps qui la repousse. Les reflets, conséquemment, doivent être differens en force & en couleur, en proportion de la lumière qui les produit, & relativement à la nature de l’objet qui les renvoye. »

« De deux corps voisins, le plus brillant & le plus lumineux prête ses nuances à l’autre, sans en rien emprunter ; telle la clarté d’un flambeau communique sa lueur rougeâtre au corps qu’elle éclaire, sans participer du ton du corps éclairé. »

« Sans le secours des reflets, dit encore le même artiste, on ne sauroit produire la rondeur des corps ni éviter de répandre de le dureté dans un tableau : les objets auroiont alors quelque chose de mat & de terne qui déplaît même quand on le trouve dans la nature, parce qu’alors, dénuée de’graces, elle paroît triste & lourde. L’art des reflets n’étant autre chose que celui d’employer avec succès les réverbérations & les couleurs rompues que les autres corps empruntent les uns des autres, il en naît ie lumineux & l’harmonie du tableau. Soit que les objets se mirent’réciproquement sur leurs surfaces, soit qu’il se fasse entr’eux une communication mutuelle des rayons du jour qu’ils se


réfléchissent, il en résulte l’accord & l’éclat sans lesquels l’art ne sauroit parvenir à l’illusion. »

M. Cochin remarque qu’il a été un temps où l’on ne faisoit pas assez d’attention au jeu des lumières de reflet : « mais peut-être depuis, ajoute-t-il, les a-t-on trop observées, ce a qui peut produire des tableaux foibles. C’est même un des défauts à la mode ; & nous appercevons souvent, chez les jeunes gens surtout, des reflets aussi brillans & aussi beaux de couleur que les demi-teintes ; c’est une manière qu’ils prennent les uns des autres, & qu’ils appellent beauté de coloris : mais cela ne se voit pas dans la nature, & particulièrement lorsqu’elle est vue de la distance qu’on suppose toujours à son tableau. Toute lumière renvoyée par un objet a perdu la plus grande partie de son éclat ; aussi elle ne peut produire des tons ni aussi beaux, ni aussi lumineux que la lumière directe. »

Cette théorie est vraie, & n’est pas contrariée par les ouvrages de Rubens, quoiqu’il ait donné aux reflets la plus grande clarté dont ils soient susceptibles. Il a porté au plus haut dégré la magie des ombres reflétées, largemement étendues, & contrastées avec les bruns les plus vigoureux.


Reflet des objets qui se mirent dans l’eau. Ce sujet sera traité dans le dictionnaire de pratique.


REFRACTION (sust. fem.) Rupture apparente que semble éprouver un objet en passant d’un milieu plus rare dans un autre plus dense, comme de l’air dans l’eau ; car il n’y a que cette sorte de réfraction qui intéresse les peintres. Tout le monde a apperçu qu’un bâton parfaitement droit, que l’on plonge en partie dans l’eau, paroît se briser, & que si la partie qui reste hors de l’eau est perpendiculaire, celle qui est dans l’eau semble prendre une direction oblique.

« Lorsque nous regardons un bâton, une pierre, ou quelqu’autre chose qui est effectivement dans l’eau, dit Félibien, tons ces corps paroissent à la vue autrement qu’ils ne sont en effet. C’est ainsi que nous voyons au fond d’un vase rempli d’eau, une pièce de monnoie que nous ne pouvions voir auparavant ; que la jambe d’un homme qui n’est qu’à moitie dans l’eau, nous paroît rompue & plus grosse qu’elle ne l’est, & que ce qui est au fond de l’eau nous parois plus proche. Mais si les corps paroissent plus gros dans l’eau, les couleurs en même temps s’affoiblissent & diminuent à la vue. Cependant il faut avoir égard à la nature des eaux &


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