Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T02.djvu/245

Cette page n’a pas encore été corrigée

P R O

loflale. Ce raifonnement autorife affeï las , peintres quî ont fuivi la pratique <3a Corrège. s j M. Cochinavoue qu’il n’exjfte aucun exemple 1 par lequel on puiflTe démontrer le bon effet que produiroient les premières figures d’un , plafond réduite* à la dimenfion ordinaire de l’homme : c’eft avouer que tous les artiites qui , depuis la renaiflance des arts , ont été char- ■ gés de peindre des plafonds, & qui ont dû, plus que tous les autres , méditer lur les loix de ces machines pittoreiques, ont fenti ou cru fentir qu’elles cxigeoient, furies premiers plans, des dimenfions fupérieures à celles de la nature. Il faut obferver qu’en général ces artifles ont été les plus célèbres de leur tems & de leur pays , & qu’ils ont même été fouvent appelles de loin , fur leur réputation , par des Princes étrangers , pour faire de grands . fluvrages.

Je croî» d’ailleurs qu’il exifle quelques pla-’ îfonds dont les figures ont été trouvées trop petites -, ma mémoire ne me permet pas de l’affirmer : mais il eft certain qu’on a tait ce reprothe à des tableaux quand ils ont été placés à une trop grande élévation.

Ou ne peut favoir fi les Grecs , dans les peintures dont ils couvroient les murailles, ont fait des figures colloflales-, mais on fçait que leurs plus célèbres fculpteurs fe font illuftrés par des colloffes placés dans des temples qui n’avoient pas une très-vafte étendue. Ce peuple aimoît le grand, dans les idées, dans les formes, dans les dimenfions. Les héros d’Homère avoient une force fur-humaine & on ne peut guère s’empêcher, en lifant ce poëte, de leur donner une taille au-deffiis de ■ l’humanité : l’imagination de Boucharden les lui reprcfentoit comme des colloffes. Les Dieux, fupétjeurs en force aux héros, dévoient être Aufll d une plus grande proportion. La fiatue coUoffale d’une divinité en impofoit bien plus , aux fpeâateurs , & s’accordoit mieux avec leurs idées, que.n’aureit fait une ftatue de taille humaine. N’en peut-il pas être de même des objets de notre vénération repréfentés dans nos temples ? Sans doute, fi quelques-uns de nos critiques modernes pouvoient voir les chefsd’œuvre de Phidias, ils ne lui pardonneroient pas d’avoir faitun coUoffe de fon Jupiter Olympien , &. voudroient qu’il fe fût réduit à faire un Jupiter de fix pieds : mais ce n’étoit pas ainfi que la grande imagination du ftatuaire s’étoit repréfenté le dieu qui ébranle l’Olympe

4*"" mouvement de fes fourcils.

I • Ajoutons que vouloir réduire à. la proportion f de fix pieds, toutes les ftatues qui ne font point dans [intérieur des appartement, c’eft con- , damner à une proportion mefquine celles qui ■ doivent faire l’ornement des grandes places ; s’efl : rendre inutijes toutes celles qui deyroient P R O

? 

être établies à une très-haute élévation. Difons encore que fi l’on veut réduire à une foible proportion toutes les ftatues trè-ï-éloignées de la vue, ii ne fera plus néceffaire d’en charger des fculpteurs habiles : le premier valet qui fe fera exercé l’hiver à modeler des figures de neige, aura tout le talent requis pour fabriquer une ilacue qui ne pourra être jugée. » En même tems, dit M. Ccchin, que » celui qui feroit placé au point le plus éloigné » de la nef d’une églife, ne trouveroit peut-être rien d’excefilf dans une ftatue, celui » qui s’en trouveroit plus proche, feroit choque d une auffi grande difproportion avec » la nature humaine n. La réponfe à cette objeilion, c’eft que (1 la ftatue n’a rien d’excelTif pour celui qui en fera près, elle paroîtra petite à celui qui en fêta loin ; & que dam un lieu vafte , le nombre des fpeclateurs éloignés de la ftatue fera le plus confidérable. Nous nous en tiendrons à notre principe ; c’eft qu’une ftatue doit être confidérée comme un ornement, comme une partie de la place ott de l’édifice oii elle fe trouve, & exciter un fentiment de plaifir dans l’ame de ceux qut ne font encore qu’y entrer : car la place ou l’édifice qui fait un tout avec la ftatue doit plaire dès le premier afped, & avant qu’on en puifTe examiner les détails. Le fentiment du plaifir naît de la juftelTe àes proportions : pour qu’un édifice , qu’on doit regarder comme un corps, plaife à la première vue, il faut que fes membres lui foient proportionnés, & les ftatues qui le décorent font partie de ks membres.

Les figures , dît-on , font les habîtans fictifs des lieux où elles font placées • elles doivent donc être colloffales dans des habitations colloffales, & celles qui, dans ces habitations , ftjnt placées à une grande élévation doivent augmenter de proportion à mefure qu’elles s’élèvent, pour paroître encore collofalles, quoiqu’apperçues d’une grande diftance.

On nous accorde que, dans un édifice colloffal, les figures peuvent avoir jufqu’à neuf pieds de proportion. Dès qu’on veut bien condefcendre à nous accorder ainfî quelque chofe d’arbitraire, oft nous rend la liberté de laiffsr juges de cet arbitraire & le Corrège, & tous les habiles peintres qui ontfuivi les principes qu’il leur avoir indiquéi^, - & tous les célèbres ftatuaires qui ont confacré leurstalensà la décoration des grands édifices : car comment oferions-nous oppofer notre fen» fentiment arbitraire, au fentiment, à la réflexion , à l’expérience de tant de maîtres ? Il s’agit ici d’une qiieftion de goût. Bien des personnes fe fentiront portées à en laiffer plutôt la décifion à l’autorité d’artiftes en grand Gg ij